dimanche 23 février 2014

Leon Morin Prêtre - Jean-Pierre Melville

Barny, une jeune femme vit seule avec sa fille depuis la mort de son mari né juif. Elle s'est repliée dans le sud-est de la France après l'invasion des nazis pour suivre son travail dans une entreprise de cours par correspondance où elle corrige des copies de français. Même si l'occupant italien semble peu menaçant, elle protége sa fille en lui procurant notamment un faux certificat de baptême.
Un jour, par provocation elle rentre sans une église se confesser, elle énonce immédiatement que Dieu est l'opium du peuple et affiche son athéisme... Le prêtre Leon Morin loin de s'offusquer engage le dialogue avec la jeune femme.. Il la rencontre par la suite régulièrement à son domicile, il lui prête des livres. La jeune femme finit par lui avouer sa conversion à la religion catholique. le prêtre doute de sa foi profonde... Il a raison la jeune femme est plus sous le charme indéniable du jeune prêtre qui semble prendre plaisir à cette situation mais qui finit par la repousser  quand elle se fait plus pressante. La guerre finie, la jeune femme repart sur Paris alors que le curé est nommé sur un nouveau poste ...

Dans une interview donnée à Claude Beylie et Bertrand Tavernier pour les cahiers du cinéma de octobre 1961(N°124) lors de la sortie de son film, Melville répondait :

"- A vous entendre, on jurerait qu'il s'agit d'une œuvre de commande. Rien ne vous a captivé?

- Si.D'abord, je vous l'ai dit,j'ai eu le plaisir de découvrir l'étendue du talent de Belmondo, en travaillant avec lui... D'autre part, dans le sujet du film, une idée me plait,que j'ai cherché à mettre en évidence: c'est le thème de l'impossibilité de la conversion. Passé un certain âge, j'estime qu'il n'y a plus de conversion possible, dans tous les domaines, religieux, politique, etc. Ici, la femme se croit attirée par la religion, mais ce mysticisme est une imposture. En réalité, elle est amoureuse du prêtre. Elle le trouve beau, et elle se dit:après tout, le Christ était beau, et ce n'est pas mal agir que penser à sa beauté... Bref, elle se cherche sans arrêt des justifications, et, lorsqu'elle na plus de curé à adorer, sa belle fougue s'éteint."
Ce film c'est d'abord la rencontre entre deux des acteurs les plus brillants de leur génération: Emmanuelle Riva et Jean-Paul Belmondo. Jean-Pierre Melville fut subjugué par l'interprétation de la jeune fille dans Hiroshima mon amour de Alain Resnais, sa révélation rendit possible pour lui l'adaptation du roman de Beatrix Beck qui avait obtenu le prix Goncourt. Mais derrière l'histoire intime de ce duo, Jean-Pierre Melville fait un portrait de la France sous l'occupation et notamment de la situation des femmes dont nombreuses sont celles à se retrouver seules devant faire face aux difficultés du quotidien dans une vie sans affection... et ce film comme l'a si bien rappelé Claude-Jean Philippe lors de sa présentation, forme à ce titre un ensemble cohérent sur cette période de l'histoire de France dont le cinéaste fut un acteur engagé dans la résistance avec le silence de la mer adapté du roman de Vercors et par la suite son grand film  l'armée des ombres.

Ce film sobre, épuré mais avec un noir et blanc impeccable, la précision de ses cadrages confirme le talent du cinéaste nourri par les maitres du cinéma américain, ses films traversent le temps lui offrant une postérité, que peu aurait soupçonnée alors, largement méritée. Il reste une référence majeure pour les jeunes auteurs de cinéma.

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