vendredi 30 novembre 2012

Pygmalyon - Go - Festival MAR.T.O

Nous avons vu deux spectacles dans le cadre de la treizième édition du festival M.A.R.T.O (Marionnettes et Théâtre d'Objet). Pour en savoir plus en cliquant ici.

Un premier spectacle est inspiré du mythe de Pygmalion. Une marionnette en résine, quelques objets, des jeux d'ombres, Renaud Herbin propose une évocation du mythe de Pygmalion, sculpteur  tombé amoureux de sa créature qui par l'intervention d'Aphrodite prend vie. Numéro d'une véritable virtuosité qui se révèle assez froide, et si nous sommes impressionnés par l'exécution de certains passages, l'ennui n'est jamais très loin.  Ce spectacle fut peut être desservi par une distance trop grande entre le public et l'acteur. Dans le programme distribué à l'entrée nous avions un extrait des métamorphoses d'Ovide, le spectacle ne nous en a pas rendu la saveur...

Le deuxième spectacle fut un réel enchantement .Polina Borisova, une artiste russe interprète une dame âgée, seule chez elle qui se retourne sur le temps passé. Théâtre d'objets où avec un simple ruban adhésif, la comédienne nous reconstitue des personnages, une atmosphère... Elle nous offre un portrait émouvant de cette vieille personne mélancolique dont les souvenirs du passé sont pour elle la seule fenêtre sur la vie, une manière de traverser les journées de solitude. Drôle, poétique ce numéro de haut vol est un pur moment de bonheur...  Un spectacle à voir !

mercredi 28 novembre 2012

Les désemparés - Max Ophuls

Dernier film hollywoodien de Max Ophuls, "Les désemparés" est le portrait d'une femme déchirée par sa conscience, un thème cher au cinéaste. Lucia élève seule ses deux  enfants, son beau père est également présent dans la maison familiale, mais son mari en déplacement permanent est souvent absent. Lorsqu'elle découvre que sa fille Bea a une liaison avec Ted Darby, un homme plus âgé peu recommandable, elle se rend dans un  hôtel sordide où ce dernier semble loger. Elle lui demande de mettre fin à la liaison qu'il entretient avec sa fille, celui est prêt à accepter l'offre de la mère à condition qu'elle lui donne de l'argent, ce qu'elle refuse.
Lucia révèle la vraie nature de son amant à Bea, cette dernière refuse de la croire... Elle quitte discrètement le domicile la nuit venue pour rejoindre Ted qui révèle à la jeune fille sa vraie nature. Celle ci le repousse et court se cacher dans sa chambre sans se rendre compte que  dans sa chute accidentelle lui a été fatale. C'est sa mère qui au petit matin retrouve le corps, elle va le plonger dans le lac voisin. Mais le corps est vite retrouvé. Un maitre chanteur qui possédait les lettres de la jeune fille envoyées à son amant vient faire du chantage à la mère.... elle n'est toujours pas débarrassée de ses soucis. Lucia ne cède devant rien, elle mène son combat pour protéger sa famille même si pour cela elle doit renoncer à une part de son honnêteté.
C'est un scénario assez traditionnel de film noir, avec un budget limité, les deux films précédents de Max Ophuls n'ont pas fait un carton au box office il ne bénéficie pas d'une confiance aveugle de la part des studios. Le producteur Walter Wanger, époux de Joan Bennett a d'ailleurs pensé dans un premier temps à Jean Renoir mais il renonça à ce dernier trop cher, se tournant alors vers Max Ophuls. Le budget est limité, le temps de tournage est assez court. Pour autant le metteur en scène ne renonce pas à ses principes et à son goût immodéré pour les longs plans séquences, profitant d'une équipe technique expérimentée. Lutz Batcher qui a écrit une biographie sur Max Ophuls explique comment ce qui est prévu pour être tourné en 15 plans dans le scénario, est intégré dans un seul plan séquence par le cinéaste... Il désire une grue, le studio lui refuse à chaque fois il trouve une parade sans renoncer à son style si particulier. Ainsi à partir d'un petit film, il réalise un petit chef d’œuvre de film noir où la tension est savamment menée à son paroxysme. Face à Joan Bennet remarquable, James Mason assume un rôle de sinistre maître chanteur avant de fondre sous le charme de la mère protectrice, un rôle plein d'ambiguité qui lui va comme un gant . Mais son complice n'a pas la même faiblesse devant la dame, donnant au final toute sa force.
Le cinéma de Ophuls s'est enrichi sous l'influence du néo-réalisme italien notamment dans cette scène où Lucia part seule sur un bateau pour se débarrasser du corps de Ted Darby, filmée comme une scène de vie prise sur le fait nous y voyons une  une influence directe du cinéma de Roberto Rossellini.
Un film resté longtemps invisible qui mérite d'être vu car comme toujours chez Max Ophuls, le sujet est totalement maitrisé nous offrant un vrai spectacle. Il eut une influence majeure sur les cinéastes hollywoodiens impressionnés par la maitrise de sa mise en scène.

Vu dans le cadre de notre cycle Max Ophuls.

dimanche 25 novembre 2012

Au-dela des collines - Cristian Mungiu

Alina, de retour d'Allemagne est venue chercher son amie Voichita. . Ces deux là se sont connues à l'orphelinat, elles ont grandi cote à cote, et parce qu'elle avait appris le karaté Alina a offert sa protection à son amie. Nous sommes dans un coin reculé de la Roumanie livré à la pauvreté; l'orphelinat est totalement démuni pour offrir sa protection aux jeunes filles.
Alina partie en Allemagne, Voichita s'est réfugiée dans un couvent orthodoxe voisin. Là, elle  a trouvé une famille et découvert son amour pour le Christ, acceptant de vivre sans aucun confort. Il n'y a pas d'électricité, il faut puiser l'eau. C'est cet amour pour le Christ qui braque sa copine Alina alors qu'elles s'étaient jurées fidélité à l'orphelinat. Elle ne peut supporter de voir son amie refuser les caresses qu'elles avaient prises l'habitude d'échanger dans leurs jeunes années. Alina se révolte contre cette situation nouvelle, elle fait une violente crise nerveuse, les nonnes sous l'ordre du pope n'ont pas d'autre solution que d'attacher la jeune fille pour la mener à l'hôpital où elle finit par retrouver son calme. Mais l’hôpital n'a pas les moyens de la garder, le médecin pense que le couvent lui offrira un cadre plus propice à sa guérison. Alina qui ne peut obtenir de Voichita une relation exclusive rechute... Le pope voit dans les crises de la jeune fille la main du malin, il propose de l 'exorciser. Elle est attachée, seulement nourrie de pain sec, les messes et les prières se multiplient... Alina finit par mourir d'épuisement.
Inspiré par un véritable fait d'hiver qui avait jeté en 2005 la Roumanie dans l'effroi, tant les faits semblaient relever d'une époque  révolue. Nous restons impressionnés par la prestation des deux actrices, Cosmina Stratan et Cristina Flutur justement récompensées au dernier festival de Cannes. Elles sont absolument incroyables, dirigée magistralement par Cristian Mungiu . La mise en scène est d'une précision chirurgicale, chaque plan est soigné et donne au récit toute sa force durant 2H30 . C'est une plongée dans une zone de grande pauvreté, la Moldavie où il semble que rien n'a bougé depuis l'époque de Ceaucescu.  Il n'y a pas vraiment de méchants car à aucun moment nous ne pouvons douter de la sincérité du pope et de ses ouailles, ils veulent sincèrement sauver cette jeune fille de ses démons, ils sont victimes de leur ignorance, d'une vie sans ouverture sur le monde, rythmée par des pratiques superstitieuses.
Un grand film de Cristian Mungiu qui nous avait déjà bouleversé avec 4 mois, 3 semaines, 2 jours. Il signe à nouveau un magnifique portrait de femmes. 

Vu à l'UGC des Halles

Tantôt Rouge Tantôt Bleu - Mona Heftre chante Serge Rezvani

Les chansons de celui qui se faisait alors appeler Bassiak restent intimement liées au cinéma de la nouvelle vague et plus particulièrement au Jules et Jim de François Truffaut et à Pierrot le fou de Jean-Luc Godard. Le tourbillon chanté par Jeanne Moreau ou Jamais je ne t'ai dit.... interprété par Anna Karina restent ancrés à jamais dans la mémoire des amoureux du cinéma des années 60.  Avec ses textes d'une étonnante légèreté, véritables tranches de vie, Serge Rezvani signe une des plus belles pages de la chanson française.
En 2000, les éditions Actes Sud ont sorti un livre-disque, recueil des textes de Serge Rezvani, associé au disque où Mona Heftre reprend avec simplicité les chansons de l'écrivain,  acteur dans Jules et Jim.
Dans une préface, Serge Rezvani revenait sur cette période de sa vie:
"Ces chansons, que Mona Heftre, chante aujourd'hui si merveilleusement, datent des années soixante. Leurs paroles et leurs musiques sont venues ensemble, dans un même mouvement de félicité, en contrepoint des jours vécues avec celle qui les a inspirées - et que dans mes romans autobiographiques j'ai nommée Lula.
Pour la plupart, d'ailleurs ces chansons sont un peu comme le journal chanté de ma vie avec elle, la femme de ma vie. Elles nous disent. Elles disent l'émoi de se découvrir et d'avoir le privilège de vivre ensemble.
Donc elles seraient en quelque sorte un chant naturel venu de lui-même avec facilité, bonheur, facétie. Je les ai composés sans y penser vraiment, la musique portant les mots, poussé malgré moi par le besoin vital de fixer mes émotions, de dire sur un monde inattendu - venant du peintre que j'étais- mon amour pour cette femme... et aussi par la joie de partager ces moments de félicité aves les amis qui nous entouraient."


