vendredi 31 mai 2013

Dominique A au Trianon

Hier, nous avons mis fin à cette incohérence de n'avoir jamais vu Dominique A en concert alors que nous attendons la sortie de chaque nouvel album avec une sincère impatience. Il est notre chanteur de chevet depuis "le Courage  des oiseaux" , nous l'avons suivi avec passion.
Concert de fin de tournée, Dominique a illuminé la soirée après une première partie réussie de Maissiat, jeune chanteuse prometteuse dont le premier album "tropiques" mérite l'écoute avec notamment "le départ" entendu sur les ondes radiophoniques,  une chanson qui a tout du tube, une ritournelle envoutante.
Une prestation hors norme du chanteur pour ce concert de fin de tournée,  enthousiaste de retrouver cette salle où il n'avait plus joué depuis dix ans. 2 heures de concert, l'occasion de jouer les morceaux de son dernier album et de revisiter son répertoire devenu avec les ans d'une richesse incroyable.
"Le courage des oiseaux" son premier tube a gardé toute sa fraicheur, le chanteur semble totalement réconcilié avec "le twenty two bar " qui fit sa renommée joué lors du deuxième rappel avec une bonne humeur évidente, "Rendez nous la lumière", "close west" ou "ce geste absent" de son dernier album sont définitivement des "merveilles", mais rien n'égale pour nous "l'horizon". 
Ce concert témoigne de la richesse de son répertoire. Ses textes magnifiques montrent que la langue française peut parfaitement épouser les rythmes musicaux venus d'Angleterre.
Un troisième rappel et  le chanteur nous a laissé après avoir joué "Hasta que el cuerpo aguante". Un concert plein de ferveurs, Dominique A est un géant qui prend toute sa dimension sur scène. Nous sommes repartis plein de bonheur et avec une certitude,  nous irons revoir Dominique A.

Pour le plaisir de réentendre "ce geste absent"




mercredi 29 mai 2013

La dame de Shanghai - Orson Welles

Venir en aide à  son prochain lorsqu'il est en danger c'est le devoir de chacun, Michel O'Hara (Orson Welles) n'a pas hésité une demi seconde lorsqu'il a vu Elsa Bannister (Rita Hayworth) agressée par des malfaiteurs à lui venir en aide. Charmé par la beauté de la jeune femme, il refuse pour autant l'emploi qu'elle lui propose de tenir au bord de son yacht, c'est Arthur Bannister le mari d'Elsa, un puissant avocat handicapé qui convint Michel d'accepter l'emploi et de les accompagner pour une croisière d'agrément.
Sur le bateau, l'attirance entre Michel et Elsa Bannister est de plus en plus évidente, mais c'est aussi un jeu de manipulation qui se met en place, avec notamment Grisby un ami de Bannister qui veut simuler son propre meurtre pour toucher une prime d'assurance.
Mais ce qui devait être factice devient réalité, Grisby est retrouvé mort et c'est Michel qui est accusé du crime. Défendu bizarrement par Bannister, il finit par prendre la fuite. Il retrouve Elsa dans un théâtre chinois, il comprend alors qu'elle est la meurtrière, Bannister les rejoint. Trompés par des miroirs qui multiplient les personnages les coups de feu sont tirés au hasard, Bannister est tué, Elsa gravement blessée. Insensible à ses implorations Michel O'Hara part seul  sur cette dernière pensée: "Innocent ou coupable qu'importe , l'essentiel est de savoir vieillir."
Ce film est tourné alors que la couple Orson Welles Rita Hayworth se déchire. Pourtant même débarrassée de sa chevelure flamboyante, Orson Welles la filme dans toute sa beauté, bronzant sur un rocher elle est éblouissante. Si la première scène est plutôt ratée, ce film est devenu un classique des films noirs, notamment par ses scènes mythiques de l'aquarium et du labyrinthe des miroirs, ce thriller nous apparait largement supérieur à son précédent film: le criminel. La dame de Shangai ne rencontra pas son public, il mit la carrière de Rita Hayworth en difficulté, les portes de Hollywood se fermèrent à Orson Welles.

