samedi 30 novembre 2013

The Immigrant - James Gray

1921, Ewa et Magda, deux soeurs venues de Pologne,  arrivent  après un long voyage à bord d'un bateau surchargé à New-York  où il leur faut passer la dernière épreuve du service d'immigration d'Ellis Island. Magda souffrant de la tuberculose est vite repérée, elle est mise en quarantaine. Ewa accusée d'avoir de mauvaises moeurs et d'avoir donné une adresse erronée d'une oncle et d'une tante qui semblent inconnus est mise de coté avec ceux qui seront renvoyés... Bruno Weiss dans un rôle de bon samaritain intervient, payant les policiers pour permettre à la jeune fille de rejoindre New-York. mais très vite, elle comprend que le bonhomme est un souteneur organisant des spectacles grivois où les spectateurs peuvent choisir une fille. Une situation qui répugne Ewa, mais la jeune fille n'a qu'une idée en tête, retrouver et libérer sa jeune soeur ... mais pour cela il faut de l'argent.
Sublime mélodrame de James Gray, qui nous transporte dans les quartiers populaires du  New-York des années 20 où la débrouille est le seul moyen  pour assurer sa survie. Ainsi Bruno fils d'immigrés juifs organise sa subsistance en organisant des spectacles qui ne sont pas sans rappeler ceux des stripteaseuses du "New burlesque" vues dans le film de Mathieu Amalric, Tournée. Il vient régulièrement réperer à l'arrivée d'Ellis Island, les jeunes femmes qui débarquent seules, soudoyant les hommes de loi, il met le grappin sur les jeunes filles esseulées ... Ewa se retrouve prise au piège, tourmentée par la déchéance que lui impose Bruno pourtant amoureux de la jeune fille dont la pureté finit par lui renvoyer l'horreur de ses actes. 
L'aspect romanesque qui nous entraine est soutenue par la justesse du jeu des acteurs, tous magnifiques. Le visage de Marion Cotillard exprime tous les tourments de l'héroïne , on mesure toute sa détresse à travers un simple regard elle est bouleversante. Joaquin Phoenix est lui aussi remarquable !
On retrouve dans ce film des symboliques autour du bien et du mal et de la rédemption mais la sobriété de la mise en scène leur donne toute leur force, évitant le cliché. La scène où Ewa assiste à la messe, pour prier et se confesser est exemplaire par la beauté de la photographie et la simplicité avec laquelle James Gray la filme, évitant des lourdeurs que nous avons pu rencontrer parfois chez Brian De Palma ou Martin Scorsese.

Plus largement le film nous rappelle la pudibonderie et les hypocrisies de l'Amérique, les hommes y sont épouvantables, faisant des femmes les boucs émissaires de leurs viles turpitudes. Et également la fragilité de l'immigré, le désespoir qui est la cause de son départ lui interdit tout retour en fait un être d'une extrême fragilité prêt à subir toutes les humiliations pour ne pas avoir à se retourner.

Un film sublime !

vendredi 29 novembre 2013

Ombre Claire de Claire Heggen


 
Ombre Claire, pièce pour une marionnette et une actrice silencieuse, fut inspirée par le destin tragique de Claire Pradier, fille de Juliette Drouet et du sculpteur James Pradier, morte à l'âge de vingt ans. Juliette Drouet devenue par la suite la maitresse de Victor Hugo, ce dernier eut l'occasion de fréquenter la jeune fille qui inspira à l’écrivain  des poèmes présents dans les contemplations. 
Claire Heggen, descendante elle même de la famille de James Pradier où toutes les filles à chaque génération s'appellent Claire, inspirée par les poèmes de Victor Hugo tente un dialogue avec le quatuor à Cordes de Schubert: "la jeune fille et la mort" . Le spectacle muet fait de silence et de mouvements dansés nous est vite apparu ennuyeux, peu incarné et finalement d"'une certaine froideur.  Nous n'avons pas été saisis par cette évocation de la perte d'un enfant, La marionnette est tragiquement restée à nos yeux un objet désarticulé dans les bras de l'actrice, pour autant nous avons trouvé à ce spectacle deux vertus: 

De réentendre le quatuor à Cordes de la jeune fille et la mort que nous avions pas entendu depuis un certain temps, cette écoute fut un vrai plaisir...
De visiter le château du Parc de Sceaux bâtiment"style grand siecle" reconstruit au XIXème, ancienne propriété de Colbert, avant de devenir celle du bâtard de Louis XIV et de la Montespan, le Duc de Maine. La vie y fut alors intense, Voltaire y fut de passage trouvant  protection auprès de la Duchesse. Il y eut un jour une vie à Sceaux

jeudi 28 novembre 2013

N.N - Gyula Krudy

 

 La cigale nous faisait penser jusqu'à ce jour à la littérature de Marcel Pagnol, ou de Jean Giono voire aux fables de Jean de La Fontaine mais désormais à l'écoute de son chant il nous sera difficile de ne pas avoir des réminiscences de N.N le roman de Gyula Krudy, nous pourrions même être tentés de lui répondre en essayant d'imiter son chant si particulier.
N.N personnage central du roman, véritable double de l'auteur, a grandi dans la Hongrie orientale avant de partir vers la capitale Pest. Dix ans plus tard, il est de retour dans sa région natale, il découvre alors l'existence d'un fils... L'histoire est plutôt banale, ce qui l' est beaucoup moins, c'est la littérature de Krudy qui se révèle vite enivrante par son rapport unique à la nature, avec cette impression rare mais toujours espérée par le lecteur  de se retrouver après quelques lignes dans un autre monde, ici celui de la Mitteleuropa. Sensuelle, la poésie de Krudy nous permet de humer la campagne, d'entendre la musique de la Hongrie Orientale où les rêves et les fables font partie du quotidien. Ce qui donne un charme irrésistible à ce livre c'est sa liberté de ton, l'absence de tout préjugé... On y croise des tziganes, des juifs, on y fait l'amour librement, chaque rencontre est l'occasion de s'enrichir, de découvrir le monde. Fini durant l'hiver 1919 au moment même où l'empire austro-hongrois s'effondrait, ce livre n'a rien perdu de sa modernité. Il est finalement essentiel qu'il fasse sa réapparition sur les rayons des librairies au moment même où toutes les aigreurs semblent se réveiller car il reste une merveilleuse leçon de vie.
Nous sommes sous le charme de cette rencontre, de cette littérature sensuelle, humaine, il y a un coté dandy chez cet écrivain qui a pu nous évoquer les lectures anciennes des romans d'Albert Cossery, l'écrivain égyptien de Saint Germain des Près.
Gyula Krudy est l'enfant naturel d'un avocat issu de la petite noblesse et d'une servante qui n'ont pu se marier qu'après la naissance de leur septième enfant. Il fut l'écrivain favori de Sandor Marai qui déclarait avoir relu N.N tout au long de sa vie... Nous mêmes lorsque nous avions fini notre lecture, nous nous sommes surpris à relire les premiers chapitres.