samedi 24 novembre 2012

Les lignes de Wellington - Valeria Sarmiento

Septembre 1810, les troupes de Napoléon avec le Maréchal Massena à leur tête envahissent le Portugal, ils subissent une première défaite sévère lors de la bataille de Buçaco perdant plus de 5000 hommes face à une coalition anglo-portugaise dirigée par Wellington.  Après cette victoire, les forces alliées traversent le pays pour se replier derrière les lignes fortifiés de Torres Vedras conçues par le général anglais. La population a suivi le repli menant une véritable politique de terres brulées, ne laissant aucune ressource aux forces françaises, arrivées face aux fortifications, elles n'ont pas d'autre alternative que d'abandonner le combat. Le Portugal et son allié anglais ont gagné cette guerre, mais le pays est totalement ruiné.
Le risque de cette grande fresque historique était de nous proposer un récit académique. Valeria Sarmiento qui a repris le projet de son compagnon Raoul Ruiz décédé évite tous les écueils. Nous suivons cette traversée du Portugal, basculant d'un camp à l'autre,  des petites histoires se forment donnant un ton romanesque à ce film de guerre. Nous suivons le destin aussi bien des petits gens que des grands avec parmi eux un Wellington totalement imbu de lui-même incarné merveilleusement par John Malkovitch. Le film n'est pas qu'une simple reconstitution d'une bataille napoléonienne, il nous montre cet exode propre à de nombreux conflits où les populations civiles se mélangent aux forces armées avec leurs lots de déserteurs, de profiteurs, de traitres mais aussi des âmes qui révèlent toute leur grandeur...  La guerre livre le pays aux soudards, les femmes sont les premières victimes.
Difficile de ne pas penser aux Mystères de Lisbonne, le chef d’œuvre de Raoul Ruiz, nous retrouvons ici la même qualité d'image, le même sens du romanesque. Nous retrouvons la magie des grands récits historiques  de la littérature du XIX°.
Magnifique !

vendredi 23 novembre 2012

Thérése Desqueyroux - François Mauriac

"Madame Bovary, c'est moi !" aurait dit Gustave Flaubert.A vrai dire cela semble plutôt relever de la légende que d'une vérité littéraire,mais en admirateurs de l'homme qui tua Liberty Valance nous choisissons les légendes et nous n'hésitons pas à écrire ce jour que Thérèse Desqueyroux c'est François Mauriac.  Cela devient d'autant plus évident lorsqu'on sait depuis les derniers éléments biographiques parus, que François Mauriac a lutté toute sa vie contre ses pulsions homosexuelles pour rester fidèle à ses engagements chrétiens, Il avait conscience de la  cruauté de la différence dans un milieu bourgeois conservateur, l'importance que tient Thérèse dans son œuvre romanesque révèle un véritable attachement pour ce personnage
Le roman s'ouvre sur Thérèse quittant le bureau du juge d'instruction qui a accordé un non lieu. Grâce au témoignage de son mari la voila disculpée de sa tentative d'empoisonnement à son encontre . Chez les Desqueyroux les histoires de famille se règlent en famille et non dans les palais de Justice... Thérèse reprend la route vers le domicile conjugal le temps de préparer les mots qu'elle va dire à celui qu'elle a voulu tuer!
Qu'on ne se méprenne pas le mariage ne fut pas imposé à Thérèse, elle y a consenti parce qu'elle avait la "propriété dans le sang" et il n'y avait pas plus beau mariage à espérer dans le pays pour accroitre le domaine. Mais très vite le mariage la décoit, Bernard n'a aucune sensualité, elle est prisonnière de convenances ancestrales... c'est de toute autre chose qu'avait révé Thérèse. Jeune fille, son père lui avait laissé accés à la littérature un vrai poison pour une jeune fille, une fille pas comme les autres qui fume comme un garçon et rêve de liberté. Alors lorsqu'un soir elle voit son mari se resservir à tort de son médicament à base d'Arsenic, lui vient la fatale idée... un chemin vers la libération !
Lorsqu'elle arrive libre chez son époux, il lui annonce son nouveau régime carcéral, condamné à vivre recluse dans la maison familiale définitivement écartée de sa fille Marie  jusqu'à ce que Anne la belle sœur de Bernard soit mariée il faut que les convenances soit respectées... Thérèse sombre dans la depression, Anne mariée elle peut enfin  partir s'installer à Paris.

Ce personnage tenait à cœur à François Mauriac, nous retrouvons Thérèse dans deux nouvelles: Thérèse chez le docteur et Thérèse à l'hôtel avec toujours ce besoin de séduire mélé à un gout de destruction... puis enfin  dans le roman "la fin de la nuit" où elle renoue avec sa fille Marie devenue une jeune adulte!

Admirable François Mauriac, un des esprits les plus brillants du XXeme qui signe ici un roman magistral !

jeudi 22 novembre 2012

Herzog - Saul Bellow


Moses Herzog, deux mariages deux divorces,  une carrière universitaire mais des travaux de recherche jamais véritablement menés à leur terme, est au bord du gouffre; à un âge où on commence  à se retourner sur son passé pour découvrir parfois avec amertume que sa vie est ratée...

"J'ai peut être perdu l'esprit, mais ça ne me dérange pas, songea Moses Herzog"

Il tangue, un genou mis à terre depuis sa séparation avec sa deuxième épouse Madeleine partie avec son meilleur ami.  Saul Bellow n'a pas eu la vie de facile, il passe ses premières années au Canada, son père un bootleger de bas étage a bien du mal avec les affaires... Issu d'une famille juive originaire de Saint Petersbourg qui a connu en son temps une période faste bien révolue lorsque Moses arrive au mode. C'est peut être de cette jeunesse chaotique qu'il tire sa force pour combattre la dépression. Dans une sorte de folie furieuse, Herzog se lance dans une correspondance sans fin où il écrit sa colére à ses proches, à des journalistes, au président des Etats Unis mais aussi à Nietzsche ou Spinoza.  Ces lettres ne sont jamais envoyées mais elles permettent à Moses de se reconstruire.
Le voyage que nous propose Saül Bellow nous mène au cœur du système de pensée de son héros Moses Herzog, un esprit fertile qui ne se repose jamais, il profite de cette crise pour faire défiler tous les évènements marquant de sa vie. Ça part dans tous les sens, et c'est bien là le génie de Saul Bellow, nous suivons toutes les digressions sans jamais nous perdre; au contraire, nous suivons avec passion ces pérégrinations, qui nous mènent de New-York à Chicago en passant par un coin perdu du fin fond du Massachusetts, nous rions souvent de ces mésaventures et de ces diatribes, nous ramassons toutes les pièces du puzzle et l'image est bien nette quand nous refermons le roman.
Saul Bellow fait partie de ces grands romanciers américains, descendant d'une famille juive d’Europe de l'est. Même né sur le continent américain, au Québec il est fortement marqué par la culture yiddish. Il est d'ailleurs le premier à avoir traduit du yiddish à l'anglais une œuvre de Isaac Baashevis Singer: Gimpel le naïf. Lauréat du prix Nobel en 1976, Philip Roth a pour lui la plus grande estime, il fut assurément une source d'inspiration pour celui qui vient d'écrire son dernier roman Némésis, nous sursautons d'ailleurs lorsque nous tombons sur ces lignes, comme si le titre du dernier roman de Philip Roth était un hommage à son maître:
"Mais moi, avec ma mémoire - tous  les morts et les fous sont sous ma garde, et je suis la Némésis des soi-disant oubliés."

Philip Roth signe d'ailleurs la présentation de la nouvelle édition des oeuvres de Saül Bellow édité dans la collection quarto chez Gallimard. Cet extrait nous montre combien cet auteur est important à ses yeux:

"Tel est Herzog, la plus grande création de Bellow, le Leopold Bloom de la littérature américaine, à ceci près qu'avec Ulysse l'esprit encyclopédique de l'auteur se fait chair dans le verbe qu'il écrit, sans que Joyce" confère jamais à Bloom sa vaste érudition, alors que dans Herzog,  Bellow donne à son héros non pas seulement un état d'esprit, une tournure d'esprit, mais un esprit digne de ce nom.."

Un très grand roman de la littérature américaine.

mercredi 21 novembre 2012

Skyfall - Sam Mendes

Nous n'avons jamais aimé James Bond, n'avons jamais supporté sa veulerie, sa "beaufitude" . Non seulement nous n'aimons pas le personnage mais nous avons toujours été étonnés par la laideur qui se dégage des films généralement réalisés par des tacherons du 7eme Art qui ont donné les pires rôles qui soient aux femmes. Du cinéma pour lecteur du feu magazine "Lui" .
Un rumeur bienveillante sur le dernier épisode nous a poussé ce matin  à aller le découvrir. Nous devons reconnaitre que faire incarner l'espion par Daniel Craig est une excellente idée donnant ainsi un petit coté "poutine" au héros, il ne mérite pas mieux !
Cela s'ouvre par une course poursuite dans les rue d'Istanbul occasion rêvée pour faire de la publicité à différentes marques de véhicules, car c'est aussi cela James Bond un film publicitaire... Les services de la reine n'ont vraiment pas assuré ils se sont fait voler un disque dur avec la liste des agents infiltrés dans différents groupes terroristes, Bond est descendu à l'issue de cette première poursuite, laissé pour mort, son chef écrit son éloge funèbre...Mais 007 est immortel il refait surface... Vieillissant, dépassé par les nouvelles techniques, il garde malgré tout la confiance de M . Il repart au boulot, l’enquête le mène à Shanghai, à Macao avant de se conclure dans son domaine natal au cœur de l'Ecosse. Des paysages parfaits pour de futurs jeux vidéos !
Le méchant met un peu de temps pour faire son entrée en scène, nous offrant une première scène aux sous entendus homosexuels, un méchant plutôt ridicule incarné par un Javier Bardem peroxydé  totalement caricatural... le tout se termine par une scène grotesque de "poum- poum".
Sam Mendes n'est pas arrivé à nous rendre digeste le héros anglais, pourtant il a tenté de rendre le personnage plus complexe, plus épais en nous livrant des éléments de jeunesse du héros. Mais rien n'y fait James Bond nous ennuie toujours autant!

mardi 20 novembre 2012

Collaboration - Ronard Harwood

Collaboration raconte l'amitié entre Richard Strauss et Stefan Zweig. Hugo Van Hoffmansthal est mort, Richard Strauss est à la recherche d'un nouveau librettiste. Il s'adresse à Zweig pour qui il a la plus grande estime, ce dernier par admiration accepte de travailler avec  le musicien, de cette collaboration naissent une véritable amitié et un opéra bouffe inspiré d'un texte de Ben Johnson "la femme silencieuse". L'arrivée au pouvoir des nazis va séparer les deux hommes, Zweig n'a pas d'autre choix que de fuir, Strauss reste en Allemagne il défend son opéra impose le nom de Zweig sur les affiches. Il n'est joué que deux fois. Pour autant Strauss continue de collaborer, le fait de rester en Allemagne lui impose cette attitude notamment pour protéger sa belle fille juive et ses petits enfants. Il n'a jamais adhéré au Parti national socialiste, la politique ne l’intéressait pas seule la musique comptait pour lui..
Le sujet est passionnant, mais l'écriture pesante trop démonstrative finit par ressembler à un exposé certes brillant mais d'un didactisme ennuyeux. Pas beaucoup de rythme, une suite de tableaux qui nous emmène de 1931 à 1948 et le procès de Strauss, la mise en scène de Georges Werler s'enlise dans un train train ennuyeux nous rappelant les téléfilms à valeur éducative de nos chaines publiques. Michel Aumont et Didier Sandre s'amusent à jouer ces deux génies du XX° siècle, cela devient une habitude au théâtre de chercher à reconstituer les grandes rencontres des grands hommes du passé, nous en avons définitivement soupé...

