dimanche 29 avril 2012

Le narcisse noir - Michael Powell et Emeric Pressburger

Nous avions prévu d'aller voir "il pleut sur notre amour" de Ingmar Bergman que nous n'avions jamais vu au Reflet Médicis. Mais une malencontreuse panne d'électricité nous a poussé vers le cinéma voisin la filmothèque du quartier latin où était projeté "le narcisse noir" de Michael Powell et Emeric Pressburger. Ce film nous l'avions vu à la télévision il ne nous avait pas laissé un souvenir impérissable, tout simplement parce que le cinéma spectaculaire du duo britannique ne supporte pas le passage sur le petit écran.

Soeur Clodagh (Deborah Kerr) est nommée Mére Supérieure d'un nouveau couvent installé à Mopu sur un pic rocheux au plein cœur de l’Himalaya dans un palais mis à disposition par le général local, une ancienne  demeure des épouses de son père...
Elle est accompagnée de quatre sœurs.  Les fresques ne laissent aucun doute, c'est un ancien lieu de débauche que viennent habiter les sœurs. Aidées par Dean un agent anglais pour mettre en place le dispensaire et l'école, les sœurs doivent s'adapter à cet environnement hostile où le vent souffle en permanence... Dans ce monde clos, les tensions apparaissent, Soeur Clodagh se rappelle avec nostalgie  sa jeunesse en Irlande et  son amour déçu; la présence de Dean n'y est pas étrangère même si elle se chamaille avec lui à longueur de journée, cette complicité naissante n'échappe pas à Sœur Ruth...

Le premier plaisir de ce film est visuel, c'est un pur bonheur de bout en bout avec en final une scène terrifiante entre les deux sœurs, un vrai duel, à la puissance rare qui n'a rien à envier aux plus grands moments de suspens de Alfred Hitchcock. Bertrand Tavernier et Martin Scorsese n'ont eu de cesse de réhabiliter l’œuvre de Michael Powell et Emeric Pressburger, le cinéaste américain participant notamment à la restauration des copies, nous devons leur tirer notre chapeau pour avoir remis au goût du jour le cinéma flamboyant au récit parfaitement maitrisé de ce duo anglais. Une merveille !

Bertrand Tavernier : "Les films de Michael Powell entre 1937 et 1951 témoignent d'une originalité, d'une liberté de ton stupéfiante. Profondément enracinés dans une culture nationale, ils font en même temps preuve d'une curiosité et d'une largeur de vue quasi uniques."

Ultra Moderne Solitude - Alain Souchon

En 1988, tous nos otages au Liban furent libérés à l’exception de Michel Seurat décédé au cours de sa détention. La gendarmerie intervint à quelques jours du second tour à la grotte d'Ouvéa sans aucun discernement pour libérer des militaires pris en otage par des indépendantistes Kanaks, 2 militaires français furent tués ainsi que 19 Kanaks. Les enquêtes journalistiques ne font pas de doutes, sur des cas d’exécutions sommaires intervenues après l'assaut. Pour la première fois, Jean-Marie Le Pen réalisa un score à deux chiffres l'élection présidentielle, Charles Pasqua Ministre de l'intérieur parla alors   de valeurs communes avec le Front National. Toutes ces manœuvres de dernière minute n’empêchèrent pas Le candidat du Parti Socialiste François Mitterrand de remporter largement l'élection présidentielle.

En 1988, Nico, René Char, Pierre Desproges, Chet Baker, Edgar Faure, Alain Savary, Felix Leclerc, Pauline Laffont, Enzo Ferrari, Jean-Michel Basquiat, Françoise Dolto, Roy Orbison, Memphis Slim nous quittaient...

En 1988, la victoire de Mats Wilander (contre Henri Leconte), est la dernière d'un suédois au tournoi de Rolland Garros. L'exposition Coloniale de Erik Orsenna (le "nègre" du président) remporte le prix Goncourt. Naguib Mahfouz écrivain égyptien est le prix Nobel de littérature, les Casques bleus ont celui de la paix. Pelle Le Conquérant de Bille August est la palme d'or à Cannes, Au Revoir les enfants de Louis Malle remporte le césar du meilleur film et Le Dernier Empereur de Bernardo Bertolucci l'oscar du meilleur film.

Cette année là, la France chantait "Quand j'serai KO" d'Alain Souchon.

Comme nous souhaitons célébrer 1988 après avoir fêté 1981, Ultra Moderne Solitude d'Alain Souchon est  notre album de la semaine.


samedi 28 avril 2012

La régle du Jeu - Jean Renoir

Nous l'avions vu à plusieurs reprises par le biais d'un support DVD, mais rien ne vaut le visionnage sur le grand écran d'une salle de cinéma. Nous ne pouvons résister à cette "lapalissade", pour aimer les grands films d'aujourd'hui, il convient de connaître les grands classiques d'hier. Paris est pour cela une ville magique où au plein cœur de la cité, des petites salles résistent et proposent tout au long de l'année les chefs d’œuvre du 7eme Art.

François Truffaut parlait ainsi du film de Jean Renoir dans l'ouvrage "les films de ma vie": La règle du jeu (1939) c'est le crédo des cinéphiles, le film des films, le plus haï à sa sortie, le plus apprécié ensuite jusqu'à devenir un véritable succès commercial depuis sa troisième exploitation normale et en version intégrale. A l'intérieur de ce "drame gai", Renoir brasse sans en avoir l'air une masse d'idées générales, d'idées particulières et exprime surtout son grand amour pour les femmes. La Règle du Jeu est certainement avec Citizen Kane le film qui a suscité le plus le plus grand nombre de vocations de metteurs en scène, on regarde ce film avec un très fort sentiment de complicité, je veux dire qu'au lieu de voir un produit terminé, livré à notre curiosité , on éprouve l'impression d'assister à un film en cours de tournage on croit voir Renoir organiser tout cela en même temps que le film se projette pour un peu on se dirait: " Tiens, je vais revenir demain pour voir si les choses se passent de la même façon" et c'est ainsi qu'à regarder souvent la Règle du Jeu on passerait nos meilleures soirées de l'année.

Si nous avons cité François Truffaut si longuement c'est parce qu'il exprime parfaitement le plaisir que nous avons eu à revoir ce chef d’œuvre de l'avant guerre. Fortement influencé par les comédies de Molière, de Beaumarchais , ou par les caprices de Marianne de Alfred de Musset,  Renoir est aussi un amoureux de la commedia dell'arte (le Carrosse d'or un autre de ses grands films devenu malheureusement invisible en est la preuve évidente), il se place dans la filiation directe de ces génies pour écrire un vaudeville sur la haute bourgeoisie, comme il disait si justement "Quitte à prendre des maîtres, il vaut mieux les prendre grands".
Mais il ne concentre pas uniquement son regard sur la haute société, il va aussi dans les communs du château pour filmer les domestiques ; les histoires se confondent ainsi nous retrouvons les cocus à tous les étages. Comme le disait Boeldieu dans la Grande Illusion, "tout se démocratise!"