N.N - Gyula Krudy édité dans une magnifique collection de poche - Ibiolya Virag La baconnière

mercredi 27 novembre 2013

In the Land of the Head Hunters d'Edward S. Curtis

Un objet cinématographique étonnant, tourné il y a tout juste cent ans par Edward S. Curtis photographe, antrophologue grand connaisseur des dernières tribus indiennes, dont il fut un grand portraitiste. Histoire classique d'un conflit amoureux entre deux hommes qui se disputent la même femme . Cette rivalité va engendrer une guerre particulièrement violente opposant deux clans, où entre les combats on se lance dans des danses et des séances de magie pour tenter de prendre la main sur l'esprit de l'ennemi..
Tourné chez les indiens Kwakiutl de l'île de Vancouver, le film est une reconstitution d'un monde disparu celui des indiens avant l'arrivée de l'homme blanc, Eward S. Curtis a choisi cette tribu pour la beauté des totems et autres objets. Le film  a fait l'objet d'une restauration qui n'a pu gommer tous les défauts, des parties sont manquantes elles ont été remplacées par des photos, un procédé poétique plutot réussi. Nous avons par contre beaucoup de réserves sur la musique de Rodolphe Burger particulièrement envahissante, mais rien ne nous empêchera de rester hypnotisés par la danse de la belle Nadia.
Si nos oreilles n'ont pas été emballées par cette heure de cinéma nos yeux se sont régalés de la beauté des images de Edward S. Curtis.

mardi 26 novembre 2013

Lucien Neuwirth (18/05/1924 - 26/11/2013)

Cet homme qui fut à l'origine d'une des lois les plus importantes de la V° République en faveur des femmes  ,mérite assurément un hommage, tant il est resté fidèle à son engagement de jeunesse. Alors âgé de 16 ans, il n'hésite pas une seconde à rejoindre  la Résistance après avoir entendu par hasard l'appel du général de Gaulle. Intégrant par la suite en politique  le mouvement gaulliste, Lucien Neuwirth ne renonça jamais à sa liberté de parole. Il prit ainsi la tête d'un combat pour mettre fin à une loi de 1920 qui interdisait toute forme de promotion de méthodes contraceptives.Alors député il fit une proposition de loi sans tenir compte de la vive opposition de son camp politique pour autoriser la vente de la pilule contraceptive qui allait changer la vie des femmes, une véritable révolution.
La loi fut votée le 29 décembre 1967. Les jeunes gens allaient pouvoir s'aimer librement et en toute insouciance !

R.I.P Monsieur Lucien Neurwith, l'homme qui aimait les femmes...

dimanche 24 novembre 2013

Les chansons de l'innocence retrouvée - Etienne Daho

Etienne Daho a cinquante sept sacré et il est devenu sans aucun doute un monstre sacré de la chanson française, parce qu'il a su faire entendre que la Pop musique d'influence anglaise pouvait se chanter dans la langue de Molière, il a ouvert grand une porte déjà entrouverte par Françoise Hardy dans laquelle s'est engouffrée toute une génération de chanteurs.
Comme il le  reconnait dans un entretien passionnant pour Télérama, "l'innocence retrouvée" référence à un poème de William Blake relève plus du fantasme que de la réalité, même si le chanteur reconnait parfois atteindre cet état de plénitude. L'album est dansant, captivant dés sa première écoute, avec la participation inspirée du génial Dominique A pour un titre parfait: "En surface".
"Les chansons de l'innocence" est un album sublime, où Etienne Daho chante avec une grâce que nous lui souhaitons éternelle. C'est évidemment notre album de la semaine. 
"Etre défini, que ce soit par la religion, la couleur de peau, la sexualité, me fait horreur”. Etienne Daho est un grand!


samedi 23 novembre 2013

Les garçons et Guillaume, à table ! Guillaume Gallienne

 

Nous avions vu le spectacle de Guillaume Gallienne au théâtre, son adaptation au cinéma n'apporte pas grand chose à l'histoire de ce jeune homme en quête de son identité si ce n'est d'avoir une exposition beaucoup plus large. Nous avons largement  préférè le voir seul sur scène incarner tous les personnages, au cinéma certaines situations nous sont apparues par moment grotesques  tirant quelque peu sur la longueur, la scène était un lieu plus idéal pour caricaturer les personnages, pour forcer le trait. Le séjour en cure dans un établissement bavarois étant à ce titre particulièrement édifiant par sa lourdeur, le réalisateur sombre alors dans la comédie indigeste.  Peut être avons nous été gavés aussi par la campagne de promotion , créant une véritable saturation de Guillaume Gallienne.
Il reste des morceaux d'anthologie, notamment la visite médicale chez  un psychiatre militaire ou les leçons de Sévillane lors d'un séjour en Espagne pour le reste c'est finalement assez anodin... mais peut être que ceux qui n'ont pas vu le spectacle y trouveront leur compte.
Pour nous la meilleure comédie de cette rentrée reste Neuf mois fermes d 'Abert Dupontel, voire celle plus décalée de Serge Bozon... La reine de cette saison c'est assurément Sandrine Kiberlain

vendredi 22 novembre 2013

Georges Lautner (24/01/1926 - 22/11/2013)

Sa filmographie est une sacrée collection de sublimes nanards du cinéma français dont il est devenu une figure incontournable. Au milieu, une  pépite éthylique de la comédie "Made in France": les tontons flingueurs où il sut mettre en image" la poésie" des dialogues de Michel Audiard. Un temps où on buvait des boissons d'hommes sur les plateaux de cinéma !