Nous avons revu avec un grand plaisir, "the lady of Shanghai".

mardi 28 mai 2013

Demain Berlin - Oscar Coop-Phane

Le roman de Oscar Coop-Phane est un livre assez simple traçant le portrait de trois jeunes hommes Armand, Tobias et Franz sur plusieurs années. Trois jeunes gens partis de trois points différents et qui vont se rencontrer à Berlin. Trois jeunes  paumés qui trouvent à Berlin la ville qui les accepte, bien loin de la ville dortoir qu'est devenue Paris où vivaient Armand et Tobias alors que Franz grandissait en Bavière . Une fête permanente, une défonce commune pour traverser les week-ends sans sommeil. C'est le portrait d'une jeunesse désenchantée qui n'est pas sans rappeler le personnage Hyppo du premier film d'Eric Rochant "un monde sans pitié"...
Paris condamne à la solitude, Berlin permet la vie communautaire, de s'organiser, de se retrouver, de s'oublier dans les paradis artificiels...
C'est un roman finalement plein de retenus, Le roman pourrait sombrer dans le trash, loin de là, on ne s'étend jamais sur les excés, on ne se fait pas une gloriole de sniffer de la coke, ou de toute autre substance. Nous ne sommes pas chez Begbeider, ce n'est pas le portrait d'une jeunesse dorée, c'est une jeunesse de la débrouille qui revend pour pouvoir consommer, la prison n'est jamais trés loin, Tobias n'y échappe pas.... c'est le début de la fin pour ce trio qui prend conscience que leur vie est dans une impasse

Une vraie surprise, un roman qui capte dés ses premiers mots, des chapitres qui passent d'un personnage à l'autre avant de les retrouver ensemble à Berlin... On s'attache aux personnages, on suit leur errance dans ce monde dont ils semblent étrangers, le portrait d'une jeunesse sans espoir, ni utopie... L'histoire de notre temps

lundi 27 mai 2013

Le Comité National de la Résistance

Il y a tout juste 70 ans aujourd'hui se réunissait au 48 rue du four les différents mouvements de la résistance intérieure sous l'autorité de Jean Moulin . Événement d'une importance capitale, la reconnaissance de l'autorité du Général de Gaulle va permettre à ce dernier de devenir un interlocuteur reconnu par les forces alliées, d'avoir une légitimité politique.
Si la création de ce comité national fut capital au niveau militaire en coordonnant les différentes actions, c'est avant tout une réussite politique puisque le mouvement va tracer les grandes réformes de l’après-guerre, dessiner un modèle social aujourd'hui en danger qui fit de la France un modèle.

Le CNR est à l'origine du gouvernement provisoire instauré à la libération ,  nous évitant ainsi d'être administrés par les forces alliés.

Nous nous pouvions pas manquer cet événement majeur de notre histoire!