Mais le génie de Renoir n'est pas uniquement d'avoir signé un vaudeville de haut vol, il fait un tableau particulièrement juste de la société française des années 30 et de son antisémitisme ambiant, c'est assurément parce qu'il rend compte de tous les travers de la société française d'alors que le film fut si violemment rejeté. Il choisit Dalio pour incarner Le marquis De La Chesnaye lui donnant des origines juives qui nous sont révélées lors d'une discussion en cuisine "simplement que la mère De Le Chesnaye avait un père qui s'appelait Rosenthal et qui venait tout droit de Francfort, c'est tout!". Un "métèque" pour incarner un "aristocrate" un sacrilège pour la presse antisémite, notamment de "l'Action française ".

Enfin nous aurons une pensée pour Paulette Dubost disparue le 21 septembre 2011 à l'age de 100 ans, qui joue Lisette la camériste de Madame La Marquise, elle est admirable!

Nous avons vu la Règle du jeu de Jean Renoir à la filmothèque du quartier Latin

mercredi 25 avril 2012

Restaurant L'Aragon (Juillan)

Il serait dommage de passer par le Sud Ouest sans prendre le temps de goûter à la gastronomie du pays. Nous avons porté notre choix sur l'Aragon un restaurant situé à Juillan  au pied des Pyrénées entre Tarbes chef lieu des Hautes Pyrénées et Lourdes capitale de la Vierge Marie, nous avons opté pour le Menu du marché composé à partir de produits frais du jour:

Terrine de foie gras et mesclun à l'huile de noix
Pain perdu d'aubergine aux noix de Saint Jacques et coppa de porc noir
Carré d'agneau des Pyrénées juste rôti au jus aillé
Cœur Croulant de passion au chocolat, glace café et cannelé au rhum vieux, sorbet à la mangue.

Nous avons commencé notre repas avec un Jurançon Moelleux puis un vin du Madiran. Une vraie fête pour les papilles gustatives!

L'adresse vaut le détour sans aucun doute: Restaurant l'Aragon

lundi 23 avril 2012

L'enfant d'en Haut - Ursula Meier

Simon (12 ans) et sa grande sœur Louise partagent un appartement dans une tour de béton au pied d'une station de ski huppée au plein cœur des Alpes. Louise travaille par intermittence, mais c'est Simon qui subvient aux besoins du duo en commettant des vols dans la station de ski qu'il rejoint quotidiennement,organisant un marché noir de matériel de ski. Louise profite de ce commerce et devient ainsi dépendante des larcins de Simon, qu'elle considère pourtant comme un boulet dans sa vie...
Ce film s'inscrit dans la lignée des films consacrée à l'enfance, nous pourrions citer "zéro de conduite" de Jean Vigo, "les 400 coups" de François Truffaut ou encore "le petit voleur" de Jacques Doillon. Nous pourrions ainsi citer à l'infini des titres de film, tant l'histoire de cinéma est rythmée par cette thématique. Ici le propos renvoie aux Frères Dardennes, toute forme d'explication psychologique est bannie,ce sont des moments de déchainement physique qui sont parfois l'expression des sentiments.
Il est fort intelligent ce petit Simon, capable de mener une conversation en anglais avec les touristes,l’œil vif  toujours aux aguets pour dérober... C'est en toute confiance que le touriste laisse son matériel, le temps d'un café, d'un repas, persuadé d'être entre soi dans ce monde de privilégiés dont il ne voit pas les coulisses que nous livrent la caméra de Ursula Meier.
S'il fait la plupart du temps preuve d'une grande maturité pour son age, Simon n'en reste pas moins un enfant avec un besoin d'affection. Ce que lui refuse sa sœur, il cherche à le trouver auprès d'une touriste anglaise (Gillian Anderson de la série X files) ou d'un employé  d'un restaurant. Ce dernier le surprend en plein trafic, mais au lieu de le dénoncer il devient son complice. Il ment à chaque fois sur sa situation familiale que nous finissons par découvrir dans la dernière partie.Dans une des plus belles scènes du film, il obtient un câlin de Louise après en avoir négocié le prix.
C'est la fin de la saison, la neige fond, les saisonniers préparent "leur caravane" prêts à suivre les fortunés sur leurs prochains lieux de distractions. Simon désolé se retrouve seul, perdu avec sa sœur..
Ce film nous a quelque peu désarçonnés, nous nous y sommes ennuyés par moment lui trouvant certaines longueurs alors qu'il est d'une grande richesse. Nous ne révélerons pas le secret de cette relation qui fait le sel de ce film, mais il convient de souligner la performance plein de justesse de Kacey Mottet Klein et de Lea Seydoux (la petite actrice qui monte qui monte qui monte... c'est largement mérité tant elle démontre film après film une palette extraordinaire qui lui permet de tout incarner)

dimanche 22 avril 2012

Le musée des beaux-arts de Pau


Parce nous avions donné procuration pour remplir de nos devoirs citoyens, nous avons continué notre tournée des musées du Sud Ouest avec le Musée des Beaux Arts de Pau. Ce musée a la particularité d'avoir été le premier à acquérir une toile de Edgar Degas "Un bureau de coton à la Nouvelle Orléans".

Mais ce musée n'est pas exclusivement tourné vers le passé,, une partie importante laisse la place à des artistes contemporains. Nous voulons retenir notamment des toiles de l'Equipo Cronica un mouvement Pop Art Espagnol plutôt jubilatoire qui revisite les chefs d’œuvres de l'art ibérique, expression d'une opposition intérieure aux franquistes.


Mais évidemment nous ne pouvons pas éviter des artistes régionaux au pinceau plutôt lourd. Citons ici Eugene Deveria et son monumental "Naissance de Henri IV" totalement indigeste.

Dans le cadre de notre nouvelle collection "sublimes croutes" nous avons retenu trois tableaux

1) Lever de Lune - Guilermo Gomez y Gil (Malaga 1862 - Saragosse 1942)
2) La voix de Pan - Emile Aubry (Setif 1880 - Voutenay sur Cure 1964)
3) Triptyque de Jeanne d'Arc (René-Marie Castaing Pau 1896 - Tarbes 1943)



October - U2

Nous ne sommes pas des fans convaincus de U2, nous ne sommes pas non plus superstitieux. Alors pourquoi choisir le deuxième album de U2 October,  comme album de la semaine?

