Le deuxième long métrage de Pascale Ferran, "l'âge des possibles" est un film que nous gardons précieusement dans notre vidéothèque, et que nous revoyons toujours avec un plaisir infini, peut être parce qu'il est un portrait juste et fidèle de notre génération. La dernière génération a avoir grandi sans internet, où lorsque les gens se téléphonaient ils n'avaient pas à poser la question devenue rituelle "tu es où?"
Mais ce n'était pas non plus l'age de pierre, le minitel faisait déjà partie du quotidien.
L'age des possibles est cette période de la vie devenue si difficile depuis que nous connaissons un chômage de masse où il nous faut quitter la vie étudiante pour trouver sa place dans la vie active, quitter l'insouciance et découvrir l’âpreté du monde professionnel.
En revoyant le film de Pascale Ferran, tourné avec les étudiants de la promotion 1995 du Théâtre National de Strasbourg, il nous est apparu avec évidence comme un double provincial et féminin de "comment je me suis disputé ma vie sexuelle" d'Arnaud Desplechin qui décrivait cette même période de la vie à travers un groupe de jeunes normaliens ayant grandi à la rue d'Ulm. Ces tableaux d'une génération sont un genre propre au cinéma français qui nous semblent sans équivalent dans les autres pays. Nous pourrions rajouter à ces deux films "les amitiés maléfiques" d'Emmanuel Bourdieu bien des années plus tard.
Strasbourg, de jeunes étudiants avec leurs doutes sentimentaux et l'inquiétude d'un avenir incertain, tout est parfaitement décrit ici avec sensibilité et justesse. Ils s'entrecroisent, couchent parfois ensemble, mais ils ont finalement la pudeur de cacher leurs angoisses qui ne s'expriment véritablement que dans les moments de solitudes ou lorsqu'ils partagent un moment intime avec l'ami le plus proche. Une dernière soirée les réunit tous où la tristesse se mélange à la joie, nous entendons "foule sentimentale" , choix judicieux tant Alain Souchon fut celui qui capta alors le plus justement l'air du temps. Puis dans un sublime moment , Agnès coupe la musique pour laisser place au "réves secret d'un prince et d'une princesse" de Peau d’âne que les jeunes gens reprennent magnifiquement en cœur.
Moment juste, tant le cinéma de Pascale Ferran peut être mis dans la filiation de celui de Jacques Demy. L'air du temps est ici capté avec la même justesse que dans les parapluies de Cherbourg où Jacques Demy avait su filmer le désarroi d'une jeunesse confrontée à la Guerre d'Algérie. Les moments chantés, finalement nombreux dans le film de Pascale Ferran sont remplis d’émotion, il est impossible de ne pas fondre devant l'interprétation de "Toulouse" par Denise. La vie étudiante c'est aussi une liste de chansons qui vous poursuit le long d'une vie, un panier de madeleines...
Pour toutes ces belles raisons, comme le film d'Arnaud Desplechin, l'âge des possibles est devenu un film de chevet.
J'aime passionnément ce film vu à la sortie, enregistré sur une cassette VHS mais comme je n'ai plus de magnétoscope je ne l'ai plus revu depuis des années. Il m'est d'autant plus cher que j'étais alors en fac et que la plupart des préoccupations des personnages étaient aussi les miennes à l'époque. J'espère toujours qu'il sortira un jour en DVD !
RépondreSupprimerNous sommes d'accord c'est un film passionnant qui n'a jamais vraiment eu l'exposition qu'il méritait. Pascale Ferran a tourné un nouveau film, peut être qu'à l'occasion de sa sortie, on peut espérer une édition de "l'âge des possibles".
SupprimerJ'aime aussi beaucoup ce film que je revois généralement à Noël, sur le vieux magnétoscope familial. Très beau film sur cet âge charnière où l'avenir encore ouvert est sur le point de rétrécir dangereusement. Et comme toi j'aime beaucoup les passages chantés !
RépondreSupprimerNous c'est plutôt vers ce mois de juin que nous aimons le revoir... C'est etonnant que Arte qui est à l'origine de ce film n'est jamais sorti une version dvd.
SupprimerMoi aussi j'ai adoré ce film, pour sa justesse. Et ce fameux passage où elle chantent "peau d'âne".
RépondreSupprimerJ'attends moi aussi désespérément le dvd...