dimanche 26 mai 2013

Le misanthrope - Molière - Mise en scène Jean-François Sivadier

Lorsque Alceste choisit un morceau de musique, c'est "should I stay or should I go" des Clash, le choix peut surprendre, mais il est finalement assez cohérent de le  voir  danser sur la musique du groupe anglais dont il ne peut qu'apprécier le coté radical.
Alceste a renoncé a toute forme de compromis, il fait le choix de n'exprimer que ce qu'il pense, d'être d'une totale sincérité. Il sait que ce choix radical va le couper de la société dont il ne supporte plus l'hypocrisie, reste Célimène qu'il a dans son cœur, il espère obtenir de la part cette jeune veuve une relation exclusive.
Si Alceste souhaite se retirer du monde, la solitude semble tout autant l'effrayer, lorsque Célimène refuse de le suivre, il tente alors de convaincre Eliante, en vain... il finit seul avec la folie pour seule compagne.
Nicolas Bouchaud captive dés le premier plan, il compose un extraordinaire Alceste, c'est la première fois que nous le voyons sur scène, nous avons été totalement bluffés par sa prestation hors-norme. Si il impressionne autant c'est aussi parce qu'il fait face çà une Céliméne de haut vol interprétée par Norah Krief, toute la troupe est à l'unisson donnant à chaque personnage son épaisseur.
 Dés les premières répliques, nous comprenons que Jean-Francois Sivadier a choisi de nous faire entendre le rire de Molière, sans en masquer la sombre mélancolie. Il va user au maximum pour notre plus grand bonheur des ressorts comiques de la pièce, et plonger la salle dont il a su obtenir la complicité dés les premières minutes dans un sentiment de joie.  C'est parce qu'il n'y a aucune faiblesse sur scène, que le texte prend toute sa dimension, la langue de Molière est intemporelle. Peu de décors, tous les artifices du théâtre nous sont ici révélés, tout se passe sous le regard du spectateur. L'alexandrin donne le rythme, mais il n'est jamais un carcan, les acteurs s'en jouent avec aisance. Cette langue  qui peut apparaitre difficile est  dédramatisée auprès du public lors du prologue où Philinte vient faire les préconisations d'usage au sujet des téléphones portables en alexandrin, laissant le public finir les phrases, une sorte de n'ayez pas peur adressée aux spectateurs. Nous démontrant ainsi en trois minutes que cette langue fait partie de notre patrimoine commun !

Nous avons assisté à la chute d'un homme en 2h45, ce fut un grand moment de théâtre, magique !




Modern Vampire of the City - Vampire Weekend

Dans une interview donnée aux inrockuptibles,  pour la sortie de leur dernier album, Ezra Koenig et Chris Baio, deux des membres du groupe Vampire Weekend expliquent leur démarche:

"Ce n’est pas quelque chose qu’on a fait consciemment, mais maintenant que ces trois albums sont là, j’ai ce sentiment de trilogie. Le premier album est gai, naïf, il parle d’un temps où on était encore à l’école – c’est une bonne intro. Ensuite, Contra parle d’explorer le monde, de grandir, de se libérer, et le dernier, c’est le retour à la maison. C’est bien une trilogie : ici, là-bas et ici de nouveau ou les jours heureux à Oxford, l’exploration du monde et le retour plein de doutes. Et puis j’ai l’impression que chacun de nos albums reprend les mêmes personnages et racontent simplement leur évolution, leur histoire. Tout se suit. Evidemment, on ne saura pas de façon définitive si c’est bien une trilogie avant d’avoir fait un quatrième album, mais je pense que celui-ci sera un nouveau départ."

Puisque nous avions commencé ce voyage avec enthousiasme dés le premier opus, nous nous devions d'aller jusqu'au bout ce cette trilogie du quatuor New Yorkais.

Modern Vampire Of City est notre album de la semaine !

samedi 25 mai 2013

Barbara Carlotti - Teenage Kick (Acte 1)

Dans le cadre de l'exposition "N’habite plus à l'adresse indiquée" au centre Albert Chanot, Barbara Carlotti et son acolyte Gurwann Tran Van Gie  ont offert une performance d'une demi heure où ils ont revisité les tubes de leur jeunesse.Grimés en japonais, accompagné d'un guitariste et d'un clavier minimaliste, ils ont repris sans micro tel un chanteur de métro Here comes the rain again des Eurythmics, Torn de Nathalie Imbruglia ou thriller de Michael Jackson; pour terminer avec le magnifique "Mon dieu, mon amour" que la chanteuse avait dans le temps chanté en duo avec Philippe Katerine.
Entre chaque reprise,une actrice venue nous lire un texte. Un moment intime qui nous a ravi, un cadeau de la chanteuse joué dans la bonne humeur, même le soleil n'a pas résisté transperçant la verrière de ses rayons inespérés.

L'acte 2 de Teenage Kick aura lieu le 12 juin au même endroit.