Tout simplement parce qu'il est sorti en 1981, alors nous avons envie de chanter Gloria en ce jour d'élection présidentielle, c'est aussi simple que cela! Nous superstitieux, pas du tout, juste prudent !

samedi 21 avril 2012

Philadelphia Story - George Cukor (1940)

Comme dans "His girl friday" de Howard Hawks, Cary Grant - C. K. Dexter Haven  part à la reconquête de son ex-épouse Tracy Lord  au moment où celle-ci doit se remarier. Pour arriver à ses fins, il s'allie à un duo de journalistes qu'il parvient à introduire dans la maison Lord. Tracy refuse tout reportage sur son futur mariage, mais les infidélités de son père que menace de révéler le journal people l'oblige à négocier... C.K Dexter Heaven trouve ainsi une porte d'entrée dans la maison Lord, la grande bagarre va pouvoir commencer...
Adapté d'une pièce de théâtre qui connut un grand succès à Broadway, George Cukor signe un sommet de la comédie sophistiquée et élégante. Servi par un trio fantastique Cary Grant, Katharine Hepburn  et James Stewart, cette comédie va bien au-delà du simple vaudeville, Cukor a un regard acerbe sur la haute-société de Philadelphie, c'est  une comédie de classe! 
Tracy Lord qui incarne la jeunesse dorée, narcissique et capricieuse va tomber de son piédestal durant ce week-end sous les coups de boutoir de son ex mari et de son père: "Tu as tout sauf l'essentiel : un cœur compréhensif et sans lui tu n'es qu'une statue de bronze, une poseuse sans cœur, une sorte de déesse sur un piédestal. (...) Tu pourrais être une femme extraordinaire, je méprise en toi quelque chose que tu ne veux pas changer ; ta sois disant force de caractère, ton intolérance. Tu ne seras jamais une femme à part entière tant que tu ne comprendras pas la faiblesse humaine."
L'armure craque, elle va entrer dans la vie. Les invités assisteront bien à un mariage.

Ce film est magique, 72 ans et il n'a toujours pas pris une ride, il est définitivement "yar" ! 

Nous nous souvenons que la première fois que nous l'avons vu c'était dans une salle de cinéma de la place Denfert Rochereau (Paris XIV). Nous l'avons revu dans le cadre de "2012, année de la comédie américaine"

vendredi 20 avril 2012

L'homme qui plantait des arbres - Jean Giono

Nous ne raconterons pas cette histoire, tout est dit dans le titre. Ce texte a été écrit par Jean Giono pour répondre à une commande du Reader's digest dans le cadre de sa rubrique "le personnage le plus extraordinaire que j'ai jamais rencontré".
Ce court texte qui est une pure merveille eu droit aux louanges de la rédaction du périodique jusqu'à ce qu'elle découvre que le personnage sortait tout droit de l'imagination de l'auteur. Il se fit traiter d'imposteur.
"Giono trouvait la situation cocasse, mais ce qui dominait en lui à l'époque, c'est la surprise qu'il puisse exister exister des gens assez sots pour demander çà un écrivain, donc inventeur professionnel, quel était le personnage le plus extraordinaire qu'il ait rencontré, et pour ne pas comprendre que ce personnage était forcément sorti de son imagination..."

Nous remercions vivement la rédaction du Reader's digest d'avoir passé une telle commande à Jean Giono, car nous nous sommes régalés de sa sublime "imposture" qui commence ainsi:

"Pour que le caractère d'un être humain dévoile des qualités vraiment exceptionnelles, il faut avoir la bonne fortune de pouvoir observer son action pendant de longues années. Si cette action est dépouillée de tout égoïsme, si l'idée qui la dirige est d'une générosité sans exemple, s'il est absolument certain qu'elle n'a recherché de récompense nulle part et qu'au surplus elle ait laissé sur le monde des marques visibles, on est alors, sans risque d'erreurs, devant un caractère inoubliable."

Nous dédions cette histoire écologique à Eva Joly, nous n'avons pas aimé pas la manière dont elle a été traitée tout au long de cette campagne électorale.

jeudi 19 avril 2012

Pau - La maison natale Jean-Baptiste Bernadotte

Le château de Pau est là pour nous rappeler que c'est ici que naquit celui qui allait devenir Henri IV, Roi de France. Un drapeau suédois accroché au fronton d'une vieille maison béarnaise indique qu'un autre enfant  de la ville Jean-Baptiste Bernadotte connut un destin extraordinaire. Né roturier dans une modeste famille paloise, sa carrière va le mener sur le trône de Suède. Le musée nous donne un document un brin hagiographique nous contant ainsi son histoire:

Jean-Baptiste est le cinquième enfant de la famille Bernadotte, il nait le 26 janvier 1763. Le père Henri Bernadotte occupe un modeste office de procureur auprès du sénéchal, le représentant local du roi. On destine Jean-Baptiste comme son ainé Jean à la magistrature. Aussi dés 15 ans, il étudie le droit chez Maître Batsalle le procureur au parlement de Navarre.

En 1780 son père meurt laissant les siens sans ressources. Jean-Baptiste s'engage alors au régiment "Royal la marine". Malgré d'évidentes qualités, sa condition de roturier ne lui permet pas d'aspirer atteindre un grade d'officier. La Révolution Française va cependant donner au sergent "belle jambe" l'opportunité de mener une extraordinaire carrière.

Adjudant en 1790, Il est promu général de brigade quatre ans plus tard, après la victoire de Fleurus. Il combat alors dans "l'armée du Rhin", puis dans celle de "Sambre et Meuse" aux cotés de Jourdan, Kléber, Marceau...
En 1797, le Directoire le charge de conduire des renforts en Italie, où il se retrouve sous les ordres de Napoléon Bonaparte avec qui il ne s'entend guère.

1798 voit Bernadotte ambassadeur à Vienne la capitale autrichienne, durant deux mois seulement. En effet, suite à une émeute, il quitte la ville dans laquelle il a rencontré Beethoven. De retour à Paris, il fait la connaissance chez Joseph Bonaparte, de Désiré Clary ancienne "fiancée" de Napoléon. Il l'épouse  et de cette union naît l'année suivante Oscar leur unique enfant. La même année Bernadotte refuse de participer au coup d'état du "18 Brumaire", au cours duquel Napoléon s'empare du pouvoir.
Quelque peu à l'écart des affaires politiques et militaires du pays, inquiété lors des complots visant le premier consul, il se rallie à l'empire en 1804. Promu Maréchal, il devient par faveur impériale prince de Ponte-Corvo en 1806. C'est cette même année qu'à Lubeck, sa générosité envers des prisonniers suédois va influer sur sa destinée.
En effet en 1810 il est élu prince héritier par la diète de Suède, qui pense ainsi plaire à Napoléon. Adopté par le roi Charles XIII, il prend le nom de Charles-Jean.

En 1812 il refuse d'accompagner Napoléon lors de la désastreuse "campagne de Russie".
En 1813 il participe à la 6ème coalition contre la France et, après "la bataille des Nations" à Leipzig, il entre au Danemark obligeant ce pays à céder la Norvège à la Suède lors du "Traité de Kiel le 14 janvier 1814.
Après le retour d'Elbe de Napoléon, la Suède n'est pas tenue de combattre auprès des coalisés; Charles-Jean engage dès lors son pays sur la voie de neutralité.

A la mort de son père adoptif en 1818, Bernadotte devient roi de Suède et de Norvège sous le nom de Charles XIV Jean. Après un grand règne, marqué toutefois par des problèmes récurrents en Norvège, et une fin rendue un peu difficile par la faute de son conservatisme, il s'éteint le 8 mars 1844 à l'âge de 81 ans."