Pour ce chef d’œuvre, nous adressons un ultime salut à Georges Lautner. Touche pas au grisbi, Salope !

Le palais de Glace - Tarjei Vesaas

Siss, une jeune fille de onze ans, est un peu le chef de bande de l'école, celle autour de qui on se réunit pour décider des jeux à la récréation. Un ordre bien établi bouleversé par l'arrivée d'une nouvelle élève: Unn.  Venue vivre chez une tante  après le décès de sa mère alors qu'elle n'a jamais connu son père autrement que sur une photographie. Unn reste à l'écart du groupe de camarades, malgré l'invitation de Siss à les rejoindre. Cette distance n'est pas pas sans créer une véritable fascination entre les deux jeunes filles, Siss accepte l'invitation de Unn à venir un moment avec elle chez sa tante..... Le lendemain Unn ne vient pas à l'école, elle bifurque vers le lac et sa cascade qui se transforme chaque hiver en palais de Glace, elle y pénètre pour ne plus en ressortir.. La disparition de la jeune fille inquiète, Siss est interrogée mais ne dit rien sur leur soirée commune, les recherches restent vaines... Siss traverse l'hiver solitaire et silencieuse à l’écart de ses camarades, comme se tenait Unn...

Un livre magnifique de Tarjei Versaas, sur l'hiver, la nuit qui tombe vite dans les pays du nord, la mort, le deuil... ou comme le dit si simplement Régis Boyer dans sa présentation: "le don de Tarjei Vesaas, peut être le plus grand écrivain norvégien de ce siècle (1897-1970) aura été de savoir abolir la dérisoire ligne de démarcation entre vie et mort, solitude et présence. Il n'y a pas d'explication toute prête à ce chef d’œuvre qu'est palais de glace, tant la symbolique en est riche et les harmoniques multiples. Peut être ne s'agit il que d'une variation intensément poétique sur le grand secret du thème sacré: l'amour plus fort que la mort."
Il se dégage de ce roman un mystère, fascinant parce que jamais le roman n'a de coté artificiel comme le dernier roman de Laura Kasischke de cette rentrée littéraire "esprit d'hiver" qui manipule à souhait son lecteur... Chez Versaas, rien de tel, sa littérature exprime une sincérité, un rapport personnel à la nature, aux saisons, c'est de la littérature de taiseux où chaque mot est essentiel, sans aucune esbroufe. Sublime !

jeudi 21 novembre 2013

Othello - Orson Welles

Venise, Othello, le général Maure épouse secrètement Desdémone sublime vénitienne, entrainant la fureur de son père. Mais il ne peut rien contre ce Général devenu le mercenaire favori du pouvoir vénitien et qui multiplie les exploits militaires . Mais sa puissance agace notamment Iago son second jaloux de n'avoir pas obtenu sa place . Ce dernier, manipulateur va instiller le poison de la jalousie dans les veines d'Othello le persuadant de l'adultère entre son épouse  et Cassio pourtant un fidèle soldat qui se trouve pris au piège ne devinant pas les noirs dessins de Iago. Othello persuadé de la tromperie, assassine sa femme avant de réaliser  sa méprise. Too late ...
Le filme s'ouvre sur les obsèques d' Othello et Desdèmone, Iago est prisonnier dans une cage suspendue aux remparts, sublime ouverture qui donne le ton du film dont le tournage fut particulièrement complexe,arrêté plusieurs fois, étalé sur plusieurs années, subissant des changements d'acteurs. Orson Welles dut faire face à toutes les difficultés pour arriver à ses fins. Le film pourtant n'en souffre pas, certes Orson Welles a été limité notamment il n'eut jamais les moyens de faire de longs plans séquences trop couteux, mais il eut la main sur le montage où il put donner à son film toute sa cohérence. Sa volonté de mener à bien son projet le poussa à jouer dans le troisième homme de Carol Reed, il utilisa son cachet pour produire son film.
Toujours marqué par le cinéma expressionniste, il joue à merveille du clair obscur pour donner une atmosphére inquiétante au film et rendre compte de la folie montante qui pousse Othello à commettre l'irréparable. Le film remporta la palme d'or à Cannes !

"C'est la jalousie qui est détestable, pas Othello. Il est si obsédé par sa jalousie qu'il en devient l'incarnation même. Dans ce sens, c'est un malade. Tous les grands personnages de Shakespeare sont détestables par un aspect ou un autre, ils sont prisonniers de leur propre nature."

Moi, Orson Welles - Orson Welles & Peter Bogdanovich

mardi 19 novembre 2013

Honorine - Honoré De Balzac

"Il y a un texte de Balzac, qui s'appelle Honorine, je ne sais pas si vous le connaissez. Le docteur Cardoso fit signe que Non de la tête. C'est un récit sur le repentir, dit Pereira, un beau récit sur le repentir, au point que je l'ai lu sur un angle autobiographique."

Extrait de Pereira prétend - Antonio Tabucchi

Si nous avons lu Honorine, une nouvelle de Honoré de Balzac c'est grâce à Marylin Monroe. Le jour où nous sommes allés au cinéma voir les Misfits de John Huston, le film était présenté par Bernard Comment l'éditeur des fragments, carnets intimes de l'actrice américaine. Nous avions beaucoup aimé sa prestation. Aussi  , nous avons eu le désir de lire Pereira prétend, roman d'Antonio Tabucchi traduit par Bernard Comment ce qui nous a poussé à lire la nouvelle de Balzac  !