L’intérêt de cette pièce c'est qu'elle nous a emmené à relire le texte de Klaus Mann écrit après une visite  au compositeur à la fin du conflit. Pour ne pas fausser l'interview, Klauss Mann cache son identité sachant que le musicien a signé un texte inspiré par les nazis contre son père Thomas Mann.
Richard Strauss se plaint beaucoup notamment d'avoir eu à héberger des familles allemandes victimes des bombardements à la fin de la guerre, Hitler refusant de faire exception pour le compositeur en invoquant que tout citoyen devait consentir des sacrifices en période d'urgence nationale. Klaus Mann ne peut s’empêcher ce commentaire plein d'ironie: "Cette décision - peut -être la seule raisonnable jamais prise par Hitler- semble avoir suscité l'indignation de l'égoïste vieillard. le simple rappel de cet incident scandaleux renouvelait son irritation."

Rapidement  le journaliste met le sujet Zweig sur le tapis:
"Toute cette histoire fut extrêmement contrariante, nous expliqua Strauss. J'étais très mécontent de perdre Stefan Zweig - mon meilleur librettiste depuis la mort de Hugo Von Hoffmansthal, qui du reste était lui aussi en partie juif. Mais que pouvais-je faire? Il fallait que je trouve quelqu'un d'autre pour travailler. Connaissez vous Joseph Gregor? Il m'a écrit trois livrets - Capriccio, Jour de paix et Daphné. Pas mal du tout ce type, et tout ce qui a de plus aryen."

Dans ce même entretien, Strauss explique ne pas avoir compris pourquoi Bruno Walter refusa de le saluer lors d'une rencontre à Salzbourg après qu'il l'ait remplacé au pied levé en 1933 à la tête du philarmonique de Berlin lorsque ce dernier fut renvoyé du fait de ses origines juives.
Un autre extrait est particulièrement édifiant :"Ma belle fille est juive, expliqua M Strauss. Je peux affirmer qu'elle a été la seule juive libre de la grande Allemagne - et ce grâce à la générosité et à la bienveillance du Gauleiter."
-Relativement libre, devrai-tu dire papa, le corrigea-t-elle, non sans amertume. Moi aussi, j'ai souffert et subi des humiliations: après 1938, par exemple, je n'ai plus eu le droit de faire du cheval et de chasser."
Je jure que ce furent là ces paroles."

Un peu plus loin le musicien fait l'apologie de Hans Frank le gouverneur génral de la Pologne, un des pires criminels du régime Nazi.

Klauss Mann conclue ainsi: "C'était plus que je ne pouvais en supporter. Ce n'est que par égard pour l'âge de Richard Strauss que je réprimai quelques paroles acerbres et gardai le silence. il a quatre vingt un an, me dis-je. Et puis il a crée quelques chefs d'oeuvres...

Contre la barbarie (1925-1948) est un recueil d'articles de Klauss Mann édité chez Phebus. Une lecture indispensable.

Rengaine - Rachid Djaïdani

Histoire d'un mariage mixte entre Dorcy un jeune noir africain chrétien et Sabrina une magrébine qui n'a pas l'assentiment de ses 40 frères. Une histoire vieille comme le monde, Bérénice, Juliette et bien d'autres peuvent en témoigner. C'est Slimane le frère ainé qui joue le rôle de l'emmerdeur en chef parce qu'il se sent investi d'une mission au nom de valeurs dont il ne sait pas dire grand chose quand on l'interroge à ce sujet. Il traque sa sœur, cherche Dorcy rameute ses frères dans le seul but d’empêcher ce mariage. Mais lui même  retrouve dans le secret sa belle , une jeune juive dont il ne peut assumer la relation... Slimane est torturé capable d'aller jusqu’à l'irréparable pour mettre fin à cette histoire, mais il finit par trouver une libération  dans un sublime pardon final lorsqu'il croise enfin Dorcy ...
Pour réaliser son film,  Rachid Djaïdini a du faire preuve de conviction, de la même foi que celle de ce jeune couple pour faire accepter leur mariage. 9 ans pour faire aboutir ce projet, tourné en amateur, clandestinement dans les rues de Paris sans autorisation de la préfectorale comme dut le faire en son temps Jean-Luc Godard sur les Champs Elysées pour filmer Jane Seberg vendant le New-York Herald Tribune ... 
Mais ce n'est pas du cinéaste de la nouvelle vague que nous voulons rapprocher le travail de Rachid Djaïdini, si filiation il doit y avoir c'est évidemment avec John Cassavetes tant nous ressentons la même urgence, la même ferveur dans la manière de filmer les acteurs de capter les visages dans une ambiance jazzy, ces vies qui se déroulent dans la rue, car c'est tout simplement cela que filme Rachid Djaïdini et non sans humour: la vie !

Vu à l'UGC les Halles

lundi 19 novembre 2012

Fear and Desire - Stanley Kubrick

Quatre soldats s'écrasent derrière les lignes ennemis en plein cœur d'une forêt, pris au piège ils doivent trouver une solution pour rejoindre leur camp. La situation est angoissante, ils arrivent à récupérer des armes en surprenant deux soldats qu'ils tuent au couteau.... L'officier dit à un moment qu'il faut rester civilisé le plus longtemps possible, un soldat craque sombrant dans la folie. C'est l'histoire d'une patrouille perdue...
Premier film de Stanley Kubrick tourné sur ses propres fonds à la suite d'un héritage d'une assurance vie, ce film indépendant est le premier long métrage de celui qui n'était alors qu'un photographe. Nous retrouvons d'ailleurs dans ce film tout le savoir faire de photographe de Kubrick, l'image est d'une netteté incroyable . Le film comporte quelques faiblesses, notamment la succession des gros plans lors de l'attaque des deux soldats à l'arme blanche est quelque peu indigeste, le jeu des acteurs est inégal. C'est certainement ces imperfections que ne supportaient pas Stanley Kubrick  qui avait mis un véto définitif à la diffusion de ce premier film qui ressort finalement dans une version restaurée 13 ans après la mort du cinéaste...
Pourtant l’œuvre est particulièrement intéressante, Kubrik aime déjà à se promener à la frontière où l'homme civilisé bascule dans la sauvagerie.
Une premier film qui s'avère passionnant !

Vu au grand action - rue des écoles - Paris

End Of Watch - David Ayers

Nous suivons le quotidien de deux policiers du LAPD Brian Taylor et Mike Zavala affectés sur un des quartiers les plus chauds de Los Angeles où les gangs font régner leurs lois. Confrontés à une violence imprévisible,ils ont noué une véritable relation intime d'une totale confiance, base essentielle pour faire face aux dangers. Ils ont un sacré flair pour remonter les affaires, s'attirant la colère d'un gang latino contrarié dans leur trafic de drogues par les deux acolytes, un contrat est lancé contre eux. Difficile d'y échapper...
Le choix de la mise en scène où une partie des images est filmée par les policiers eux même donne l'impression d'un documentaire amateur ou rien n'est calculé, l'image bouge, saute, elle est parfois dégueulasse mais nous finissons par nous y habituer,  et nous retrouver au cœur de l'action où la fiction sonne particulièrement juste.
Il ne faut surtout pas voir ce film à travers le prisme des normes françaises, l'histoire de la violence américaine est tout autre, nous sommes au pays des cow boys, des armes à feu, il y a définivitement une part de fachisme dans la démocratie américaine... Il convient  de ne pas réduire trop rapidement ces flics à de simples brutes, c'est bien plus complexe que cela. Mike Zavale explique son engagement, c'est un métier respectable bien payé et qui ne nécessitait pas des études universitaires dont il n'aurait certainement pas pu payer les frais de scolarité, c'est grâce à sa situation qu'il a pu épouser sa fiancée et fonder une famille. La violence s'impose à eux, ils sont dans un cercle vicieux, dans une surenchère permanente entre les forces de police et les gangs
Nous nous rappelons que dans la première scène de l'inspecteur Harry de Don siegel il y avait un long plan sur la liste des policiers morts en service, la liste était impressionnante rappelant nos monuments aux morts, ce plan était essentiel pour comprendre l'environnement professionnel du policier et expliquer en partie le comportement solitaire et violent de l'inspecteur. La mort fait partie du quotidien du policier, c'est exactement ce que nous raconte le film de Alvin Ayers, cette mort présente à chaque coin de rue est la source même de la tension permanente de ce film. Evidemment le couple de policiers est ici un peu idyllique nous n'oublions pas les excés du LAPD  et notamment le tabassage en son temps de Rodney King à l'origine d'émeutes urbaines mais assurément il convient de tenir compte dans ces réactions insupportable de la trouille au ventre avec laquelle ces hommes et ses femmes travaillent au quotidien.

Un film diablement efficace !