Si la modeste demeure du futur roi correspond au deuxième étage de la maison, l'ensemble a été racheté par la Ville de Pau avec l'aide du royaume Suède pour ainsi proposer une exposition complète sur les descendants du trône, la famille n'a pas  oublié ses origines et honore régulièrement la demeure de ses visites.
Difficile tout de même de savoir ce que fut réellement le règne de Bernadotte. Fut il un grand roi? La visite ne nous donne pas beaucoup d’éléments historiques pour se faire un jugement, elle se termine par une série de portraits de l'actuelle famille royale. La princesse  Victoria héritière depuis la suppression  de la loi Salique, votée en 1980 semble bénéficier auprès de l'opinion publique d'une grande popularité.



mercredi 18 avril 2012

Elena - Andrei Zvinguatsiev

Le film s'ouvre sur de longs plans fixes dans un appartement cossu qui n'a rien de soviétique, nous pouvons nous imaginer dans la capitale Moscou mais rien ne nous l'indique. Nous assistons au lever d'un couple Elena et Vladimir dont on apprend rapidement qu'ils ont chacun un enfant de leurs précédents mariages, enfants qui semblent le point d’achoppement de leur couple qui donne pourtant une image de bonne entente. Le petit déjeuner terminé, Elena part dans une banlieue déshéritée pour retrouver son fils  vivant dans un appartement relevant lui clairement de la période soviétique, situé dans le proche voisinage d'une centrale nucléaire.  Son fils sans emploi a deux enfants, il passe sa journée entre la console de jeux et sa télévision, vidant des canettes de bière, comptant sur sa mère pour subvenir aux besoins de sa famille. Vladimir est usé de voir sa femme sans cesse rackettée par son fils, il ne veut plus les financer alors qu'ils ont un besoin urgent d'argent pour éviter au petit fils de faire son service militaire. Elena reproche à Vladimir son comportement alors qu'il finance de son coté la vie oisive et festive de sa fille. Vladimir fait un infarctus au cours d'une séance de sport, cela donne de nouvelles perspectives à Elena...

C'est un film noir où l'on ne sort jamais du cadre familial, mais par ce prisme, Andrei Zvinguatsiev réussit la gageure de faire un portrait social de la Russie contemporaine. Pays coupé en deux où les classes moyennes semblent absentes, d'un coté des privilégiés vivant dans des appartements à l'architecture contemporaine aux lignes épurées, de l'autre les désœuvrés dans les immeubles vétustes et sans confort de l'époque soviétique. C'est finalement la télévision qui réunit la société russe, allumée en permanence devant les matchs de football, les jeux télévisés et autres émissions de téléréalités, ils sont tous captivés par ces images identiques à celles des écrans occidentaux... Filmée par de long plans fixes au cadrage impeccable, on découvre une Russie dévorée par les démons de la société de consommation qui semble signer la mort de l'âme russe.

Le Musée des Hussards - Tarbes

 C'est un peu par hasard et parce que la météo s'avère peu clémente que nous nous retrouvons à Tarbes, le jour même de la réouverture du Musée des Hussards situé au cœur du jardin Massey, sublime parc. Et c'est finalement avec une certaine réjouissance que nous nous lançons dans une tournée des musées provinciaux.
Si la ville de Tarbes possède une collection sans équivalent sur les hussards, c'est qu'elle fut une terre d'élevage de chevaux dont le "tarbais" .
Hussard mot d'origine hongroise est un corps d'armée composé de cavaliers qui connut son heure de gloire avec les guerres napoléoniennes. Mais ces troupes eurent aussi à accomplir de basses besognes durant la commune de Paris, et les années suivantes pour réprimer des mouvements sociaux. Son dernier baroud d'honneur, elle le mena en 1940 où les hommes partirent à l'assaut des chars ennemis, ils firent preuve d'un grand courage et ne mirent fin au combat que sur ordre.
La collection est composée d'uniformes et d'armes venus de toutes les armées européennes mais également de l’armée américaine, les couleurs finissent par disparaître avec le début de la guerre de position après novembre 14 . Les costumes  prussiens font un drôle d'effet avec une sinistre tête de mort pour ornementer leur colback .


En passant par les salles consacrées aux collections de tableaux, nous venons à nous découvrir une passion pour les peintures des musées de province, et nous avons le désir de nous lancer dans un florilège des "plus resplendissantes croutes" découvertes lors de nos différentes visites.
Nous avons retenu pour ouvrir cette nouvelle collection une toile de Jean-Leon Gerome "Idylle, l'innocence ou Daphnis et Chloe" de l'école française du XIX éme.



mardi 17 avril 2012

Toulouse - Musée des Augustins - Chez Elle



Le musée des Beaux Arts de la ville de Toulouse a été installé dans l'ancien couvent des Augustins, bel exemple d'architecture méridionale datant pour sa majeure partie des XIVème et XVème siècles .Un fois l'accueil passé,  vous tombez immédiatement sur un magnifique cloitre,  nous pouvons dire que c'est sans doute la plus belle partie du musée . Mais ne soyons pas injustes, reconnaissons que la salle des capitulaires est splendide, dédiée aux sculptures de style gothique; notre préférence va aux représentations de l'enfer qui témoignent parfaitement des peurs d'alors. A l'étage,  est rassemblée une collection de chapiteaux de l'époque romane (XII°siècle) d'une richesse incroyable et relatant différents épisodes de l'histoire sainte.La salle déserte nous laisse un temps infini pour admirer le travail d'une rare finesse  , nous pouvons y voir une première tentative de raconter la Bible en bandes dessinées.
Les sculptures du XIXème sont à oublier. Au niveau de la collection des peintures, nous retiendrons le portrait de la baronne Crussol par Elisabeth Louise Vigée Le brun ou le pont du Rialto de Francesco Guardi, mais aussi une toile de Toulouse Lautrec ou de Delacroix, par contre nous oublierons vite un tableau de Manet d'une platitude déconcertante. Il n'est pas fait grand effort pour  exposer une succession de croutes affligeantes, tableaux d'un académisme confondant,  les reflets nous empêchent d'en avoir une vision complète, ce n'est pas un mal. C'est assurément le point faible du lieu .

Mais lors de cette journée toulousaine, nous avons vécu un petit miracle, nous nous sommes régalés pour la modique somme de 10 € dans un petit restaurant " Chez elle", produits frais, desserts maisons, le tout servi par des dames charmantes... le tout situé 10 place Occitane. A retenir !

lundi 16 avril 2012

La terre outragée - Michale Boganim

26 avril 1986, Pripiat, cité ouvrière  "modèle", aux abords de la centrale nucléaire de Tchernobyl, Anya et Piotr célèbrent leur mariage, Valéry plante un arbre, un pommier  au bord du fleuve avec son père Alexei un ingénieur travaillant à la centrale, Nikolai le garde forestier fait sa tournée, la ville se prépare à une grande fête le premier mai devant inaugurer un parc d'attraction ... Scènes idylliques, puis tout bascule dans l'horreur, la pluie se met à tomber, Piotr est obligé d'abandonner sa soirée de mariage, réquisitionné pour aller éteindre un incendie, Alexei vite informé de la réalité est pris de panique... Au départ les habitants ne comprennent pas la gravité de la situation qu'ils réalisent à l'arrivée  des militaires venus les  évacuer, Pripiat devient une ville morte...
Dix ans plus tard, Anya (magnifique Olga Kurylenko) qui n'a jamais revu son mari est devenue guide de la zone interdite pour des touristes français visitant cette citée morte comme on visite Pompéi. Elle sait bien qu'il n'y a rien à voir  durant cette escapade  mais elle répond poliment aux questions et laisse le temps à chacun  de prendre en photo les ruines de la ville et sa grande roue qui n'a jamais fonctionné . Elle finit par vivre une histoire d'amour avec un français qui souhaite l'épouser, mais la jeune femme reste irrésistiblement attachée à sa terre, impossible pour elle d'imaginer une autre vie, des enfants...
C'est avant tout un film de sensation, de désolation, il est tout sauf spectaculaire, c'est à travers l'intimité d'une femme que Michale Boganim nous fait comprendre tout le désastre de la catastrophe qui a condamné les habitants à un exil intérieur . Un film bouleversant !