Notre besoin de consolation est impossible à rassasier - Stig Dagerman

Nous connaissions le destin tragique de l'écrivain suédois Stig Dagerman même si  nous n'avons lu aucune de ses œuvres à ce jour. Depressif,  il s'est donné la mort le 4 novembre 1954. Ce texte écrit quelques mois avant sa mort est une reflexion sur la vie, la création... il exprime son manque de foi dans l'existence, sa vie est une impasse, il n'a trouvé aucune issue, faisant de son geste final,  un acte raisonnable.
Court texte, dix pages éditées chez Actes Sud, c'est une lecture bouleversante.

Nous vous en livrons les premières lignes:

"Je suis dépourvu de foi et ne puis donc être heureux, car un homme qui risque de craindre que sa vie ne soit une errance absurde vers une mort certaine ne peut être heureux. Je n'ai reçu en héritage ni dieu, ni point fixe sur la terre d'où je puisse attirer l'attention d'un dieu: on ne m'a pas non plus légué la fureur bien déguisée du sceptique, les ruses de Sioux du rationaliste ou la candeur ardente de l'athée. Je n'ose donc jeter la pierre ni à celle qui croit en des choses qui ne m'inspirent que le doute, ni à celui qui cultive son doute comme si celui ci n'était pas, lui aussi, entouré de ténèbres. Cette pierre m'atteindrait moi-même car je suis bien certain d'une chose: le besoin de consolation que connait l'être humain est impossible à rassasier."

vendredi 24 mai 2013

Le porteur d'histoire - Texte et mise en scène Alexis Michalik

Un homme se rend dans un petit village des Ardennes, son père est mort il ne l'avait pas vu depuis des années. En pleine nuit, il découvre au milieu du cimetière des carnets manuscrits, le journal intime d'une femme du XIX° siècle Adelaïde Antes qui fut proche d'Alexandre Dumas...
Nous sommes entrainés dans une histoire extraordinaire qui va nous faire traverser les siècles, de la conquête de l’Algérie en 1832, pour remonter jusqu'aux croisades, puis revenir au cœur de la Révolution Française, en passant par le débat de l'élection présidentielle présidentielle de 1988...Nous faisons ces incessants allers- retours dans le temps sans jamais nous perdre par la magie du théâtre.Dans un décor épuré, la mise en scène d'une fluidité étonnante d'Alexis Michalik nous transporte durant une heure trente, nous croisons Alexandre Dumas, Eugene Delacroix ou encore le Prince de Polignac. Il nous captive telle Shéhérazade, nous rappelant que chaque bibliothèque est un objet de fascination, de mystère et d'humanisme.
Cinq comédiens uniquement, ils se démultiplient à souhait, les personnages s’entre-changent, c'est envoutant, c'est le summum du romanesque. On oublie tout, le mauvais temps, la crise financière et tous les malheurs de notre temps. Nous sommes tout d'un coup dans un monde merveilleux, une sublime sensation que nous avions déjà rencontrés lorsque nous avions vu un soir de Noël "Les naufragés du fol espoir" d'Ariane Mouchkine. Jubilatoire !

Ce spectacle parti de rien, est le phénomène de la saison théâtrale, un magnifique bouche à oreille lui permet de rencontrer un public nombreux. Nous attendons déjà avec impatience le prochain travail d'Alexis Michalik.

Nous à citer les cinq acteurs:  Armaury de Crayencour, Eric Herson-Macarel, Evelyne El Garby Klaï, Magali Genoud et Régis Vallée.

jeudi 23 mai 2013

Georges Moustaki (03/05/1934 - 23/05/2013)

Il avait  choisi Georges pour prénom en hommage à Brassens, il est assurément un grand nom de la chanson française, écrivant notamment pour ses plus grandes dames: Edith Piaf, Barbara, Juliette Greco... Il nous est également difficile d'écrire sur lui sans avoir une pensée pour Serge Reggiani. On cite partout en ce jour funeste Milord, le Métèque ou la dame Brune, mais il convient de ne pas limiter son répertoire à ces trois titres emblématiques ...
Plus qu'un artiste, pour nous Georges Moustaki incarnait un certain art de vivre, nous aimions voir sa tête, une mine réjouie, il était un être raffiné toujours d'une grande élégance qui nous invitait tous à être un peu moins con pour que le monde soit meilleur...