Vu à l'UGC Danton

dimanche 18 novembre 2012

Pierrot Le Fou - Jean-Luc Godard

Ferdinand quitte  vite une soirée pour retrouver Marianne une jeune fille venue garder ses enfants et qu'il avait eu l'occasion de croiser quelques années auparavant . Marianne fréquente un drôle de milieu, des trafiquants d'armes. Marianne et Ferdinand doivent vite quitter Paris. "Reconnaissant deux des siens, la statue de la liberté leur adressa un salut fraternel".
Ferdinand que Marianne appelle Pierrot car on ne peut dire "mon ami Ferdinand" se suffit de peu, une cabane et  la littérature, mais Marianne s'ennuie "qu'est ce que je peux faire, j'sais pas quoi faire"... Elle recroise ses mauvaises fréquentations, le couple ne peut échapper à son destin tragique mais nous savions que Marianne avait une" toute petite ligne de chance"...
C'est le film de Jean-Luc Godard que nous avons le plus vu, chaque fois avec le même émerveillement, émus de revoir le duo composé d'Anna Karina et de Jean-Paul Belmondo au sommet de leur art, ils sont d'une beauté à couper le souffle, incarnant parfaitement un idéal de liberté; Jean-Luc Godard est assurément celui qui a le mieux ressenti les soubresauts de années 60. Jean-Paul Belmondo dans sa baignoire lisant à sa petite fille un extrait  de l'histoire de l'art de Elie Faure sur Velázquez nous capte dés les premiers plans, nous rions à la soirée suivante où Jean-Luc Godard se lance avec drôlerie dans une attaque contre la société de consommation et ses publicitaires faisant de la femme un objet, nous aimons croiser au cours de cette même soirée, Samuel Fuller qui définit en quelques mots le cinéma. Puis nous nous laissons entrainer dans cette cavale rythmée par les chansons de Serge Rezvani et la musique de Antoine Duhamel. Nous sommes éblouis par les couleurs primaires présentes dans chaque plan, Jean luc Godard filme comme personne la Méditerranée, la composition des images est une pure merveille. Nous nous rappelons les mots de Louis Aragon qui fut un fervent admirateur de ce film, "d'une beauté surhumaine"....
C'est aussi le film le plus drôle de Jean-Luc Godard dont le sens de la comédie est souvent mésestimé, nous aimons ses blagues de potache et ses clins d'oeil aux maitres du burlesque, ses jeux de mots..avec en final une apparition irrésistible du jeune Raymond Devos.
Les peintres sont omniprésents, Velázquez donc, mais aussi Auguste Renoir, Picasso ou Nicolas de Stael, nous nous demandons si la couleur des films de Godard aurait pu exister sans le chef opérateur Raoul Coutard. Le cinéma autant que la littérature rythme la vie de Ferdinand. N'a t-il pas envoyé sa fille voir trois fois Johnny Guitar de Nicholas Ray .... Pour Godard, l'art est au dessus de tout même s'il ne peut rien pour nous !

Mélancolie, poésie, lyrisme, voire pour reprendre le néologisme cité par Claude Jean Philippe en présentation de la séance , "délyrisme" ces mots qualifient le chef d’œuvre de Jean-Luc Godard; en rupture avec toutes les règles de narration cinématographique, il en réinvente le langage.

C'est toujours une fête pour nous de revoir ce film, notons l'extraordinaire copie restaurée qui nous était proposée pour cette séance du Ciné Club de Claude-Jean Philippe au cinéma l'Arlequin !

Syd Barrett - Madcap Laughs

Pour prolonger le plaisir de "Après mai", nous avons décidé de mettre à l'honneur l'album solo de Syd Barrett "Madcap Kaughs". Membre fondateur des Pink Floyd, une consommation excessive de LSD lui a couté sa place dans le groupe. Il réalise deux albums solos avant de se retirer définitivement du coté de Cambridge pour se consacrer à la peinture sa deuxième passion.
Syd Barrett est décédé le 7 juillet 2006 à la suite d'un cancer du pancréas. Nous vous laissons avec le premier morceau de l'album Terrapin, que nous retrouvons au début du film de Olivier Assayas. Une pure merveille !
 
 

samedi 17 novembre 2012

Aprés mai - Olivier Assayas

Notre seul moment de désagréable fut de tomber à la sortie du film nez à nez avec la manifestation des opposants au mariage homosexuel. De mémoire nous n'avions jamais vu une manifestation aussi triste, où nous avons croisé des hordes habillées en noir aux visages tristes et peu épanouis déambulant silencieusement dans les rues parisiennes. Il est rare de croiser un long cortège sans aucune ambiance festive. Ils se veulent les défenseurs de la vie, ils ont le visage de la mort. Ils puent le caveau !
Profitons de l'occasion pour signaler un documentaire dont nous avons vu ce jour la bande annonce, les invisibles qui donnent la parole à des homosexuels nés dans l'entre deux guerres. Nous avons aimé leurs visages, pas de doute ils aiment la vie malgré toutes les embuches qu'ils ont eues à croiser. Ce documentaire doit sortir le 25 novembre.
Revenons à notre film du jour, où Olivier Assayas plonge dans ses années de jeunesse déjà évoquées "l'eau froide", il filme cette génération trop jeune pour avoir participé aux évènements de Mai 68 mais qui se veut à la hauteur de ses ainés. Engagés politiquement dés le lycée dans différents groupes gauchistes, ils participent à des manifestations  où les confrontations avec les CRS sont plus que musclées... Nous sommes ici bien loin des clichés des années 1970, souvent caricaturées à travers des communautés hippies. Les cheveux sont longs, les filles et les garçons couchent ensemble lorsqu'ils s'aiment mais en aucun cas nous ne sommes dans une époque béatement heureuse sous le sigle love and Peace.... Il se dégage une forme de mélancolie, de tristesse de cette jeunesse, exprimée clairement par Gilles, personnage central du film qui parle de sa peur de rater sa jeunesse. Son vrai truc avec son copain Alain, c'est clairement la peinture et le dessin. Ils participent à des actions, taguant notamment les murs du lycée. Une de leurs sorties se termine par la blessure grave d'un vigile, les jeunes gens doivent se faire oublier, ils partent en Italie!
Pour autant, Gilles n'est pas dupe, ses lectures lui permettent d'avoir une analyse critique des événements notamment de la révolution culturelle chinoise. Celles-ci lui sont d'ailleurs reprochées par un leader autonome... Gilles va laisser sa petite amie Christine suivre un groupe d' autonomes  réaliser un film sur les mouvements ouvriers dans le sud de l'Italie, il préfère rentrer à Paris pour passer le concours d'entrée des Beaux Arts.
Nous nous rappelons que Olivier Rolin lors de la sortie de son livre "tigre en papier" témoignage de ses années d'engagement dans le groupuscule maoïste "la gauche prolétarienne" racontait que c'est surement ses années à Normale sup et l'étude des grands textes de la littérature qui avaient fait qu'il ne bascule pas dans  l'action terroriste.... C'est surement pour les mêmes raisons que Gilles et son ami Alain  restent finalement  à l'écart des autonomes au contraire du troisième larron de la bande Jean-Pierre. Lorsque Leslie la copine d'Alain part se faire avorter en Hollande ce dernier lui conseille  de faire un détour par Haarlem où deux toiles de Franz Hals dont il lui donne un commentaire de Paul Claudel sont exposées .
 Gilles exprime clairement qu'il vit  dans son imagination, quand le réel vient frapper il le laisse à la porte... Ils ont compris qu'il s ne changeraient pas le monde, il leur faut y trouver une place....le cinéma s'annonce la voie royale pour Gilles.
C'est un remarquable film sur la jeunesse, c'est filmé au plus prés des acteurs qui sont particulièrement justes, les éléments historiques sont indiscutables, Olivier Assayas connait parfaitement l'histoire de ces mouvements  et il nous perd pas entre les autonomes, trotskistes, maoïstes et autres communistes.Nous retrouvons , beaucoup d’éléments autobiographiques du cinéaste, notamment sur sa relation avec son père ou encore dans les choix de la bande son , Captain Beefheart, Syd Barrett, Nick Drake... pas une fausse note dans ses choix musicaux.

vendredi 16 novembre 2012

Sharqiya - Ami Livne

Film singulier qui vient nous parler de la situation trop méconnue  des bédouins du désert du Néguev confrontés à l'administration israélienne qui refuse de reconnaitre la légalité de leurs habitations faites de bric et de broc .
Deux fréres se partagent ainsi un lopin de désert, Kamel travaille comme agent de sécurité à la gare routière de Be'er Sheva alors que son frère ainé marié à Nadia travaille dans le bâtiment... Nadia reste au domicile des deux frères alors qu'elle rêve d'aller étudier à l'université. La police est venue déposer une injonction aux deux frères de quitter les lieux occupés... Toute réclamation est rejetée sous prétexte qu'ils ne peuvent justifier d'un acte de propriété, l'administration refusant de reconnaitre la particularité des bédouins présents sur ces lieux avant la création de l'Etat d'Israel... Les deux frères s'entêtent mais un matin la police débarque avec un bulldozer rasant les cabanes ... Les deux bédouins se lancent dans la reconstrution une fois les forces de l'ordre reparties.
Ils ne font pas de bruits, ils ne se révoltent pas pas contre l'autorité israélienne, ils souhaitent juste que l'on respecte leur mode de vie. Ce qui apparait clairement c'est une incapacité à Israel de faire totalement confiance à un citoyen non juif, nous le comprenons clairement lorsque Kamel demande à changer de poste parce qu'il est fatigué de faire le planton sur un poste sans véritable enjeu. Un film passionnant qui nous rappelle aussi qu'Israel est le seul pays de la région où l'expression est libre. Ce film d'une grande sobriété dénonce  le comportement de ses autorités et témoigne par son existence de la démocratie israélienne , il a d'ailleurs été récompensé à un festival à Jérusalem... C'est peut être bien parce que cette liberté existe que des voix discordantes se font entendre, que l'on peut espérer que la  raison finisse par l'emporter dans cette région où la tragédie est quotidienne.

Les enfants de la nuit - Caroline Deruas

En début d'après midi, la salle de cinéma de Saint Germain des prés avait laissé un créneau horaire pour le court métrage de Caroline Deruas "Les enfants de la nuit".

Année 44 dans la campagne française, Henriette a la charge de son grand père. Son père est mort en 40 à Dunkerque, sa mère a rejoint le maquis demandant à sa fille de ne pas la suivre pour s'occuper de son grand père. Les deux s'entendent plutôt bien, se régalant à écouter Radio Londres. Cette vie tranquille bascule le jour où Henriette croise Josef un soldat de la Wermacht. La jeune fille succombe aux charmes du soldat, malgré toute la haine qu'elle porte aux nazis.
Les deux amoureux se coupent du monde mais la réalité finit vite par les rattraper...