L'homme sans postérité - Adalbert Stifter

Victor, un orphelin est en âge de travailler, il doit quitter sa mère et  sa sœur nourricières Hannah pour rejoindre son poste de travail. Mais avant cela, il doit rendre visite à son Oncle qu'il ne connait pas. Il sait qu'il vit seul dans un domaine coupé du monde situé sur une ile au milieu d'un lac en plein cœur des montagnes autrichiennes. Son oncle a exigé de lui qu'il se rende au domaine à pied, connaissant les vertus initiatiques de l'itinérance. Après plusieurs jours de randonnée, Victor découvre un personnage muré dans le silence, qui va le retenir prisonnier dans ses lieux où le temps semble s'être arrêté... Les deux hommes muets vont s'observer, se mesurer,  , puis les langues se délient. L'oncle raconte ses expériences de la vie à Victor, celui ci finit par prolonger son séjour, il profite de l'ile, contemple la nature environnante, ce temps de solitude se révèle être un temps d'apprentissage ... Quand il repart de chez son oncle, il est définitivement entré dans l'age adulte.
Adalbert Stifter, nous l'avons découvert à travers le livre "Ce qu'aimer veut dire" de Mathieu Lindon qui en faisait l'éloge  Né en 1805, dans une famille de Paysans à Oberplan au fin fond de la Bohème alors rattachée à l'Autriche, Adalbert Stifter après des études juridiques obtient un poste d'inspecteur des écoles, il partage son temps libre entre l'écriture et la peinture, ses deux passions.  Malade, se sachant condamné, il choisit de se trancher la gorge à l'aide d'un rasoir, il meurt en 1868. 
La lecture de ce court roman est particulièrement envoutante, il ne se passe pas grand chose, l'auteur faisant de la contemplation une activité vertueuse... Nous détestons au premier abord cet oncle, figure du misanthrope pour découvrir en même temps que le héros sa sagesse et sa bonté... Ce livre est un manuel d'apprentissage humaniste rappelant toutes les vertus initiatiques du voyage en solitaire et à pied de préférence. Nous sommes tombés sous le charme de la prose d'Adalbert Stifter, écrivain trop méconnu mais qui garde  un cercle d'indéfectibles admirateurs. Nous voila prêt à rejoindre leur rang.
"Un miracle de l'écriture, l'histoire d'un cœur qui a vu du pays." écrivait Mathieu Lindon, après cette lecture, nous comprenons la justesse de ces mots. C'est un chef d’œuvre !

Cette lecture nous a donné l'envie d'écouter la musique de Ludwig Van Beethoven, nous avons choisi ses œuvres pour piano et violoncelle interprétées par Pierre Fournier et Wilhelm Kempff

dimanche 15 avril 2012

End Of The Century - The Ramones

"Elle se sentait belle avec lui. Il adorait ses parodies de filles sexys de clip et qu'elle soit la seule fille à avoir des vinyles des Ramones et elle aussi boudait les Clash."Le texte en voix off du film  "nouvelle donne" de Joachim Trier nous a donné l'envie de ressortir de son étagère l'album  End Of the Century, cinquième album du groupe New-Yorkais produit par le mythique Phil Spector. La légende veut que les séances d'enregistrement se déroulèrent dans une ambiance tendue avec le producteur connu pour ses accès de violence.
Nous voulons bien croire la légende, nous avons du mal à nous imaginer une ambiance "tisane verveine" pour l'enregistrement d'un album  des Ramones, précurseurs de la musique Punk.

End Of The Century (1980) est notre album de la semaine !


samedi 14 avril 2012

Colonel Blimp - Michael Powell et Emeric Pressburger


Le colonel Blimp est un personnage inventé par la caricaturiste anglais David Low, il fait de cet officier de l'armée Anglaise une vieille baderne à l'esprit obtus, colonialiste, xénophobe.

Michael Powell et Emeric Pressburger se sont inspirés du personnage de David Low pour écrire le biopic de Clive Candy, Officier de l'empire anglais. Sa carrière  commence avec la guerre des Boers pour se terminer au moment de la deuxième guerre mondiale.
 Jeune officier intrépide, lors d'une permission il n'hésite pas à partir sur un coup de tête à Berlin pour défendre l'honneur de l'armée anglaise attaqué par un allemand qu'il a eu l'occasion de croiser en Afrique du Sud. Il insulte publiquement l'armée allemande, dans un café berlinois. Il  met les services diplomatiques de l'ambassade anglaise dans l'embarras, ils ne peuvent lui éviter un duel avec un officier de l'armée allemande Theo Kretschmar-Schuldorff . Les deux  hommes sont blessés, ils doivent être hospitalisés. Ce temps de convalescence leur permet de devenir amis, Théo épousant Edith Hunter la jeune anglaise venue jouer la garde malade  de l'officier anglais. La première guerre sépare les deux amis mais ils se retrouvent lors de la suivante, Theo venant chercher l'asile à Londres dés 1934 ne pouvant supporter le régime nazi.
Persuadé naïvement que l'armée anglaise est toujours resté fidèle à un esprit chevaleresque où tout officier est un gentleman, notre homme est déstabilisé par les guerres totales du XX° où il n'y a plus de lois, tous les mauvais coups sont permis. Il finit complétement dépassé par les évènements après le repli de Dunkerque, il est définitivement mis au placard !
 Sarcastique, romantique, tendre, le portrait fait de ce soldat et de son amitié avec un collègue allemand servi par un technicolor flamboyant détonne dans cette période de guerre où le genre est au film de propagande où l'humour n'a pas de place... Il s'attira d'ailleurs les foudres du War Office et de Winston Churchill, mais malgré tout ilput sortir en juin 1943 avec comme slogan publicitaire "Venez voir le film interdit!". 
Le propos est pourtant limpide, la condamnation du nazisme est sans ambiguïté. Et au moment où la France place son destin entre les mains d'une de ses vieilles badernes, l'Angleterre a la sagesse de mettre la sienne au placard. Dés la première scène, les deux auteurs donnent le ton du film qui n'est pas sans rappeler le meilleur de Lubitsch, nous sommes en 43 en plein conflit mais il n'y a pas de raison que les anglais renoncent à leur humour inimitable mais envié de tous. A noter la présence magique de Déborah Kerr, la seule a gardé miraculeusement sa jeunesse durant ces quarante années ... Ce film est un chef d’œuvre!