mercredi 22 mai 2013

Only God Forgives - Nicolas Winding Refn

Une histoire banale de vengeance tel est le sujet du dernier film de Nicolas Winding Refn. Bangkok, deux frères Billy et Julian tiennent une salle de boxe Thai qui n'est que la couverture d'un vaste trafic de drogue dirigé par leur mére Crystal. Billy est assassiné après qu'il fut livré par la police au père de la jeune fille qu'il venait de violer et assassiner.
Crystal attend de son fils Julian qu'il venge son ainé, mais celui montre peu d'empressement alors elle paye ses hommes de main pour qu'ils s'occupent de la besogne, mais ils tombent sur un os, le redoutable Chang, le chef de la police....

Comme à chaque fois chez Nicolas Winding Refn, la forme l'emporte largement sur le fond, c'est le style de son cinéma qui en fait toute sa richesse mais peut être aussi sa limite, tant la psychologie de son film peut sembler simpliste voire caricaturale, il nous offre une vision fantasmée de la Thaïlande assurément bien loin d'une quelconque réalité. Les plans sont millimétrés, la lenteur ne pose à aucun moment problème, tant on est capté par la beauté des scènes servies par une sublime bande-son .  ... Le film passe de moments de langueur à des explosions de violence qu'incarne parfaitement à lui seul le jeu de Ryan Gosling qui derrière son coté animal, cache une sensibilité de petit enfant écrasé par sa mère et qui n'a jamais su grandir, s'émanciper.

Il affiche son impuissance à faire l'amour, à prendre une décision ou même la parole, personnage mutique, capable de se faire massacrer par Chang sorte d'ange noire, justicier implacable de rues de  Bangkok, juste pour satisfaire sa mère et son désir de vengeance. Kristin Scott Thomas est absolument remarquable dans ce rôle de mère castratrice, blonde cheveux au vent elle fait sensation telle Cruella dés sa première apparition sur l'écran.
Nicolas Winding Refn, à travers ce film d'une totale noirceur sans aucune forme de sentimentalité radicalise son cinéma, notamment par rapport à son précèdent film Drive. C'est un peu la rencontre du cinéma de Jean-Pierre Melville et des films d'action venus d'Asie, car c'est assurément sa cinéphilie qui est la principale source d'inspiration du cinéaste. Il partagera surement le public, mais nous nous votons pour, nous n'avons pas sifflé Only God Forgives !

Henri Dutilleux (22/01/1916 - 22/05/2013)

Parce que nous habitons à Clamart , il nous était facile de ne pas ignorer la musique de Henri Dutilleux qui avait donné son nom au conservatoire de Musique. Un nom glorieux de la musique contemporaine, l’œuvre d'Henri Dutilleux qualifiée de "moderne classique" par le critique musical Claude Gayman, est jouée aux quatre coins du monde, il a largement participé au rayonnement de notre pays attirant un large public allant bien au-delà des seuls passionnés de la musique contemporaine.

Pour lui rendre un dernier hommage nous avons choisi un extrait de son concerto pour violoncelle "Tout un monde lointain"

mardi 21 mai 2013

Le Théâtre de Sabbath - Philip Roth

A la lecture du théâtre de Sabbath, il est facile de comprendre pourquoi Philip Roth a fait le choix de renoncer à écrire depuis son dernier roman Nemesis tant à la lecture de ce roman on devine combien le travail d'écrivain n'est pas qu'un exercice intellectuel mais également une gageure physiquement éprouvante.
Le théâtre de Sabbath est un roman monumental dans la lignée de Herzog de son maître Saul Bellow. 647 pages pour raconter une vie, celle de Mickey Sabbath qui lui a su la réduire en quelques lignes lorsqu'il a rédigé sa propre épitaphe:

Morris Sabbath
"Mickey"
Pilier de bordel bien-aimé, séducteur,
sodomiste, contempteur des femmes,
pourfendeur de la morale, corrupteur de la jeunesse
assassin de son épouse, 
suicidé
1929-1994

La vértiable naissance de Mickey, personnage hors norme d'anarchiste cynique, c'est l'année 44 où son frére ainé meurt aux commandes d'un avion dans le Pacifique. Cette mort va plonger sa mère dans la dépression, dévaster la famille:

"La famille était finie. J'étais fini. Je lui ai donné des sels et tout s'est renversé et j'avais peur de l'avoir tuée. La période la plus tragique de mon existence. Entre quatorze et seize ans. Rien de comparable. Ça ne l'avait pas simplement brisée, ça nous a tous brisés. Mon père, jusqu'à la fin de sa vie, complétement changé. Il représentait une force, qui me rassurait, à cause de son physique et parce qu'on pouvait vraiment compter sur lui. Ma mère était la plus émotive toujours . La plus triste, la plus gaie. Toujours entrain de siffloter. Mais mon père était d'une pudeur extrême, c'était impressionnant. "

Alors Mickey quitte sa maison, part marin parcourir les mers et les océans découvrir les bordels du monde, le début de sa nouvelle vie: érotomane. De retour à New-York, il commence une carrière de marionettiste, de metteur en scène de théatre dans les  milieux underground, Nikki est sa compagne jusqu'au jour où elle disparait, nous voulons bien la comprendre, tant  la vie avec ce personnage hors norme semble impossible...
Puis c'est une nouvelle vie pour Mickey avec Rosanna dans un coin perdu d'Amérique où il va croiser Drenka, une patronne d'auberge venue de Yougoslavie. Entre eux s'engage une relation où le sexe est l'élément moteur, une liaision sans limite et sans tabou... nous avions jamais lu une rencontre où le sexe est aussi joyeux, les pages d'un hédonisme rare. Drenka meurt d'un cancer... Mickey s'écroule à nouveau, il va chercher à se détruire mais il est difficile pour lui de quitter la scène de la vie...

Mickey Sabbath est le portrait du personnage le plus punk de la littérature. Un roman hors norme, une œuvre sombre qui dévore son lecteur. Un grand moment !

Ray Manzarek (12/02/1939 - 20/05/2013)

The Doors fut un groupe de courte durée mais il marqua à jamais l'histoire du rock. Assurément le charisme et le talent de son chanteur Jim Morisson y fut pour beaucoup, il suffit de voir avec quelle ferveur les jeunes gens continuent de se rendre sur sa tombe au père Lachaise.
Mais The Doors, c'est aussi un son bien particulier , Ray Manzarek le claviériste en est le grand responsable, c'est assurément lui qui a fait ce son unique et indémodable. Les doors se produisaient sans bassiste, de sa main gauche il tenait la ligne de basse sur son clavier.

Nous lui devions bien un dernier salut !