Pas de mauvais suspens, une voix off nous informe dés le début de l'issue tragique de cet amour impossible... Réalisé en noir et blanc avec une verve toute truffaldienne, le film de Caroline Deruas nous raconte parfaitement cette histoire d'amour où portée par la force des sentiments Henriette se sent totalement libre, faisant peu de cas de son ami d'enfance Marcel quand elle le croise alors qu'elle est sur le vélo de Josef . Quand ce dernier lui demande si elle n'est pas inquiète de sa réaction, elle s'exclame en toute sincérité "j'en ai rien à foutre". Seulement perturbée par une lettre de sa mère qui  informée de la nouvelle liaison de sa fille lui demande d'y mettre fin, mais il lui est  définitivement  impossible de renoncer à Josef....

Josef est abattu par les F.F.I alors que Henriette est tondue, humiliée sur la place publique du village...

On se laisse prendre par ce court métrage qui nous devons en convenir n'est pas d'une originalité folle, mais le récit est bien tenu, les interprètes sont plutôt convaincants notamment Adèle Haenel dans le rôle d'Henriette, sa seule présence donne au film sa singularité.

mercredi 14 novembre 2012

Théâtre en appartement par la compagnie le menteur volontaire

La Compagnie "le menteur volontaire" dirigée par Laurent Brethome, metteur en scène en résidence au Théatre Jean Arp propose deux petites formes qui peuvent être facilement jouées dans des appartements mais aussi dans les différentes maisons de quartier de la ville.

Nous avons ainsi assisté à une représentation de deux monologues de Feydeau (Le Juré et Un monsieur condamné à mort). Ecrites au XIXème siècle , ses œuvres de jeunesse  permirent à Feydeau de se faire connaître, il invente un vrai style faisant entrer l'absurde dans le théâtre.
Les deux textes frappent par leur actualité, ils n'ont rien perdu de leur vigueur, surtout lorsqu'on pense qu'il y a peu, l'ancienne majorité souhaitait des jurys populaires pour les tribunaux correctionnels pour mettre fin au soi-disant laxisme des juges ou si on se rappelle l'erreur judiciaire de l'affaire Outreau. L'acteur, Geoffroy Pouchot-Rouge-Blanc,dispose d'un fauteuil à roulette comme seul décor et utilise pour se donner la réplique un antique magnéto cassette. Il est  nez à nez avec son public, dont il capte immédiatement l'attention, . C'est drôle, enlevé !

Nous avions eu également la chance de voir plus tôt dans la saison le deuxième spectacle de la série "petites formes", une pièce du dramaturge israélien Hanock Levin, "Potroush". Histoire d'une mère inquiète des propos de son fils qui raconte que la terre est plate et  se rend à un rendez vous avec son professeur.  L'enseignante répond à la mère: "Ah bon, parce que vous croyez qu'elle est ronde." S'engage alors un dialogue surréaliste... Nous retrouvons toute la noirceur de l'auteur israélien, c'est irrésistible.

Une façon sympathique de partir à la découverte d'un nouveau public.

dimanche 11 novembre 2012

Armistice du 11 novembre 1918


La lecture du dernier roman "14" de Jean Echenoz nous avait  rappelé la terreur des batailles de la Grande Guerre, Nous sommes passés sur la place centrale de notre douce citée  lorsque les couleurs étaient levés en ce jour de commémoration.

Une envie de prendre le temps d'honorer les victimes de cette tragédie à travers quelques textes:

(...)Songe que nous marchons dès avant l'aube que nous marchons des jours entiers sans savoir où nous allons, que nous attendons dans des cours de ferme des heures et des heures sans savoir pourquoi, songe à toute la patience, à toute la religion qu’il nous faut pour résister à ce chagrin d'avoir perdu ce que l'on aime. Songe que nous serons peut-être bientôt couchés dans des tranchées dans l' eau et le froid et la boue, sous le feu. Il ne faut rien nous dire, il ne faut rien penser qui nous enlève un peu de foi et nous coupe les jambes. C'est de toi que j'attends toute ma force, toute ma vertu, toute mon audace, tout mon mépris de la mort. 

Extrait d’une lettre écrite le 20 août 1914 par Henri-Alban Fournier, dit Alain-Fournier à sa fiancée qu’il devait épouser au retour de la guerre . Le jeune auteur du Grand Meaulnes allait avoir 28 ans . Il sera tué le dans le petit bois de Saint Remy de Calonne. 


Verdun, 15 juillet 1916, 4 heures du soir. 

Je suis encore vivant et en bonne santé, pas même blessé alors que tous mes camarades sont tombés morts, ou blessés aux mains des boches qui nous ont fait souffrir les mille horreurs, liquides enflammés, gaz lacrymogènes, gaz suffocants, asphyxiants,attaques...
Je suis redescendu de première ligne ce matin. Je ne suis qu'un bloc de boue et j'ai dû faire racler mes vêtements avec un couteau car je ne pouvais plus me traîner, la boue collant mes pans de capote après mes jambes... J'ai eu soif... Pas faim... J'ai connu l'horreur de l'attente de la mort sous un tir de barrage inouï... Je tombe de fatigue... Je vais me coucher, au repos dans un village à l'arrière où cela cogne cependant, voilà dix nuits que je passe en première ligne. Demain les autos emmènent le reste de mon régiment pour le réformer à l'arrière, je ne sais encore où. J'ai sommeil, je suis plein de poux, je pue la charogne des macchabées. 
Je vous écrirai dès que je vais pouvoir. Soyez donc tranquilles. J'espère que le gros coup pour nous a été donné.
Bonne santé, et je vous embrasse bien affectueusement. 

Extrait d’une lettre du capitaine , Georges Gallois. Il avait 29 ans en 1914 il a survécu à la guerre 

1 juillet 1915 

On est arrivé à se battre dans les tranchées non avec le fusil et la baïonnette mais avec des outils portatifs : la pelle et la pioche jusqu’au couteau. Je vous prie donc de m’adresser dans le plus court délai un couteau solide, puissant , avec un cran d’arrêt, ainsi qu’une chaîne pour l’attacher 

15 juillet 1915 

Je ne suis plus qu’un squelette où la figure disparaît sous une couche de poussière mêlée à la barbe déjà longue. Je tiens debout comme on dit en langage vulgaire parce que c’est la mode. 

Extraits de lettres d’Émile Sautour, qui avait 22 ans en 1914 ; Le soldat Sautour du 131ème régiment d’infanterie est « mort pour la France », le 6 octobre 1916, à Rancourt alors que son régiment est engagé dans la bataille de la Somme .

Ci dessous, des extraits et leur traduction du roman de Erich Maria Remarque, un écrivain allemand né en 1898 et décédé en 1970.

Son livre À l'Ouest, rien de nouveau » (Im Westen nichts Neues), roman pacifiste sur la Première Guerre mondiale, largement autobiographique connut, dès sa parution en 1929, un succès mondial retentissant et reste l'un des ouvrages les plus remarquables sur le premier conflit mondial. Ce livre fut brûlé lors des autodafés nazis dès 1933. Remarque s'exila en Suisse, puis aux États-Unis et y obtint sa naturalisation en 1947.
 
Wir farhen ab aIs mürrische oder gut gelaunte Soldaten, - wir kommen in die Zone, wo die Front beginnt, und sind Menschen tiere geworden.  

Quand nous partons, nous ne sommes que de vulgaires soldats, maussades ou de bonne humeur et, quand nous arrivons dans la zone où commence le front, nous sommes devenus des hommes-bêtes.

Für mich ist die Front ein unheimlicher Strudel. Wenn man noch weit entfernt von seinem Zentrum im ruhigen Wasser ist, fühlt man schon die Saugkraft, die einen an sich zieht, langsam, unentrinnbar, ohne viel Widerstand. Aus der Erde, aus der Luft aber strömen uns Abwehrkräfte zu, - am meisten von der Erde. Für niemand ist die Erde so viel wie für den Soldaten. Wenn er sich an sie presst, lange, heftig, wenn er sich tief mit dem Gesicht und den Gliedern in sie hineinwühlt in der Todesangst des Feuers, dann ist sie sein einziger Freund, sein Bruder, seine Mutter, er stöhnt seine Furcht und seine Schreie in ihr Schweigen und ihre Geborgenheit, sie nimmt sie auf und entlässt ihn wieder zu neuen zehn Sekunden Lauf und Leben, fasst ihn wieder, und manchmal für immer...

Pour moi, le front est un tourbillon sinistre. Lors qu'on est encore loin du centre, dans une eau calme, on sent déjà la force aspirante qui vous attire,lentement, inévitablement, sans qu'on puisse opposer beaucoup de résistance. Mais de la terre et de l'air nous viennent des forces défensives, surtout de la terre. Pour personne, la terre n'a autant d'importance que pour le soldat. Lors qu'il se presse contre elle longuement, avec violence, lorsqu'il enfonce profondément en elle son visage et ses membres, dans les affres mortelles du feu, elle est alors son unique amie, son frère, sa mère. Sa peur et ses cris gémissent dans son silence dans son asile:elle les accueille et de nouveau elle le laisse partir pour dix autres secondes de course et de vie, puis elle le ressaisit et parfois pour toujours...


Einige Rekruten haben noch Seitengewehre ähnlicher Art; wir schaffen sie weg und besorgen ihnen andere. Das Seitengewehr hat allerdings an Bedeutung verloren. Zum Stürmen ist es jetzt manchmal Mode, nur mit Handgranaten und Spaten vorzugehen. Der geschärfte Spaten ist eine leichtere und vielseitigere Waffe, man kann ihn nicht nur unter das Kinn stoßen, sondern vor allem damit schlagen, das hat größere Wucht; beson ders wenn man schräg zwischen Schulter und Hals trifft, spaltet man leicht beim zur Brust durch.

Quelques recrues ont encore de ces baïonnettes; nous les faisons disparaître et leur en procurons d'autres. 
A vrai dire, la baïonnette a perdu de son importance. Il est maintenant de mode chez certains d'aller à l'assaut simplement avec des grenades et une pelle. La pelle bien aiguisée est une arme plus commode et beau coup plus utile; non seulement on peut la planter sous le menton de l'adversaire, mais, surtout, on peut asséner avec elle des coups très violents; spécialement si l'on frappe obliquement entre les épaules et le cou, on peut facilement trancher jusqu'à la poitrine.