Nous sommes allés voir à la filmothèque du quartier latin (rue Champollion), Colonel Blimp de Michael Powell et Emeric Pressburger dans une version restaurée. Retourner dans cette salle est toujours un plaisir, c'est la première salle de cinéma que nous avons fréquentée à Paris, c'était pour voir " I was a male war bride" de Howard Hawks, nous y avons également vu des films de Orson Welles, Ingmar Bergman , Joseph L. Mankiewicz... C'est en quelque sorte un lieu fétiche!

vendredi 13 avril 2012

Antigone de Sophocle - Théâtre National de Palestine


Œdipe, sans le savoir, a tué son père, épousé sa mère, Jocaste. De cette union, sont nés quatre enfants, deux jumeaux, Polynice et Eteocle et deux filles Antigone et Ismène. Quand Œdipe découvre la vérité, il se crève les yeux, la malédiction se perpétue ...

La pièce commence au moment où Antigone  vient demander à sa  sœur Ismène de l'aider à donner une sépulture à son frère Polynice. Ce dernier a marché sur Thèbes pour reprendre le pouvoir à Etécole; après une lutte acharnée, les deux frères ont succombé. .
 Parce qu'il a attaqué la cité, à la tête d'une armée étrangère, Creon Roi de Thébes refuse à Polynice une sépulture, livrant son corps aux chiens et aux vautours... Antigone brave le décret , elle  refuse de voir  la loi divine  céder devant la loi humaine  au caractère relatif et précaire.

Créon: Ainsi tu as osé passer outre à ma loi?
Antigone: car ce n'est pas Zeus qui l'avait proclamé. Ce n'est pas la justice, assise aux cotés des dieux infernaux; non , ce ne sont pas là les lois qu'ils ont jamais fixées aux hommes, et je ne pensais pas que tes défenses à toi fussent assez puissantes pour permettre à un mortel de passer outre à d'autres lois non écrites, inébranlable des dieux...

(....)

 Creon: L'ennemi même mort n'est jamais un ami.
Antigone: Je suis de ceux qui aiment non de ceux qui haïssent.

 Créon d'une colère noire la condamne à être emmurée vivante, et  reste sourd à toute défense...Il ne cède  ni devant son fils venu plaider la cause de sa fiancée, ni devant le messager de Dieu qui lui rappelle la loi ... Il découvre trop tard son erreur, il ne peut plus échapper à la malédiction divine, la mort l'entoure de tous cotés...

Sobriété du décor, costumes contemporains, superbement accompagnée par la musique du  trio Joubran, Antigone s'installe dans notre présent.On peut imaginer quel écho peut avoir cette pièce dans l'esprit de ces acteurs palestiniens. Elle parle de leur quotidien, nous sentons une intensité particulière dans les mots du poète grec, dit dans une langue inconnue pour nous, l'arabe par des hommes et des femmes confrontés quotidiennement à l'arbitraire et à l'injustice. Le message est sans ambiguïté, ne pas renoncer devant la raison d'Etat aux valeurs universelles de l'humanisme. Naître palestinien ne doit pas être une malédiction.

Antigone montre la voie: Résister. Dans un monologue poignant,elle exprime ses regrets de ne pas vivre ses joies de femmes, elle accepte la mort.

 Le texte est terrible, il glisse inexorablement vers la tragédie alors même que Sophocle propose des solutions, appelle au dialogue, au langage de raison, Creon reste sourd,  il devient un tyran fermé à toutes négociations. Au delà du problème des territoires palestiniens, les événements du printemps arabe montrent toute la puissance de ce texte, il traverse le temps, les frontières ... Dans toutes les périodes troubles de l'histoire, la figure d'Antigone reste une inépuisable source d'inspiration

"Quand la loi n'est pas juste, la justice doit passer avant la loi" avons nous mis en exergue de notre blog, reprenant là une phrase du dernier film de Jean-Luc Godard (dont on peut penser qu'il est allé se servir dans une de ses lectures, et plus surement chez Pascal), c'est là toute la problématique de la pièce de Sophocle.

C'etait un moment rare, chargé d'une émotion partagée entre acteurs et spectateurs, un grand moment de Théâtre ! Des acteurs formidables, une mise en scène de  Adel Hakim.


mercredi 11 avril 2012

Raymond Aubrac

Il est né le jour même de la mort de Jean Jaures le 31 juillet 1914, il disparait quasiment le même jour que Ahmed Ben Bella le premier président de l'Algérie indépendante. Aucun doute, la vie de Raymond Aubrac né Samuel est marquée par l'histoire. Il était le dernier survivant du groupe de Caluire mais il eut la chance d'avoir une femme exceptionnelle, amoureuse folle suffisamment intrépide pour aller chercher son homme aux mains des tortionnaires nazis . Raymond Aubrac et son épouse Lucie sont assurément le plus beau couple de l'histoire contemporaine, ils ont notre admiration!

La résistance était un combat contre l'occupant nazi, c'était aussi une certaine idée de la France comme peut le témoigner le programme du Conseil National de la Résistance qui mit en place à la libération une politique sociale innovante. C'était un temps où le patronat compromis, terrorisé par la peur d'une révolution communiste, ne pouvait afficher son arrogance, le progrès social fut possible. Ces temps ont bien changé, Denis Kessler représentant du Medef a sans aucun scrupule demandé l'abrogation des mesures du CNR, le détricotage de cette politique sociale. Les Voix de Raymond Aubrac et de Stéphane Hessel se sont alors élevées pour faire part de leur indignation.

Le temps passe et ses voix viennent à se taire, alors il est maintenant de notre devoir de défendre leur héritage, leurs combats, leurs victoires. Nous le devons à ces grands hommes!

mardi 10 avril 2012

A l'ouest - Nathalie Fillion (Théâtre Jean Arp)

C'est une histoire de famille que vient nous raconter Nathalie Fillion. Tout commence avec les deux petits enfants qui viennent alerter leur grand mère, leur père débloque et se met à dépenser à tout va, il a même l'intention de vendre la maison familiale à La Baule Les Pins. Il ne faut pas pour autant accuser sa nouvelle "petite amie", une étudiante bien plus jeune que lui, où les enfants d'une précédente compagne qui sont restés vivre chez lui bien qu'il ne soit pas leur père... Ce comportement nouveau serait la conséquence de son nouveau traitement contre la dépression, il a tout simplement l'envie de balancer son capital pour se libérer des liens du sang. Les enfants s’inquiètent  un peu mesquinement à vrai dire de voir ainsi le capital familial fondre comme neige au soleil dans cette famille où la "pingrerie" est plutôt la règle, quand l'argent est en jeu la parole se libère. Cela fait un petit moment que la grand-mère n'a pas vu son fils, fâché avec son père. Ce dernier, frappé depuis peu de la maladie d'Alzeihmer est un peu "à l'ouest" mais il n'est pas le seul...