Sublime histoire de la passion amoureuse, Honorine a quitté son mari pour vivre une aventure amoureuse. Enceinte, elle est abandonnée par son amant, son enfant meurt quelques mois après sa naissance... Seule Honorine s'installe comme fleuriste, elle vit dans une grande solitude, coupée du monde sans savoir que c'est son mari toujours amoureux qui subvient indirectement à ses besoins. Ce dernier confie à son homme de confiance, le conteur de cette histoire, la mission de se rapprocher de son épouse pour obtenir sa confiance, et lui expliquer que son époux l'attend sans aucun reproche...

Pereira ne ment pas c'est un magnifique récit sur le repentir qui fait partie des scènes de la vie privée de la comédie humaine.

lundi 18 novembre 2013

Welcome In Vienna - Une trilogie d'Axel Corti

Welcome In Vienna est une extraordinaire et terrible saga historique qui va suivre le destin de juifs viennois de la nuit de cristal à la libération de l'Europe. Fuyant l'Autriche , un groupe de juifs trouvent miraculeusement une porte de sortie vers l'Amérique qui ne les reçoit pas à bras ouverts . Nous suivrons alors le destin de Freddy Wolff qui va s'engager dans l'armée américaine. Il se retrouve dans sa ville natale Vienne, libérée et occupée par les forces alliés. Un retour douloureux !
La première partie de ce film est absolument passionnante parce qu'elle montre ce qui a notre connaissance n'avait jamais été filmé et qui répond à cette question que l'on pose parfois naïvement: Pourquoi n'ont ils pas fui à l'arrivée au pouvoir des nazis?
Tout simplement parce qu'ils ne pouvaient pas, aucun pays pour les accueillir, une Amérique particulièrement frileuse, elle même confrontée à une montée de l'antisémitisme. Les juifs d'Allemagne et plus tard ceux d'Autriche et de Tchécoslovaquie sont piégés, seule une minorité, les plus fortunés ou les plus aventuriers peuvent se lancer dans un parcours compliqué pour trouver le chemin de la liberté. Lorsqu'ils arrivent en France ils ne sont pas particulièrement bien accueillis, sans papier ils se retrouvent la plupart du temps internés  dans des camps comme "ennemi allemand " quand la guerre éclate.
Les personnages du film finissent par trouver une issue pour monter à bord d'un bateau vers l'Amérique, mais l'arrivée n'est pas simple pour ceux qui n'ont pas obtenu un visa... la destinée est longue, notamment lorsque l'Amérique entre en guerre, ils se retrouvent assimilés encore une fois  à l'ennemi allemand, un comble! et lorsqu'il revient sur le sol européen ,avec l'armée libératrice la désillusion Freddy Wolff    est grande. Confronté à l'antisemistisme de certains de ses compagnons , il refuse aussi d'admettre la compromission générale , les affaires reprennent comme si l'horreur n'avait pas eu lieu  .Déçu par l'Amérique , Freddy aspirait à un idéal européen à jamais perdu.
Filmé en noir et blanc, Welcome in Vienna intègre parfaitement des images d'archives, c'est une fresque superbe qui filme la fin d'un monde: l'age d'or de la mitteleuropa. Claude Lanzmann a tout dit en quelques mots de cette fabuleuse trilogie: "Welcome To Vienna est un film subtil et enthousiasmant, une grande leçon d'histoire, de cinéma et d'humanité."

dimanche 17 novembre 2013

Doris Lessing (22-10-1919 - 17-11-2014)

Une des vertus du Prix Nobel de Littérature est de nous faire découvrir des auteurs que nous avions jusque là laissés de coté. Plus un Nobel nous est inconnu, plus nous en sommes heureux. Ce fut le cas de Doris Lessing, elle ne nous était pas inconnue,   mais pour autant nous n'avions pas ouvert le moindre roman avant l'obtention de la récompense suprème. Nous avons alors fait l'acquisition de son roman le plus célébre le carnet d'or, qui nous avait semblé alors d'autant plus indispensable à la lecture des mots de Joyce Carole Oates:

"On ne dira jamais assez combien ce livre a compté pour les jeunes femmes de ma génération. il a changé radicalement notre conscience."

Doris Lessing fut assurément une grande dame de la littérature, nous n'avons toujours pas  lu "le carnet d'or" et ses autres romans. Ce soir nous en sommes un peu honteux.

R.I.P Madame Doris Lessing !

Blonde on Blonde - Bob Dylan





The guilty undertaker sighs

The lonesome organ grunder cries
The silver saxophones say I should refuse you
The craked bells and washed-out  horns
Blow into my face with scorn
But it's not that way
I wasn't born to lose you

I want you, I want you
I want you so bad
Honey, I want you.

....

(extrait de I want You)

Blonde on Blonde est le premier double album de l'histoire du rock. Il est difficile d'imaginer alors combien les concerts donnés par Bob Dylan sont houleux après son virage électrique de "Like a Rolling Stones" vécu comme une trahison par les puristes de la folk musique. Les images du film de Martin Scorsese "No direction home" sont particulièrement saisissantes sur l'hostilité rencontrée par le chanteur, régulièrement menacé de mort. Cet album marque la fin d'une période chez Dylan victime quelques mois après sa sortie d'un accident de moto , il disparait trois ans durant, de la scène. 
Un album aux paroles hermétiques, un sommet dans la carrière de Dylan, qui s'écoute toujours avec la même ferveur. Nous ne nous lasserons jamais de reprendre en chœur "I want you, I want you, I want you so bad, I want you Honey".