Benjamin Biolay - Vengeance

A la première écoute, ca fait pschitttttt... mais ne soyons pas trop définitifs, le premier souci de ce nouvel album de Benjamin Biolay est de succéder à  "la superbe", un album parfait... Vengeance est moins accrocheur que le précédent, il va nous falloir un peu de temps pour nous l'approprier, mais nous aimons déja "aime mon amour" , "Marléne déconne" nous amuse et "Trésor Trésor" nous rappelle qu'en son temps Bashung chantait "Bijou, Bijou" !

Vengeance de Benjamin Biolay est notre album de la semaine !


samedi 10 novembre 2012

Moï Ver - Ci Contre - fondation Henri Cartier Bresson

Etonnante histoire que nous raconte la fondation Henri Cartier Bresson qui pour la première fois nous présente les 110 photos de l'ouvrage Ci Contre, réalisé en 1931 . Son principe  est de proposer un montage et des superpositions de photos qui donnent un ensemble très cinématographique, où le photographe donne une vision personnelle de Paris, fourmillante et dans un perpétuel mouvement. Les évènements des années 30 firent que le projet n'alla pas plus loin qu'une simple maquette. L'ouvrage ne fut alors jamais publié; mais en 1968, des collectionneurs allemands, Ann et Jürgen Wilde mettent la main sur cette maquette oubliée, le plus compliqué fut pour eux de mettre la main sur son auteur...

Ce dernier, Moi Wer né Moses Vorobeichic prés de Vilnius  avait commencé par étudier la peinture, il partit pour Dessau suivre les enseignements du Bauhaus en 1927/1928 notamment les cours de Josef Albers mais aussi ceux de Paul Klee et de Willy Kadinsky. Impressionné par le cinéma de Eisenstein et les montages de Heartfield, il se découvrit un intérêt pour la photographie.Il partit à Paris en 1928 dans une ville en pleine ébullition pour suivre notamment  les cours de l'école de photographie de la rue de Vaugirard ainsi que ceux de Fernand léger. 

De retour à Vilnuis il réalisa une série de clichés sur le ghetto témoignant de l'état de pauvreté de la communauté juive, avant de revenir dans la capitale. En 1934, Moi Wer partit s'installer en Palestine, où il demeura jusqu'à son décès en 1995. C'est donc en Israël que nos deux collectionneurs  retrouvent l'auteur de la maquette sous le nom de Moshe Raviv dans une communauté d'artistes, installée dans le nord du pays menant une activité de peintre...

A noter à coté des planches du livre Ci-Contre, une série de photos réalisée lors d'un voyage en Pologne en 1937 dans des fermes collectives organisées par la communauté juive pour des familles se préparant au départ vers la Palestine. Un témoignage rare, d'un monde aujourd'hui disparu.

vendredi 9 novembre 2012

La petite - Anne Nozière

Ce n'est pas que nous sommes restés à quai. Nous y sommes bien montés dans le train, mais c'est un peu comme les fois où confortablement assis nous n'avons rien pour nous occuper, nous plongeons notre regard dans les paysages qui défilent à toute vitesse, invariablement nous somnolons. C'est exactement ce que nous avons connu avec le nouveau spectacle d'Anne Noziére.
C'est une réelle déception tant le spectacle les fidèles qu'elle nous avait proposé lors de la précédente saison, nous avait transporté... Toujours sur le même thème,"La petite" est une mise en abyme, l'action se déroule dans un théâtre où Jennyfer "la petite" est née prématurément, mais sa mère n'a pas survécu, elle est morte en couche. Enceinte à son tour, la "petite" continue à jouer,  au cinquième mois une échographie montre que son enfant ne grandit plus mais il reste en excellente santé, l’Hôpital s’inquiète mais hors de question pour la petite de quitter le théâtre.
Elle devient un objet de fascination, un phénomène pour le monde médical, on ne vient plus au théâtre pour le spectacle, mais juste pour la voir... Le fantôme de sa mère lui rend visite, les pères sont absents mais finalement tout finit par tourner en rond tant l'auteur ne sait plus quoi faire de son idée de départ...
Ambiance mortifère, sombre ce fut d'un ennui mortel. Lugubre soirée !

jeudi 8 novembre 2012

Biutiful - Alejandro Gonzales Inarritu

Uxbal joué par Javier Bardem va mourir du cancer ou de ce que l'on appelle pudiquement une longue maladie et cela s'avère effectivement très long. Bien loin de la vision carte postale ensoleillée du Vicky Cristina Barcelona de Woody Allen, nous plongeons dans le bas fonds de Barcelone où le cinéaste mexicain va se complaire durant plus de deux heures.
Uxbal en plus d'avoir des activités de "sorcier" où il indique contre rétribution à la famille du défunt les dernières pensées du mort, joue les intermédiaires avec des travailleurs clandestins, organisant la vente à la sauvette de produits de contrefaçons par des travailleurs africains, et aidant les chinois à organiser des ateliers de travail. On peut y voir un portrait de l'Espagne en crise où chacun se débrouille pour se loger et nourrir sa petite famille. Pour Uxbal, la petite famille est gratinée spécialement sa femme quelque peu dingo dont on peut se douter qu'elle sera totalement incapable de prendre en charge leurs deux enfants.
Alors le cancer à la prostate  et ses métastases ne sont pas une bonne nouvelle ... Tout va mal pour ce pauvre homme, victime de son bon coeur, les chinois s’asphyxient au cours d'une nuit victime du chauffage pas très aux normes qu'il avait installé pour qu'ils puissent dormir au chaud...
Tout est laid dans ce long film où rien ne nous est épargné même pas les séances où notre héros pisse du sang dans des toilettes pas très nettes. Un très long film , mais comme dans les festivals on aime les acteurs qui jouent les longues agonies, le prix de la meilleure interprétation à Cannes fut donné à Javier Bardem.
A oublier !

Argo - Ben Affleck

Le 4 novembre 1979, au prétexte que les Etats Unis ont donné l'asile politique au Shah d'Iran qui vient d'être renversé, les militants révolutionnaires prennent d'assaut l'ambassade américaine, le personnel diplomatique est pris en otage mais 6 membres ont pu profiter du désordre pour s'échapper et trouver refuge à l'ambassade canadienne. le problème se pose alors de l'exfiltration des six américains, avant que les autorités iraniennes ne découvrent leur présence.
Les services américains échafaudent divers plans, ils ont même l'idée de faire traverser le pays en vélo aux diplomates. Tony Mendez, le grand spécialiste de l'exfiltration, propose de partir sur place pour préparer un faux tournage intégrant sur place dans son équipe les six rescapés. Hollywood participe dans le plus grand secret, en faisant partir l'idée de production d'un film canadien sur le moyen orient, avec une soirée de présentation où a lieu une lecture de scénario débouchant sur une  publicité médiatique. De quoi justifier un voyage de repérage dans la capitale iranienne.
Tony Mendez part seul pour l'Iran, un seul but ramener les six diplomates. La mission s'annonce particulièrement dangereuse comme un numéro de funambule sans filet.
Le film commence sur un bref mais efficace résumé historique, il est le bienvenu rappelant la responsabilité première des  Etats-Unis et de l'Angleterre dans la situation iranienne et de son  chaos . Cette histoire de l'Iran contemporain était aussi fort bien racontée dans les premiers épisodes de Persépolis de Marjane Satrapi. Une des grandes qualités de ce film est de ne jamais être manichéen, montrant notamment à travers des images de manifestations, les mêmes comportements primaires des deux cotés.
Argo est un vrai thriller, un film d'espionnage d'un grand réalisme qui peut être considéré comme l'anti James Bond, pas de gadget, rien de glamour, de la matière grise pour seule arme. Nous sommes tenus par un vrai suspens, nous avons beau connaître l'issue heureuse, nous ne cessons de nous inquiéter pour les divers protagonistes. Les mailles du filet ne sont pas bien larges, cela se joue à peu de choses, à une administration pas toujours très bien organisée, à la magie du cinéma capable d'égarer de sa mission un gardien de la révolution. Pourtant ils se donnent du mal, allant jusqu'à utiliser les enfants pour reconstituer le contenu des broyeuses à papier de l'ambassade américaine pour reconstituer le trombinoscope du personnel pour se rendre compte que parmi les otages, il manque six prisonniers, le début d'un haletant contre la montre. Une vraie réussite
Un super coup des services secrets mené par un seul homme, une opération qui par son culot peu nous rappeler les hauts faits d'armes des services du Mossad.

mercredi 7 novembre 2012

Augustine - Alice Winocour

Le film s'ouvre sur un repas dans une famille bourgeoise.Augustine la servante fait le tour des convives pour servir le vin, sa main tremble, mais personne ne prête attention à son malaise. Elle s'écroule prise  de tremblements , sidérant l'assistance.Suite à cette crise son œil droit reste fermé aussi elle se rend en consultation à l’Hôpital de la Pitié Salpêtrière où elle est  finalement internée dans le service du professeur Charcot.
Le premier soir, elle prie Dieu,  sa voisine lui conseille de s'adresser plutôt à Charcot. Les jours suivants, Augustine est saisie d'une nouvelle crise au passage du professeur comme pour susciter son attention. Charcot finit par se passionner pour la jeune fille et son cas d'hystérie qu'il qualifie devant ces collègues d' ovarienne.
Pour faire vivre son service et son travail de recherche, Charcot doit convaincre de leur bien fondé. Augustine devient son cobaye pour ses leçons où avec l'aide de son assistant, il réalise des séances d'hypnose pour provoquer des crises chez la jeune fille. Son but ultime étant de la présenter aux membres de l'académie de médecine.
Mais le plus passionnant est la relation qui s'installe entre le professeur et sa patiente. Nous sommes alors au début de la psychiatrie moderne, Charcot doit convaincre ses pairs, pour fonder ce qui sera le premier service de neurologie au monde. A la tête de l'école de Salpétrière il attire du monde notamment le docteur Sigmund Freud qui vient suivre une formation...
Le film se centralise sur la relation entre le Medecin et sa patiente. Patiente qui n'a jamais connue la liberté, recluse dès 14 ans au service de ses patrons, puis internée à l'hôpital. Mais prisonnière de son mal, de ses crises, elle vit dans une ignorance des choses de la vie, ne comprenant pas le sens du mot "menstruation". Pour autant elle est loin d'être une idiote, elle révèle une véritable volonté de guérir. Charcot observe, cherche, utilise des instruments barbares dont notamment un compresseur d'ovaires censé calmer les crises aigües, il est pourtant convaincu de l'origine neurologique de son mal. 
Au début très peu d'échange entre eux, elle s'en émeut parfois reprochant au Médecin l'utilisation de mots savants dont elle ne comprend rien puis une fascination s'installe, l'objet d'étude devient objet du désir... Lorsqu'il en prend conscience, il s'en énerve renvoyant sèchement la patiente dans sa chambre. Dans une interview Alice Winocour cite Lacan pour expliquer la relation qui s'installe : "l’hystérique est une esclave qui cherche un maître sur qui régner". Son épouse Constance  note d'ailleurs un changement de comportement chez son époux, plus "absent , plus colérique à table lorsqu'un des convives parle trivialement de sa patiente.

