dimanche 7 avril 2013

Huit et demi - Federico Fellini

Huit et demi, le chef d’œuvre de Federico Fellini fête cette année ses cinquante ans. Occasion en or pour la filmothèque du quartier latin de projeter une copie restaurée de toute beauté sur son écran. 

Un cinéaste dépressif Guido Anselmi traverse une crise d'impuissance créatrice, il abandonne son projet  pour se réfugier dans une maison thermale d'une station balnéaire. Son producteur, sa maitresse, sa femme, des acteurs viennent le retrouver. Loin de la vie mondaine, ces périodes de repos sont l'occasion pour le cinéaste de rêver et de replonger dans ses souvenirs d'enfance, de retrouver ses parents décédés, de revivre ses premiers émois d'enfant  ou de fantasmer sa vie sexuelle dans un harem où il retrouve toutes ses conquêtes.. Mais il lui faut composer avec sa femme qui ne supporte plus ses adultères avec qui  les relations sont devenues difficiles  et résister à la pression de son entourage qui le pousse à terminer son film de science fiction. Le film est un enchevêtrement de scènes réalistes et oniriques
Inspiré par sa propre expérience: "Au moment du tournage de huit et demi, il m'arriva une chose que je redoutais depuis longtemps. Ce fut plus terrible que je n'aurais pu l'imaginer. Je fus victime d'un "blocage", comme les écrivains en ont parfois devant leur feuille blanche. J'avais un producteur, un contrat. Nous étions à Cineccita, tout le monde était prêt et attendait que je tourne mon film. Seulement le film que j'avais prévu de réaliser m'échappait. Certains décors étaient déjà montés mais je n'arrivais pas à trouver le souffle."

Fellini fait de son manque d'inspiration, de sa panne créatrice le sujet même de son film. Marcello Mastroianni est véritablement son double, nous vivons son angoisse au quotidien, nous le voyons réfléchir sur la conscience religieuse de l'Italie.  Si la dolce Vita, son film précédent marquait déjà une rupture du cinéaste avec le néo réalisme. Huit et Demi va bien au delà, Fellini définit un langage cinématographique qui lui est propre et qu'il n'aura de cesse de développer les années suivantes.

Le film s'ouvre sur une scène magnifique où le cinéaste fait un cauchemar où coincé dans un embouteillage il étouffe dans sa voiture avant de s'en échapper par le toit et de s'envoler dans le ciel... pour se terminer sur une sublime parade rythmée par la musique de Nino Rota. Au sujet de cette dernière scène, Fellini raconte:

"J'avais prévu une autre fin pour Huit et demi mais entretemps on me demanda de préparer une bande annonce. Pour cela, je fis revenir deux cents acteurs que je filmai en train de parader devant sept caméras. En voyant les rushes, je fus impressionné. Ils étaient tellement bons que je décidai de changer la fin du scénario original, qui se déroulait dans un wagon restaurant où Guido et Luisa se réconciliaient. Ainsi il arrive que les exigences des producteurs aient un effet salutaire."

Nous avons revu avec grand plaisir, le film de Fellini, nous sommes restés sous le charme de l'élégance de Marcello Mastroianni et de la beauté d' Anouk Aimée et de Claudia Cardinale incarnation de la  femme idéale.

Les propos de Federico Fellini sont tirés du livre de Charlotte Chandler: "Moi Fellini. Treize ans de confidence."

"De là vient, de toute évidence, le sentiment qu'on a de se trouver devant une tentative rarissime au cinéma, d'expression personnelle totale, et on voit soudain apparaitre le vrai sujet, qui n'est ni la confession, ni l'aveu dun échec mais la confession d'une angoisse, d'une inquiétude, d'un doute de soi, faite avec une santé morale et physique et un lyrisme complétement absents en général de ce genre de propos." (Pierre Kast - Cahiers du cinéma n°145, Juillet 1963)

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

LinkWithin

Related Posts Plugin for WordPress, Blogger...