Blonde on Blonde de Bob Dylan est notre album de la semaine.


samedi 16 novembre 2013

Une femme douce - Robert Bresson

Une jeune femme se défenestre, son mari se recueille au pied de son lit en compagnie de sa vieille gouvernante. Il reprend l'histoire de son couple à son origine pour tenter de comprendre les raisons du geste fatal. Très rapidement il se reproche d'avoir trop gardé le silence avec sa jeune épouse qu'il a connue alors qu'elle venait désespérée vendre ses derniers biens dans son commerce de mont de piété. La jeune femme orpheline avait été recueillie par sa famille qui la traitait sans considération, ne lui laissant pas d'autres choix que de se débarrasser de ses objets personnels pour  payer  cahiers et  livres nécessaires aux études. Elle voit dans le mariage une ouverture mais il s’avère d'une tristesse infinie...
Le film devenu invisible a fait l'objet d'une restauration lui redonnant toutes ses couleurs d'origine. Austère, le cinéma de Bresson ne cherche jamais à résoudre le mystère du geste de la jeune fille , au contraire c'est ce mystère qu'il filme laissant son film volontairement énigmatique. Son film sobre, lent doit tout au magnétisme de Dominique Sanda d'une beauté fascinante renforcée par le son si particulier de sa voix qui hypnotise le spectateur. Âgée de 18 ans, c'est son premier rôle au cinéma, sans quoi Bresson qui refuse les comédiens professionnels ne l'aurait jamais engagée !

Adaptation d'une nouvelle de Dostoievski, Robert Bresson  explique son choix lors d'un entretien:

"Vous savez mon admiration sans limites et mon amour pour l’œuvre de Dostoïevski. Si j'ai choisi une nouvelle (en russe Krotkaja, que les traducteurs ont appelé la douce) pour tirer d'elle mon film. Une femme douce - titre un peu ironique-, si j'ai choisi cette nouvelle, c'est précisément parce qu'elle n'est pas très bonne. Assez et même très emphatique, très grandiloquente par endroits, assez bâclée. J'ai pu m'en servir au lieu de la servir; sans nuire au génie de Dostoïevski, sans sacrilèges. Je n'ai pris que l'essentiel, je l'ai dérussifié et rendue actuelle. L'action se passe à Paris, de nos jours, entre un jeune marie  et sa jeune femme une vieille gouvernante"

Source: Bresson par Bresson - Entretiens - Editions Flammarion

vendredi 15 novembre 2013

Quai d'Orsay - Bertrand Tavernier

Adaptant  la géniale Bande Dessinée de Christophe Blain et Abel Lanzac, Bertrand Tavernier se lance dans la comédie débridée et disons le tout de suite il se prend largement les pieds dans le tapis. Chronique de la vie du cabinet ministériel à travers la dernière jeune recrue venue rédiger les discours d'un ministre impétueux inspiré par Dominique de Villepin. Les gags sont éculés, répétés jusqu'à épuisement, on finit rapidement par s'ennuyer de la lourdeur du cinéaste lyonnais. Le tout devient bruyant et ennuyeux, nous avons même eu à supporter une chanson de Daniel Balavoine.
Il n'y a pas beaucoup d'audace dans le cinéma de Tavernier, on voit bien que l'auteur inspiré par sa cinéphilie et assurément Howard Hawks, cherche à mettre du rythme mais en vain, Thierry Lhermitte ne vaut pas tripette comparé à l'immense Cary Grant. Cependant Quai d'Orsay nous propose quelques rares moments d'une grande drôlerie servie par une belle équipe d'acteurs.
Depuis l'indigeste Princesse de Montpensier, nous avons du mal avec le cinéma de Tavernier même  avec ses films les plus anciens souvent décevants quand on les revoit aujourd'hui !

jeudi 14 novembre 2013

Les inconnus dans la maison - Georges Simenon

L’œuvre de Georges Simenon est immense, donc inégale, le sublime  côtoie parfois des romans plus faibles où l'auteur tombe quelque peu dans la facilité, ne soignant pas spécialement son intrigue.Pour autant ces derniers restent captivants, on n'abandonne jamais un roman de Simenon, c'est toute la magie de cet auteur. Les inconnus dans la maison fait partie de ces romans faibles dans l’œuvre de l'écrivain belge.
Le roman vaut par son personnage principal un avocat Hector Loursat de Saint Marc qui vit en ermite dans son hôtel particulier depuis le départ de sa femme voila 18 ans. Les bouteilles de Bourgogne rythment sa journée, il en boit immuablement trois par jour. Sa fille Nicole a été élevée par les gens de maison et plus particulièrement la cuisinière appelée "la naine". Il est la honte de la bourgeoisie de Moulins.
Un soir un coup de feu vient le réveiller dans son sommeil,  Gros-Louis un repris de justice a été assassiné dans sa demeure. Il découvre alors que la jeunesse dorée de la ville se donnait rendez vous à son insu dans son immense demeure après s'être encanaillée dans les bistrots de la ville, s'amusant à jouer les durs. C'est le gamin le plus modeste de la bande qui se retrouve accusé du crime, les bourgeois veillant à protéger leur progéniture du scandale. Une affaire qui va réveiller l'avocat de sa torpeur, il s'engage dans la défense du jeune homme ce qui n'est sans faire peur à la bonne société de la ville.
L'intrigue n'est pas bien épaisse, ni très crédible mais qu'importe nous retrouvons la vision sombre de la société provinciale,Simenon traite des thèmes qui lui sont chers et évoquent avec finesse ses détestations: la société des héritiers, l'hypocrisie de la bourgeoise à l'esprit étroit et mesquin.... La lecture des romans de Simenon est toujours réjouissante !

mercredi 13 novembre 2013

Sonate d'automne - Ingmar Bergman

Eva écrit une lettre à sa mère Charlotte, pianiste concertiste de renommée internationale qui vient de perdre son deuxième mari, pour l'inviter à passer un séjour dans sa grande maison dans la campagne suédoise qu'elle partage avec son époux, pasteur de profession. Les retrouvailles sont plutôt chaleureuses même si on  sent rapidement une certaine distance entre les deux femmes quand Charlotte est désagréablement surprise d'apprendre la présence de sa deuxième fille handicapée Hélèna, qu'elle croyait toujours hospitalisée dans un établissement spécialisé. La soirée se termine autour du Piano et d'un prélude en fa mineur de Chopin... Dans la nuit Charlotte victime d'un cauchemar se lève, Eva la rejoint; aidée par un verre de vin, la parole se délie...
Ce film est célèbre dans l'histoire du cinéma parce qu'il scelle la rencontre entre Ingrid Bergman et Ingmar Bergman. Le film s'ouvre sur un plan magnifique d" Eva (Liv Ullman) écrivant sa lettre, un plan où les érudits de peinture feraient aisément des rapprochements avec les toiles où Bergman puise son inspiration. Les dialogues sont ciselés, chaque mot est choisi avec soin et justesse , l'image fait sens elle révèle la dramaturgie de la situation. La séquence autour du prèlude en fa mineur est à ce titre une petite merveille, sans un mot on découvre à travers la décomposition du visage de Eva,tous les tourments de son âme enfin formulés lors du règlement de comptes nocturne entre mère et fille.  Des années d'incommunicabilité libérées par un verre de vin. In vino veritas !