Ce film repose sur un duo d'acteur, si il n'y a pas lieu de s'étonner de la performance de Vincent Lindon qui de film en film ne cesse de nous bluffer par la palette de son jeu, la surprise vient de la Chanteuse Soko totalement extraordinaire dans le rôle d'Augustine qui par moment pouvait nous faire penser à Zouc. Les deux sont filmés au plus prés avec un cadrage toujours juste, les gestes sont précis et nous nous doutons pas qu'ils sont le fruit d'un travail préalable, d'une recherche approfondie de la psychiatrie de la deuxième partie du XIX.
Un premier long métrage totalement maitrisé, un film éblouissant bien plus qu'une simple reconstitution.

Vu à l'Arlequin !

mardi 6 novembre 2012

Une famille respectable - Massoud Bakhshi

Arash est revenu en Iran son pays natal pour donner une série de cours à l'Université de Chiraz. cela faisait plus de vingt ans qu'il avait quitté son pays, surement aidé par sa mère qui n'avait pu supporter la mort de son frère ainé, jeune adolescent sacrifié comme martyr lors de la guerre contre l'Irak.
Alors qu'il doit repartir, sa situation se complique notamment pour récupérer son passeport où on lui demande  une dispense de service militaire, Kafka n'est pas loin. Son père avec qui il n'avait plus de contact décède, se pose alors le problème de la succession. Arash découvre à cette occasion les turpitudes familiales dans un pays dont il ne possède plus les codes. Compliqué !
Toujours un étonnement que de plonger dans l'Iran contemporain, une rencontre permanente entre lumière et obscurantisme. Chaque fois nous ressortons plein d'optimisme pour ce pays tant sa jeunesse nous semble curieuse et ouverte sur le monde. Mené comme un thriller, servi par la sobriété des comédiens, ce film habilement mené nous rappelle l'état de corruption qui ronge le régime dirigé par la face obscure du pays. A travers une chronique familiale, Massoud Bakhshi offre un état des lieux de l'Iran
Passionnant !

Vu à l'Arlequin.

lundi 5 novembre 2012

Tell Me Lies - Peter Brook

Nous avions vu à plusieurs reprises la bande annonce de ce film de Peter Brook resté inédit en France. Sa projection en Mai 68 au festival de Cannes fut finalement empêchée par la clôture prématurée du festival . La bande annonce nous laissait présager un objet cinématographique iconoclaste, réflexion sur la guerre du Vietnam adapté d'une pièce de Théâtre US du dramaturge anglais .
Nous ne sommes pas déçus par ce que nous avons vu, totalement conforme à ce que nous imaginions. Le film est totalement ancré dans son époque ouverte à tous les expérimentations, il a été tourné en urgence à Londres durant l'année 1967. Comédie musicale, documentaire, fiction ... où autour de trois comédiens qui réagissent à la  photo d'un enfant vietnamien mutilé, réalité contradictoire à la vérité officielle, s'organise  une réflexion sur le conflit.
Ils participent à des manifestations, interpellent des ministres dans une séquence hallucinante de cynisme politique, le tout entrecoupé par des chansons ouvertement antiaméricaines et des petite saynétes jouées par des comédiens. Ils cherchent à comprendre les raisons de ce conflit, et si ils compatissent à la douleur des victimes vietnamiennes, ils ont également conscience que le G.I est un pauvre soldat venu de l'Amérique profonde balancé dans un territoire inconnu dont il ne peut rien comprendre.
Cela crée une mosaïque inégale dont le propos n'est pas bêtement dogmatique, une simple condamnation de la politique américaine. Au delà du simple conflit vietnamien, il interroge sur comment nous sont racontés les évènements du monde, la vérité s'avère une affaire complexe. Raconter des mensonges semblent parfois plus simples.
Alors même si c'est parfois un peu bavard, une logorrhée propre à l'époque, le film offre une vraie réflexion qui garde toute sa pertinence au vu des conflits actuels.

Vu au Reflet Medicis

dimanche 4 novembre 2012

Dans la maison - François Ozon

Germain, un professeur de français est troublé par la copie de Claude, un élève  de seconde qui lui raconte comment il s'est introduit dans la maison d'un camarade pour satisfaire sa curiosité, copie qui se conclue par un "à suivre" comme si elle était le premier épisode d'un feuilleton... l'enseignant pressent un talent d'écrivain. Une relation trouble  s'engage entre l'élève et le professeur. Claude se trouve ainsi encouragé à s'infiltrer chez la famille du camarade pour nourrir son feuilleton dont il transmet régulièrement les épisodes à son professeur....  Ce dernier partage sa lecture avec son épouse qui gère une galerie d'art, il intervient même pour  faciliter le voyeurisme à son élève, allant jusqu'à piquer un contrôle de math dans la casier du collègue.

Claude s’immisce  dans une famille qui incarne à ses yeux la normalité, alors que lui grandit seul au coté de son père handicapé, sa mère étant  partie lorsqu'il avait huit ans. Une situation qui nous rappelle Patrick, un enfant plus jeune, de L'argent de poche de François Truffaut, élevé lui aussi  par son père handicapé qui allait  trouver du réconfort chez la famille d'un camarade,. L'un comme l'autre finissent par tomber amoureux de la mère... mais chez Truffaut il n'y avait aucune manipulation!

Fabrice Luchini, nous épate dans ce film. François Ozon l'utilise avec tout son passé d'acteur de théâtre de lecteur impénitent. La Fontaine, Gustave Flaubert, mais aussi Céline dont Le voyage au bout de la nuit lui tombe sur la tête, mais surtout Philippe Murray, tous ces auteurs  nourrissent son personnage. Il forme un couple cocasse avec Kristin Scott Thomas qui n'est pas sans rappeler ceux des comédies américaines, les passages par la galerie où l'épouse doit supporter le discours réactionnaire de son époux sont des moments de comédies plutôt réussies, des bouées d’oxygène.  Le cinéaste semble se régaler à faire entrer un corps étranger dans une famille heureuse , rapidement les lézardes apparaissent, les murs se craquellent... un scénario qui n'est pas sans rappeler le théorème de Pasolini, cité d'ailleurs par le professeur.

Thriller, comédie,satire, difficile de classer ce film qui ne rentre dans aucune case, un Ozon tout simplement et cette cuvée est plutot réussie !

Frankenweenie - Tim Burton

Un jeune enfant projette à ses parents dans le salon de la maison familiale un petit film qu'il a conçu artisanalement dans le grenier. Si le film ne peut aller jusqu'à sa fin , il finit par se casser  sous l'effet de la chaleur, il est le témoignage d'une imagination féconde de l'enfant et d'un gout prononcé pour les monstres.
C'est la première scène du dernier film de Tim Burton Frakenweenie, elle nous a rappelé immédiatement le film d' Agnés Varda "Jacquot de Nantes" où  Jacques Demy enfant projetait  les petits films qu'il avait bricolés à ses parents. 
Histoire d'un petit gamin Victor Frankenstein qui a pour seul compagnon son chien Sparky. Brillant élève passionné par les cours de science, il évite ses camarades de classe  préférant vivre reclus dans son grenier où il fabrique des films et s'invente un monde imaginaire. Pour faire plaisir à son père, il participe à une partie de base-ball,elle se termine en drame. Sparky le chien n'a pas résisté à la vue d'une balle traversant le stade, il est parti courir derrière elle, il se fait accidentellement écraser par une voiture. Victor n'arrive pas à faire le deuil  de son chien, il va user de ses connaissances scientifiques pour reconstruire le chien et lui redonner vie... La découverte est vite connue de ses camarades de classe, qui vont se lancer dans des expériences similaires pas toujours très maitrisées....
Tim Burton recycle un court métrage de ses débuts, situé dans un quartier résidentiel, déjà vu dans Edward aux mains d'argent, il replonge dans son monde de Freaks et des grandes figures du film fantastique. Une montée d'escalier nous rappelle Nosferatu de Murnau, une tortue se transforme en Gozilla, le professeur des sciences est le sosie de Bela Lugosi.... Tim Burton nous enchante par ce retour aux sources, certes il ne nous surprend plus mais nous retrouvons avec joie sa poésie d'Edward aux mains d'argent...

Vu au MK2 Hautfeuille

Lescop (2012)

Dés le premier titre, une sensation agréable de plonger dans le passé, de renouer avec le meilleur des années 80, musique new-wave qui prend ses racines chez Taxis girl et Etienne Daho, des sonorités venues de Manchester berceau de la musique de ces années là.. Des textes ciselés sombres et mélancoliques, des compositions hypnotiques. Nous sommes sous le charme de la musique de Lescop. Un coup de cœur de cet automne !