C'est une situation très contemporaine que décrit Nathalie Fillon, à travers la chronique de cette famille recomposée, l'action est clairement située dans la crise financière de 2008... Famille bourgeoise qui a du bien qui fait partie des victimes de Madoff, ils finissent tous par se  retrouver dans la maison familiale de La Baule. Les téléphones portables sonnent, la connexion wifi n'est pas toujours là, il faut choisir entre les antidépresseurs, aucun doute c'est de nous qu'il est question, et d'ailleurs le public est clairement pris à témoin

Quel beau texte, les mots sonnent toujours juste, ils donnent au propos toute sa force pour autant aucun personnage n'est une caricature, un archétype. A travers ce dialogue où trois générations  se retrouvent confrontées, les problèmes de notre temps sont clairement posés, la grand mère découvre sa tolérance et accepte les nouveaux us et coutumes de la nouvelle génération, les plus jeunes se retrouvent démunis face à la maladie de leur aïeux. Que faire de ce grand père de plus en plus déconnecté? Ce personnage du grand père alzheimerien est tout simplement exceptionnel, nous ne doutons pas que Nathalie Fillion a du s'informer grandement sur les dégâts de cette maladie pour être si précise dans son écriture.  Un des plus beaux passages est ce moment ou il  se met à parler sans hésitation en grec ancien , instant d'une grande intensité contenue, car l'auteur garde toujours la distance nécessaire avec ses personnages et ne se laisse pas emporter par l'émotion facile. 
C'est drôle, caustique, on ne s'ennuie pas une seconde, les huit acteurs sont absolument remarquables et jouent tous à l'unisson servis par une mise en scène taillée sur mesure c'est donc jubilatoire, tout sonne juste... Ce sujet, nous avons plutôt l'habitude de le voir traité au cinéma avec plus ou moins de bonheur, c'est ce que l'on a tendance à nommer "film choral", nous pourrions citer par exemple les films de Claude Sautet. Mais à la différence du cinéaste, le regard est ici plus poétique que social!

Il existe d’excellents textes de théâtre de contemporain, ils méritent de vivre  et d'avoir assurément une plus grande exposition!

A l'ouest, une pièce de Nathalie Fillion à découvrir !

dimanche 8 avril 2012

Nouvelle Donne - Joachim Trier

Tout commence le 17 mai, jour de fête nationale en Norvège où les enfants défilent dans les rues, Philip et Erik deux amis, deux écrivains en herbe déposent chacun dans une boite aux lettres un manuscrit  . C'est Philip qui est édité avec succès, la vie semble sourire à ce jeune homme qui aime aller aux concerts de rock avec son indéfectible bande de copains... Au cours de ces soirées, il croise une jeune fille Kari en couple avec le guitariste du groupe mais plus pour longtemps... Nous reprenons ici la voix off:

"Dans 10 secondes, elle le regardera. 10, 9, 8, 7, 6, 5, 4, 3, 2, 1...
Le lendemain, il l'entrainera à Paris. Son humour sarcastique la faisant pouffer de rire. Il lui dit que cela la défigurait ce qui décupla ses rires. Elle se sentait belle avec lui. Il adorait ses parodies de filles sexys de clip et qu'elle soit la seule fille à avoir des vinyles des Ramones et elle aussi boudait les Clash
"

Arborant un tee shirt noir à l’effigie de l’album "The Queen is dead" des Smiths, il traverse une rue, insouciant sans quitter sa belle des yeux, il est brutalement renversé par une voiture qu'il n'a pas vu venir. Miraculeusement il se relève sans blessure ... mais Philip n'est plus comme avant, il sombre dans la dépression. De retour à Oslo il est hospitalisé après s'être mutilé.
"Selon le médecin sa passion pour Kari avait déclenché une psychose. On déconseilla à Kari d'aller le voir."

De ce séjour à l’hôpital psychiatrique, Philip  ressort accompagné de ses amis mais il ne retrouve pas le goût à la vie. Il est incapable d'écrire alors que son ami Erik connait à son tour le succès, il repart à Paris accompagné de Kari comme pour essayer de reconstruire ce qui a été détruit...

Ce premier long métrage de Joachim Trier est imprégné de culture française, non seulement le cinéaste reprend dès les premiers plans du film le thème de Camille de Georges Delerue entendu dans"le mépris" de Jean-Luc Godard mais il montre également des photos de Marguerite Duras, il cite le nom de Maurice Blanchot, il filme longuement Paris, ville d'évasion pour ces jeunes norvégiens qui viennent y vivre leur amour et chercher l'inspiration. 
Mais au-delà de ces clins d’œil, son film lui même est fortement inspiré de "Comment je me suis disputé ma vie sexuelle.." de Arnaud Desplechin ... Il faut reconnaitre que le cinéma français a particulièrement bien traité et assurément mieux que le cinéma américain cet âge de la vie où il faut quitter son statut insouciant d'étudiant pour trouver une place dans la vie active, ce moment que Pascale Ferran a si justement qualifié "l'age des possibles". Période difficile, compliquée propice à la révélation de toutes les faiblesses psychologiques, où il faut parfois renoncer à ses idéaux de jeunesse... C'est de cela que vient nous parler Joachim Trier à travers le portrait d'un groupe  issu de la jeunesse dorée norvégienne  nourrie par les groupes de rock: Joy Division, New Order, Le Tigre...nous pourrions parler de génération "inrockuptibles" nourrie de références culturelles, ils aiment l'humour potache, les soirées arrosées, ils ont  le goût pour la provocation, aimant choquer les  filles.
Du film de Arnaud Desplechin, il reprend  les principes de narration non linéaire sans pour autant perdre le spectateur dans les méandres de la vie des personnages, usant avec pertinence de la voix off.
"Comment je me suis disputé ma vie sexuelle..." est pour nous un film essentiel parce qu'il parle de notre génération, quelque part c'est notre film, celui dont nous gardons en mémoire le choc ressenti lorsque nous l'avons vu pour la première fois dans une salle du quartier de l’Odéon. Nous le revoyons régulièrement avec une émotion jamais démentie. C'est un film bavard, très bavard... les mots sont omniprésents mais c'est  par l'image qu'ils prennent leur sens. Arnaud Desplechin y renouvelle le langage cinématographique.
Le film de Joachim Trier tout aussi romanesque que pouvait l'être celui du cinéaste français est d'une richesse incroyable, peut être pas aussi abouti que son deuxième long métrage "Oslo, 31 août", il démontre  toute la vigueur du cinéma européen dans la filiation revendiquée de celui de la nouvelle vague française

Un film à voir et à revoir!

Revolver - Let Go

Messieurs, Mesdames du Ministère de l'Intérieur.