Mais celle qui parle le mieux de ce film, et notamment du rapport parfois tendu entre les deux Bergman, c'est la géniale Liv Ullman qui fut une témoin privilégiée de cette grande rencontre!

lundi 11 novembre 2013

Ladybird, Ladybird - Ken Loach

Ladybird, Ladybird est un drame social, le portrait d'une femme battue, confrontée à la violence depuis ses plus jeunes années qui se voit retirer systématiquement la garde de ses enfants par les services sociaux... Pourtant Maggie venait de commencer une nouvelle vie avec  Jorge un immigré paraguayen un homme calme et tendre, son espoir de former enfin une famille est anéanti ...
Le drame social issu d'une histoire vraie est un genre particulièrement difficile qui sombre souvent dans les bons sentiments, offrant une vision manichéenne du monde sans grand intérêt ... Ladybird Ladybird est une exception, Ken Loach ne juge pas, il filme une situation dans toute sa complexité, les seuls salauds sont les hommes qui battent les femmes, ils ne sont que des rôles secondaires. Nous comprenons aisément la terrible décision des services sociaux face à l’incapacité de Maggie à se contrôler à chaque entretien où les nerfs à fleur de peau, elle pète les plombs. Au tribunal devant les juges, elle ne peut réprimer ses accès de colère devant les mensonges de ses voisins ou des rapports péremptoires des médecins, son attitude  la rend indéfendable aux yeux du juge. Un comportement irréfléchi qui masque aux yeux de la loi l'amour qu'elle porte à ses enfants et l'incapacité qu'elle aurait  à leur faire le moindre mal.
Maggie n'est pas un ange, son passé est lourd, elle a commis des erreurs,  mais la loi anglaise est dégueulasse dans sa capacité à être définitive dans le retrait de l'enfant à sa mère. La décision de retirer un enfant à ses parents est terrible, la mission des services sociaux est complexe, dramatique, la moindre erreur les jette au pilori de l'opinion publique, ce que ne fait  jamais Ken Loach . Ladybird, Ladybird est peut être le film le plus bouleversant de sa filmographie parce qu'il rend compte du monde dans toute sa complexité, ce n'est pas un film à thèse même s'il dénonce la pauvreté au cœur de ce drame . Le film est aussi exceptionnel par l'interprétation de son actrice principale: Crissy Rock.

Nous avons revu Ladybird, Ladybird de Ken Loach parce que sa scénariste Rona Munro est aussi l'auteur de la pièce de théâtre "enfermées" que nous avons vue ce week-end. Comme dans le film de Ken Loach, nous retrouvons la même construction subtile des personnages . 

Ladybird, Ladybird fait l'objet d'une projection exceptionnelle au cinéma Jeanne Moreau le 12 novembre en présence de la scénariste Rona Munro.

dimanche 10 novembre 2013

Enfermées - Rona Munro (Mise en scène Magali Leris)

Josie, vingt cinq ans,  rend visite pour la première fois à sa mère Fay emprisonnée depuis 15 ans et ce jour funeste où elle a tué son père. Josie n'a plus aucune mémoire de son enfance, elle compte sur sa mère pour la réveiller, mais cette dernière refuse de revenir sur ce passé. De son crime, elle n'a jamais voulu parler,  même pas lors de son procès renonçant par son silence à toute forme de clémence de la part des juges qui l'ont condamnée à perpétuité.
Elles vont se retrouver au sein d'un parloir déshumanisé sous la surveillance permanente de gardiens de prison, les premiers dialogues sont difficiles, faits de non-dits... l'évocation du passé commun est compliquée.
Nous savions pour avoir vu "Sonate d'automne" de Ingmar Bergman, la violence que pouvait engendrer des retrouvailles Mère Fille et les réminiscences des années passées, mais nous sommes ici loin du monde bourgeois du cinéaste et dramaturge suédois où la jeune fille avait souffert de l'absence de sa mère, pianiste de renommée internationale parcourant le monde . Nous sommes dans le milieu populaire anglais, où l'on aime sortir dans les pubs se reveillant parfois le matin dans son canapé et son vomi. Un monde finalement  inconnu à Josie devenue une brillante jeune fille qui a connu une ascension sociale la menant à voyager autour du monde au gré de ses emplois.
Mais comme Eva l’héroïne de Bergman, Josie se retrouve dans une impasse où le seul espoir de sortie est de régler son passé , de tenter de comprendre sa mère, voire de s'occuper de sa défense, mais cette mission semble bien difficile face à une femme détruite par quinze années d'incarcération. Se réapproprier ce passé est une condition indispensable pour pouvoir aimer.
Il est difficile de ne pas penser à Ken Loach, d'autant plus que Rona Munro fut la scénariste de son film le plus bouleversant, Ladybird Ladybird. Si ce drame social a une portée malheureusement universelle, il convient de reconnaitre que les anglo-saxons ont un talent unique pour en donner une juste représentation, nous nous souvenons ainsi avoir assisté par le passé dans ce même théâtre à une représentation d'une pièce irlandaise sur les violences conjugales de Roddy Doyle, Paula Spencer la femme qui se cognait dans les portes...
Le travail de mise en scène de Magali Leris est absolument remarquable, elle donne vie à ce texte, lui donne corps... Décor minimaliste, une lumière faite de deux néons, elle a su parfaitement mettre en rythme le texte pour en révéler toute la tension, la dramaturgie notamment par ses plages de silence qui révèlent les bruits permanents et usants de la prison... Nous avons été scotchés par ce spectacle d'une grande intensité qui derrière le drame intime est aussi une véritable réflexion sur l’univers carcéral et  le rapport gardien prisonnier. Fay la criminelle a compris dés son forfait commis qu'elle ne pourrait jamais se libérer de son crime, un châtiment qui n'est pas sans rappeler celui de Raskolnikov, mais à la différence du roman de Dostoïevski, Dieu et la rédemption sont ici totalement absents.
Les deux actrices Nanou Garcia et Marion Harlez Citti sont absolument formidables, le jeu est exigeant, physique, fait de montées de tensions brusques, elles sont toujours justes, parfaitement encadrées par Priscilla Bescond et Stephane Comby jouant les deux gardiens.