Lescop est notre album de la semaine !

samedi 3 novembre 2012

Tout Sur Jamel

De Jamel Debbouze, nous ne savons pas grand chose.Nous l'avions uniquement vu dans le Astérix de Alain Chabat... et quelques fois à la télévision, assez pour savoir qu'il était doté d'une gouaille certaine et d'un certain sens de la répartie. Ces rares rencontres nous donnaient une image sympathique, voire généreuse du personnage notamment dans sa démarche d'ouvrir un théâtre "Le comédy Club" pour offrir un espace à de jeunes artistes. De ses spectacles de scène nous ne savions rien...
Ce fut donc une totale découverte ce soir de le voir sur la scène du Théâtre Jean Arp pour son dernier spectacle "Tout sur Jamel".
Spectacle parfait pour nous puisque l'acteur devenu une vedette du Show Business, revient sur son parcours de son enfance à Trappes jusqu'à la naissance de son premier enfant Léon. Un parcours qu'il regarde avec un regard émerveillé car rien ne pouvait laisser croire au jeune enfant issu d'une famille modeste d'immigrés de Trappes qu'il puisse un jour se retrouver en haut de l'Affiche. Alors il se souvient les matchs de foot dans la cité, les torgnoles du père, la honte d'aller faire les courses avec sa mère, les cours de math où il ne comprenait rien, et de ce professeur de français qui va lui faire découvrir le plaisir de jouer qui va devenir une vraie passion pour le gamin de la cité...
Il nous parle avec affection de sa famille, de sa femme, de ce passé dont il n'a rien oublié et dont il ne renie rien, Jamel a aimé ses jeunes années. Il a une tchache incroyable, une pêche d'enfer pour tenir la scène et le public parfois déchainé. Nous avons aimé son goût pour la vie, et son amour du pays qu'il déclare dans un dernier cri: Vive la France !

Looper - Rian Johnson

2044. Un champ de cannes à sucre dans un coin perdu du Kansas, en bordure, un homme attend. A 11h30, il flingue un type qui lui apparait subitement le visage caché. Il se débarrasse du corps dans un incinérateur, une voix off nous explique la situation du tueur. 2074, une machine à remonter le temps a été mise au point, vu le danger elle a été immédiatement interdite mais la maffia a mis la main dessus, elle peut ainsi envoyer trente ans en arrière ses cibles qui sont alors immédiatement exécutées par des" loopers"...  Ces derniers exécutent leur mission jusqu'au jour  où c'est leur propre vie qu'ils suppriment, ils touches une dernière prime, le compte à rebours est enclenché il leur reste alors trente ans à vivre.
Le système fonctionne de manière implacable jusqu'au jour où Joe le looper n'arrive pas à tuer sa propre cible... Le vieux Joe est revenu pour régler des comptes, notamment pour mettre fin au destin de celui qui deviendra le  "maitre des pluies" qui fait régner le chaos en 2074 ...
Ce film de science fiction est absolument bleuffant, un scènario implacable, si on reste circonspect à la lecture de l'histoire tout devient limpide dans la salle obscure. Joseph Gordon Levitt le visage retravaillé pour avoir une vague ressemblance avec Bruce Willis joue parfaitement le Looper, déterminé, froid, il exécute .... pas vraiment déstabilisé lorsqu'il se retrouve face à lui-même, il est prêt à réaliser sa mission mais le vieux Joe lui donne beaucoup de souci.
Le cinéaste nous décrit un futur sombre,apocalyptique rendu supportable par des traits d'humour,où les populations usant sans vergogne des armes à feu se protègent des miséreux devenus agressifs . Echappant à tout manichéisme, nous ne croisons ici aucun héros positif, Rian Johnson réinvente le cinéma de science Fiction. Il nous pose beaucoup de questions.

Vu au MK2 Odéon

vendredi 2 novembre 2012

Le carrosse d'or - Jean Renoir

Au XVIII° siècle, une troupe de la commedia dell'arte est invitée à jouer en Amérique latine dans une colonie espagnole confrontée à la guerre contre les indiens. Par le même bateau, débarque un carrosse d'or, commande du vice roi qui dirige la colonie.
Camilla une actrice de la troupe, qui incarne Colombine, par son charme instille le désordre dans ce petit territoire. Felipe rencontré sur le bateau veut l'épouser et lui faire quitter les planches. Dés le premier spectacle, elle attire  le regard d'un toréador  véritable vedette locale et  le vice roi ne tarde pas non plus à succomber aux charmes de la comédienne. Il va même jusqu'à lui offrir son carrosse d'or ce qui n'est pas sans provoquer une crise diplomatique avec les nobles  bien décidés alors à le destituer de son siège de vice roi...
Si à travers ce film Renoir signe un magnifique hommage au théâtre de la commedia dell'arte, il  le situe également dans la grande tradition de la comédie française, de Marivaux à Feydeau, il est facile de relever ses maitres dans ces jeux de l'amour. Ici, tout se mélange, la vie, le théâtre... un thème cher à Renoir.Ce film qui signe le retour du cinéaste en Europe après son exil aux Etats Unis se place dans la droite ligne de "La Règle du jeu" .Anna Magnani illumine le film, donnant à Camilla éperdue dans ses amours toute sa dimension:
"Tu n’es pas faite pour ce qu’on appelle la vie, ta place est parmi nous, les acteurs, les acrobates, les mimes, les clowns, les saltimbanques. Ton bonheur, tu le trouveras seulement sur une scène, chaque soir, pendant deux petites heures en faisant ton métier d’actrice, c’est-à-dire en t’oubliant toi-même. À travers les personnages que tu incarneras, tu découvriras, peut-être, la vraie Camilla. »

Un film réjouissant aux couleurs magnifiques que nous avons revu avec grand plaisir !

Ce film, auquel François Truffaut vouait un vrai culte donnant en hommage son nom à sa société de production: les films du carrosse, fut tourné en trois versions: Italienne, française, américaine. C'est cette dernière qui avait la préférence du cinéaste, nous convenons que l'anglais de Ana Magnani est absolument savoureux.
C'est cette version favorite du cinéaste qui a fait l'objet d'une restauration que nous avons vu ce jour.

Vu au champo !

Amour - Michael Haneke

Nous découvrons dans une salle de concert parisienne, un couple de bourgeois octogénaires heureux, Anne et Georges unis par leur passion de la musique. Nous les retrouvons le lendemain matin, prenant en commun leur petit déjeuner, Georges parle mais soudain  Anne ne répond plus, le regard dans le vague, elle reste absente... la crise va durer cinq minutes, elle est le premier signe d'un malaise cérébral. Elle est opérée de la carotide mais elle est fait partie des 5% d'échec, elle revient hémiplégique à son domicile, puis une nouvelle crise arrive, la vie n'est plus que déchéance pour Anne... Jusqu'au bout Georges reste à ses cotés, la soigne, la rassure...
Exclusivement tourné dans l'appartement du couple, nous remercions Michael Haneke d'avoir ouvert cette porte et de filmer avec une humanité infinie ce vieux couple confronté à la fin de vie, même s'il ne nous cache rien de cette déchéance ... Ce film intimiste se révèle foncièrement politique, devant la détresse d'Anne il est impossible de ne pas se poser des questions sur l'euthanasie, un sujet toujours brulant chez nos parlementaires ...Les derniers mois d'Anne, personne ne peut désirer les vivre, cette déchéance est insupportable, elle n'est qu'humiliation. Elle-même veut en finir, son mari la retrouve par terre devant la fenêtre ouverte, nous comprenons son envie de défenestration. Mais sa déchéance physique ne lui permet plus la liberté de mettre fin à ses jours, elle se cloitre, elle ne peut plus accepter le regard de sa fille ou de ses proches porté sur son corps. Georges et Anne sont seuls, livrés à eux-mêmes.

Jean Louis Trintignant et Emmanuelle Riva sont tous simplement remarquables, ils offrent une composition toujours juste, nous sommes infiniment touchés par leur gestes de tendresse et leurs voix chaleureuses.  Ils se referment sur eux même, se coupent du monde comme un jeune couple pour le quitter définitivement... Nous nous rappellerons longtemps le regard plein de tristesse d'Emmanuel Riva comme nous nous rappelons celui  de Harriet Andersson dans un été avec Monika d'Ingmar Bergman. Un film admirable et bouleversant, la vieillesse comme nous ne l'avions jamais vue au cinéma.

Dés les premiers plans, les premiers gestes de tendresse, il nous revient en mémoire le début du dernier livre de Andre Gorz "lettre à D.", journaliste, philosophe qui s'est suicidé avec son épouse atteinte d'un mal incurable:

"Tu vas avoir quatre vingt deux ans. Tu as rapetissé de six centimètres, tu ne pèses que quarante cinq kilos et tu es toujours belle, gracieuse et désirable. Cela fait cinquante-huit ans que nous vivons ensemble et je t'aime plus que jamais. Je porte de nouveaux au creux de ma poitrine un vide dévorant que seul comble la chaleur de ton corps contre le mien."

Vu à l'UGC Odéon.

jeudi 1 novembre 2012

Traviata et nous - Philippe Beziat

Au départ nous avions programmé "Une famille respectable" de l'iranien Massoud Backshi mais la séance était compléte. Nous nous sommes donc rabattus sur le film documentaire de Philippe Beziat consacré aux répétitions de la Traviata de Verdi inspirée de la dame aux Camélias de Alexandre Dumas fils, pour des représentations au festival d'Aix en Provence en juillet 2011. La Soprano Nathalie Dessay est la tête d'affiche, elle incarne Violetta, la mise en scène est de Jean-François Sivadier, Louis Langrée dirige l'orchestre du London  Symphony Orchestra...
Nous sommes plongés au cœur des répétitions, nous voyons ainsi jour après jour naitre le personnage de Violetta sous la direction du metteur en scène, il reprend les gestes, la posture de la chanteuse qui écoute patiemment, cherche à comprendre la volonté de son metteur en scène. les voix ne sont pas forcées, il faut s'économiser pour le spectacle. Jean-François Sivadier veut retrouver la simplicité de la pièce, épurer au maximum, éviter trous les poncifs sur le personnage, Nathalie Dessay est sur la même ligne que lui...
Le plus surprenant, c'est le coté mer d'huile de ces répétions, jamais une colère, parfois une incompréhension entre l'actrice et le metteur en scène mais tout se règle par un dialogue feutré , tout se passe de manière idyllique sans un mot plus haut que l'autre, nous sentons juste une nervosité monter chez le metteur en scène lorsque la date de la première représentation approche... C'est une sorte de monde idéal que nous offre la caméra de Philippe Beziat, nous n'y croyons qu'à moitié !
Il est toujours fascinant de voir des acteurs au travail, des techniciens préparer la scène, des musiciens à l'écoute de leur chef.. nous avons eu plaisir à suivre ce documentaire même si il ne révolutionne le genre.

Vu au cinéma l'Arlequin

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