Si nous avons écrit le mot revolver ce n'est pas pour faire l'apologie des armes à feu.   Revolver  est un groupe de musique pop français, leur nom est un hommage à l'album éponyme des Beatles;  ces jeunes gens ont grandi au son de la musique du quatuor de Liverpool. Leur musique est un vrai moment de légèreté et de bonheur dans ce printemps alourdi par une campagne électorale désespérément creuse. Prenez le temps d'écouter 49 States, vous oublierez tous vos soucis, nous vous garantissons  une humeur radieuse après cette écoute.

Vous pourriez reprocher à ces jeunes gens de ne pas faire usage de leur langue maternelle, d'autant plus que le "grand" Dominique A a démontré qu'il n'y avait pas d'impossibilité à faire de la pop musique dans la langue de Molière...  Nous avons si longtemps fustigé l'enseignement de l'anglais dans l'éducation nationale, nous aurions mauvais goût de venir nous plaindre maintenant que des jeunes gens viennent à chanter dans la langue de Shakespeare qui doit leur permettre de conquérir l'Amérique et de réduire le déficit de notre balance commerciale...

Let Go  de Revolver est notre album de la semaine. Gloire à eux !

vendredi 6 avril 2012

La belle Hélène de Jacques Offenbach par l'Opéra Eclaté

L'action de La belle Hélène se situe juste avant la guerre de Troie, au moment où Ménélas se fait voler sa femme par Pâris. Mais tout ceci n'est qu'un prétexte pour le maître de l'opéra bouffe de se moquer de la bonne société du second Empire. Assurément la pièce la plus drôle du répertoire d’Offenbach qui ne recule devant rien, ni les bons jeux de mots, ni les anachronismes pour se moquer des puissants.

Joué par la compagnie de l'opéra éclaté dans une mise en scène de Olivier Desbordes, c'est un spectacle plein de rythme et d'inventivité qui emporte sans peine le rire du spectateur enthousiaste, ils n'ont pas hésité à jouer sur le coté farce du propos ils ont eu raison.  On rit énormément, Brigitte Antonelli en Hélène, Eric Perez en Calchas, Raphael Bremard et son faux air de Olivier Besancenot en Pâris sont impeccables ainsi que le reste de la troupe, les parties chantées sont connues de tous, elle font partie du patrimoine commun... C’était le spectacle parfait, drôle et enjoué pour débuter un long week-end!

La Belle Hélène de Jacques Offenbach
Opéra Bouffe en trois actes
Livret de Henri Meilhac et Ludovic Halévy
Direction Musicale Dominique Trottein et Joël Suhubiette

La compagnie Opéra éclaté.

mercredi 4 avril 2012

Les adieux à la Reine - Benoit Jacquot

Versailles le 14 Juillet 1789 et les jours suivants. Sidonie Laborde (Lea Seydoux) est la lectrice de la Reine (Diane Kruger), une lectrice dévouée toujours prête pour répondre aux convocations et aux caprices de sa majesté  à qui elle voue une admiration sans limite. La duchesse de Polignac (Virginie Ledoyen) amie favorite de la Reine est particulièrement visée par la colère du peuple qui lui reproche (à juste titre d'ailleurs) d'avoir bénéficié des largesses de son amie, la reine la supplie de se réfugier à l'étranger.  Marie-Antoinette demande à Sidonie Laborde  d'accompagner son amie dans sa fuite en prenant son identité  pour la protéger. Obéissante, la lectrice désabusée fait ses adieux à la reine.

L'intrigue adapté du roman de Chantal Thomas n'est pas bien épaisse, mais elle n'est qu'un prétexte à filmer un régime en déroute, nous nous étendrons pas ici sur la nature de la relation entretenue entre la Reine et sa favorite la Duchesse de Polignac... Roberto Rosselini avait filmé avec distance la prise de pouvoir par Louis XIV, épisode situé à la mort de Mazarin qui marque le début du pouvoir personnel du Roi, apogée de l'absolutisme de droit divin... Benoit Jacquot clôt  ce chapitre de l'histoire de France, filmant ses personnages au plus prêt au moment où le pouvoir se délite  ... Nous les retrouvons bien là ces nobles que Louis XIV voulait garder sous sa coupe, préférant vivre dans l'inconfort de Versailles plutôt que de jouir de leur château en province, juste pour avoir l'honneur de croiser le monarque une à deux fois la semaine... Un monarque délicieusement incarné par Xavier Beauvois, dépassé, peu passionné par son rôle politique mais naïvement persuadé de sa mission d'ordre divin. Dés que la menace se fait sentir, ça se carapate dans tous les coins au château, ne comprenant rien à ce qui se passe, ces hommes et ces femmes coupés du monde paniquent à la lecture d'un tract donnant le classement des têtes à faire tomber, le temps est compté... Marie-Antoinette est insupportable, capricieuse, réclamant un dahlia brodé au moment où l'histoire bascule, se préoccupant de ses bijoux et de ses valises, souhaitant prendre la fuite contre l'avis de son époux pour organiser à distance la répression des foules affamées .
Benoit Jacquot se régale à filmer cette débandade, il est d'une justesse incroyable mais son film va bien au dela de ce simple épisode de l'histoire de la révolution française, nous pouvons y retrouver tous les régimes monarchiques en déroute. Comment ne pas penser notamment à ceux du "printemps arabe"ou à l'épouse de Bachar Al-Assad faisant ses achats luxueux via internet pendant que  les révoltés de Oms sont massacrés, surement sans rien comprendre à la réalité de son pays! 

Nous avons beaucoup aimé ce film qui nous a donné l'occasion de croiser Jacques Nolot (c'est le 21eme sur la liste des têtes à couper) un proche de André Téchiné dont il fut notamment le scénariste de j'embrasse pas. Il est aussi le réalisateur de l’arrière pays, un excellent film devenu invisible...

dimanche 1 avril 2012

Jardins Albert Kahn - Printemps

Avant notre installation dans la région parisienne, nous n'avions jamais ressenti avec autant d'exaltation le retour des beaux jours. Parce que l'hiver nous a semblé long, gris nous vivons ces quelques jours de soleil et de douceur avec une grande joie. Nous avions été visités notre jardin fétiche  à l'automne,  nous y sommes retournés juste pour le plaisir de voir les arbres en fleurs sous le ciel bleu dominical.

 





Dominique A - Vers les lueurs

Dominique A est notre chanteur favori, il nous accompagne depuis des années, "La fossette" son premier album n'est jamais bien loin, nous n'avons connu aucune déception. Nous nous sommes précipités sur son dernier opus "vers les lueurs" un véritable enchantement. Après avoir enregistré en solo l'album précédent, le chanteur s'est largement entouré s’adjoignant même les services d' un quintet à vent , sa voix est absolument magnifique tout au long de cet album rempli d'une énergie réjouissante. C'est un long frisson de bonheur!

Nous nous souvenons avoir entendu Dominique A parler de détestation lorsqu'il entendit pour la première fois "la nuit je mens" de Alain Bashung, détestation qu'il comprit très vite était l'expression d'une admiration sans limite pour une chanson parfaite, un sommet inatteignable. Dominique nous avons un petit message, il nous semble qu'avec "vers le bleu", vous avez définitivement atteint ce sommet...

Vers les lueurs est notre album de la semaine!

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