Un grand moment de théâtre, un spectacle à découvrir !


Leo Ferré Chante Verlaine et Rimbaud

Puisque qu’aujourd’hui est le 102ème anniversaire de la mort d'Arthur Rimbaud, nous avons décidé de réécouter cet album de Léo Ferré où il chantait les deux poètes Verlaine et Rimbaud. Si nous n'avons pas toujours été enthousiasmés par cet exercice de mettre en musique les poètes, nous n'avons jamais supporté Jean Ferrat chantant Aragon, cet album est pour nous une exception. Nos cœurs résisteront aux sanglots des violons de l'automne de ce mois de novembre....

Leo Ferré chante Verlaine et Rimbaud est notre album de la semaine !


samedi 9 novembre 2013

Proust contre Cocteau - Claude Arnaud

Ils furent deux des figures les plus charismatiques du XX° siècle, ils avaient vingt ans de différence, leurs premières rencontres ont eu lieu dans les années 1909-1910 avec en commun une admiration sincère pour la poétesse Anna De Noailles. Proust est sous le charme de son cadet plein d'humour.... Ils fréquentent les mêmes cercles et lorsque Proust se lance dans l'écriture de la Recherche, Cocteau est un véritable soutien alors que les maisons d'édition ne se précipitent pas pour éditer ce roman, Gallimard refusant notamment le manuscrit... La relation devient plus compliquée au moment où Proust se fait une place dans la vie littéraire alors que Cocteau a du mal à confirmer tous les talents entrevus dés ses jeunes années.
Merveilleux essai littéraire qui se lit tel un roman, la reconstitution de la vie littéraire est absolument remarquable au moment où la guerre de 14-18 signe définitivement la fin du XIX et la vie des salons qui avait survécu à la chute de du deuxième Empire, c'est la fin d'une génération d'écrivains, Anatole France, Maurice Barres... un monde immortalisé par l’œuvre de Proust qui se voit rapidement éclipsé par une nouvelle génération d’écrivain et de nouveaux courants artistiques. L'essai se poursuit au delà de la mort de Marcel Proust, abordant notamment en détail le rapport ambiguë que Cocteau va entretenir avec l’œuvre de son ainé dont il connait toutes les clés.
Un ouvrage passionnant, notre coup de cœur de cette rentrée littéraire !

jeudi 7 novembre 2013

Une vie pornographique - Mathieu Lindon

Nous avions eu un vrai coup de cœur pour le précédent roman de Mathieu Lindon "ce qu'aimer veut dire". La déception est particulièrement grande à la lecture laborieuse de ce roman où à travers son personnage Perrin, on nous conte en détail l'histoire d'une addiction à l'héroïne. et  de sa douloureuse libération. La défonce n'est ici ni démoniaque, ni festive, c'est ce regard froid presque clinique qui fait la singularité de cet ouvrage, nous suivons Perrin dans son quotidien, ses rencontres avec les dealers avec cette impression permanente de dominer la situation sans avoir conscience du piège de l'addiction... La vie sous héroïne se révèle plutôt triste, provoquant constipation et impuissance...elle finit par nous plonger dans un total ennui ...
Nous ne savons pas pourquoi mais d'un coup à la lecture de ces pages nous nous sommes rappelés que Perrin c'était aussi le nom du personnage des films de Francis Veber ...

mercredi 6 novembre 2013

Inside Llewyn Davis - Joel et Ethan Coen

Llewyn Davis erre dans New-York sa guitare sous le bras, un seul but s'imposer sur la scène folk en solo depuis la disparition de son partenaire de scène Mike, sans faire aucun compromis sur son art. Son errance est une suite d'échecs, trouver un coin de canapé chez une connaissance pour dormir quelques heures est déjà une gageure... Sa route au cours d'un voyage improbable (génial John Goodman ) va le mener jusqu'à Chicago où il passe une audition qui scelle définitivement son échec... Llewyn décroche une date à son retour dans une salle à New-York où un critique du Times doit être présent, après son passage un chanteur à l'harmonica et à  la voix nasillarde lui succède... ce n'est pas une bonne nouvelle !
Les frères Coen sont les cinéastes de l'échec, des paumés, ils filment l'Amérique telle qu'elle est, sans chercher à l'idéaliser, avec un regard tendrement ironique.... La reconstitution de New-York des années 60 est absolument remarquable, avec une interprétation extraordinaire de Oscar Isaac, une prestation bouleversante qui emporte la sympathie même si le personnage sans illusion peut se révéler parfois odieux . Inside Llewyn Davis est un film parfait, un peu poissard; comme son chanteur qui voit débarquer Bob Dylan, il s'est fait piquer la palme d'or sous le nez par la sublime Adèle

dimanche 3 novembre 2013

Providence - Alain Resnais

Le cauchemar d'un écrivain en fin de vie, Clive Langham seul dans sa demeure totalement enivré laisse libre court à son imagination, à sa part d'ombre ... Véritable puzzle,  son inconscient libéré par son éthylisme  révèle sa détestation de la vieillesse, de la déchéance physique, mais aussi tous les sentiments ambiguës qu'il entretient avec ses enfants,surtout depuis  le suicide de sa femme condamnée par un cancer, et sa profonde haine de la bourgeoisie à laquelle il appartient....Mais plus que celui de ses proches, c'est son propre portrait que révèle l'écrivain qui cherche pourtant à sauver ses apparences... Le lendemain matin, retapé par les gens de maison, Clive Langham est prêt à recevoir ses deux fils et sa belle fille pour fêter son soixante dix huitième anniversaire, une journée modèle conforme aux convenances de sa classe sociale...
Nous avons toujours trouvé un coté "english" à Alain Resnais, Providence l'exprime totalement, le cinéaste signe un film à l'humour macabre qui se joue des peurs, absolument délicieux, L'alcool révèle la part démoniaque de l'ecrivain, cette première partie filmée dans une ambiance irréelle est un véritable ravissement où l'on bascule sans cesse de l'effroi à l'humour noir. John Gielgud et Dirk Bogarde sont absolument magnifiques, ils semblent se régaler à jouer leurs rôles à en exprimer toute l’ambiguïté.
Projeté dans le cadre du ciné club de Claude Jean Philippe dans une version restaurée, Providence par ses couleurs crépusculaires de la première partie sied parfaitement à ce mois de novembre, un film parfait pour l'automne.
Nous nous interrogeons de savoir quel regard peut porter sur son film tourné en 1977 Alain Resnais devenu depuis un vieil homme au regard toujours pétillant.

Laurie Anderson - Life on a string


C'est à travers sa compagne Laurie Anderson que nous avons voulu rendre hommage à Lou Reed. Alors cette semaine,nous ressortons son magnifique album de 2001, Life on a string, et nous le laisserons tourner sur notre platine...
Life On a String est notre album de la semaine.

samedi 2 novembre 2013

L'impasse - Brian De Palma

Carlo Brigante hors la loi depuis la naissance bénéficie d'une libération miraculeuse, bénéficiant d'un non lieu après que son avocat eut mis à jour une erreur de procédure. Condamné à 30 ans, il se retrouve libre après seulement cinq années, occasion pour lui de se ranger définitivement des affaires.
Son rêve: rejoindre les Bahamas et tenir une affaire de location véhicule avec un ami rencontré en prison. Mais pour cela il lui faut un capital, alors il investit dans une boite de nuit, pas vraiment le milieu idéal pour couper avec les démons du passé...
Brian de Palma ne nous cache pas l'issue tragique, le film s'ouvre sur la mort de son héros qui dans son agonie a le temps de voir défiler sa vie...
Hitchcock est la référence de De Palma, mais si le réalisateur des oiseaux ne s'est jamais départi de son élègance anglaise, De Palma est le cinéaste du Bling Bling, du mauvais goût, il met parfaitement en scène la laideur des boites de nuit et des parvenus. L'Impasse ou Carlito's way est un de ses films les plus aboutis, Al Pacino est époustouflant, il signe là un de ses plus beaux rôles, il est particulièrement émouvant en homme du milieu, le seul à être fidéle au code de l'honneur dont on se rend compte qu'il n'est qu'une légende du milieu... Sean Penn est tout aussi excellent dans le rôle d'un avocat surdoué mais totalement véreux, surement soumis par son addiction à la cocaïne. Pour accompagner ce duo, Penelope Ann Miller magnifique blonde, qui est la principale motivation de Carlo Brigante de trouver une situation honorable.
Le film se termine sur une scène de poursuite extraordinaire dans la gare centrale de New-York, un sublime moment de cinéma, une séquence d'anthologie où le cinéaste révèle toute sa virtuosité.
Un somment dans la filmographie de Brian De Palma.

Vu dans une copie restaurée à la Filmothèque du Quartier Latin.

Prince of Texas - David Gordon Green

Alvin a embarqué avec lui son jeune beau-frère Lance pour aller repeindre les marquages sur une route déserte et déglinguée du Texas. Nous sommes en 1988, un an après un important incendie de forêt qui a laissé un paysage de désolation... Chaque soir, les deux compères plantent la tente. Si Alvin apprécie la solitude de la nature, le plaisir des parties de pêches, le jeune Lance attend avec impatience le week-end pour rejoindre la ville et tenter de satisfaire ses désirs libidineux...
Cela a tout du road movie sympa, mais cela devient vite ennuyeux, quelques répliques font mouche, le tout s'avère finalement assez convenu, le film se révèle anecdotique,  nous l'oublierons assez rapidement.

vendredi 1 novembre 2013

Snowpiercer - Bong Joon Ho

2014, les autorités de différents pays lancent dans l’atmosphère un produit le CW-7 qui doit permettre le refroidissement de la planète... le résultat va bien au delà de qui était escompté, la terre est plongée dans une ère glaciaire, une portion d'humanité  a trouvé refuge dans un train conduit par une machine dotée du mouvement perpétuel, condamné à tourner autour de la terre. Dix sept ans plus tard, nous nous retrouvons dans les wagons de queue où ont été agglutinés les "resquilleurs", traités tels des esclaves ils préparent la révolte pour tenter de remonter le train, passer par la deuxième classe pour rejoindre les wagons de tête de la première classe et mettre fin à leur odieuse exploitation. Le parcours s'annonce très compliqué, le maître du train "Wilford" est plutôt bien armé pour se défendre!

Cette dystopie haletante a toutes les qualités du film d'action, un rythme soutenu, un scénario parfaitement tenu avec nombre de rebondissements, on ne s'ennuie pas une seconde. Les paysages de glaces sont magnifiques et terrifiants, ce film est d'une grande beauté formelle. C'est loin d'être une coquille vide, il suffit de se rappeler qu'en ce moment des ouvriers meurent dans des conditions effroyables au Qatar où ils sont exploités pour construire des stades climatisés pour accueillir en plein désert une coupe du monde de Football.... nous sommes tous les passagers d'un train....

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