lundi 20 mai 2013

Mud - Sur les rives du Mississippi - Jeff Nichols

Deux gamins, Ellis et Nickbone, 14 ans vivent sur les bords du Mississippi. Ils ont fait le projet de prendre possession d'un bateau qui s'est retrouvé coincé en haut d'un arbre sur une île déserte. Leur surprise  est grande lorsqu'ils y découvrent un habitant qui revendique le bateau: Mud. Le type avec son tatouage de serpent, son flingue coincé dans le pantalon et une chemise porte bonheur fascine les deux gamins à qui rien ne semblent faire peur.
Ils découvrent que Mud se cache, recherché pour avoir tué un homme qui avait maltraité la femme qu'il aime, Juniper. Les gamins vont garder le secret, et venir en aide à Mud pour qu'il puisse échapper à ceux qui veulent sa peau, notamment les membres de la famille de sa victime. Il est revenu sur le lieu de ses jeunes années, mais il ne peut compter que sur les deux gamins croisés par hasard, Tom (superbe Tom Shepard) qui a élevé Mud refuse de lui venir en aide fatigué par ses histoires. Mud doit fuir c'est sa seule issue pour cela il faut remettre le bateau en état et notamment le faire descendre de son arbre...
Avec ce troisième film il n'y a plus de doutes sur le statut de Jeff Nichols, il fait partie des grands cinéastes de notre temps. Ce dernier film d'une beauté étourdissante nous a transporté jusqu'à son générique de fin. Une émotion qui a pu nous rappeler la lecture des livres de Mark Twain, ou de Robert Stevenson où Mud fait ici office de Long John Silver...Mais bien plus qu'un simple film d'aventures, c'est aussi un film sur l'enfance, des rapports avec les parents avec notamment Ellis qui découvre les premiers émois amoureux, il n'a peur de rien surtout pas de se confronter aux plus grands pour faire valoir sa vision de la justice. Interprété par Tye Sheridan, ce gamin est doté d'un charisme qui n'est pas sans rappeler celui d'Antoine Doisnel des 400 coups.

Le cinéma de Jeff Nichols est absolument remarquable, il ne filme jamais pour le plaisir un beau plan sur les paysages, chaque plan a son sens, sert les propos du cinéaste. On s'inquiéte, on rit notamment lorsque Tom ne comprend pas pourquoi le fait d'avoir été un tireur d'élite chez les marines ferait de lui un assassin, ce film est un grand moment d'émotion.

Mud, sur les rives du Mississippi est un grand film romanesque, une claque cinématographique  !

Higuma est notre cantine japonaise

Pour de braves gens comme nous qui n'avons jamais eu la chance de poser notre pied au Japon, nous pourrions croire les japonais condamnés à se nourrir exclusivement de sushis et autres sashimis tant les cartes de restaurants japonais se ressemblent toutes. Pourtant le cinéma nippon, nous a souvent présenté une toute autre cuisine qui ne nous semblait pas sans intérêt.
Notre bonheur nous l'avons trouvé rue Sainte Anne à Paris où sont regroupés un grand nombre de restaurants japonais . Nous avons porté notre choix sur un restaurant qui ne paye pas de mine mais dont on nous avait fait les meilleurs compliments.
Plus cantine que restaurant, on découvre les cuisiniers derrière le comptoir préparer en direct les plats commandés. Il convient de ne pas rater les Gyoza, des raviolis farcis à tomber à la renverse, ensuite notre préférence va vers les nouilles sautées mélangés à des légumes. Les prix sont modestes, l'endroit est parfait lorsque vous ne souhaitez pas perdre votre temps à table. C'est le lieu idéal pour découvrir la cuisine japonaise du quotidien

Il convient d'arriver de bonne heure, l'endroit est réputé, très rapidement la queue s'installe sur le trottoir.

Higuma
32 bis rue Sainte Anne
75001 Paris

Gatsby Le Magnifique - Jack Clayton

Le "film du dimanche soir" nous a toujours semblé être un concept un peu flou, peut être parce qu'il n'est qu'un compromis : passer un bon moment tout en sachant que nous n'allons pas vivre un grand moment de cinéma. Nous avons pensé hier au soir que Gatsby Le Magnifique de Jack Clayton pouvait facilement entrer dans cette catégorie, peut être parce que Robert Redford y tient le premier rôle avec Mia Farrow.c'est d'ailleurs là une grande différence entre la littérature et le cinéma, il est parfois supportable de regarder un film sans qualité.
Nous avons beaucoup aimé le premier quart d'heure, la reconstitution de l'Amérique de l'entre deux guerres est particulièrement soignée. il n'y a pas beaucoup inventivité dans la mise en scène mais c'est avec un certain plaisir que nous plongeons dans cette époque aujourd'hui disparue. Les robes sont sublimes, les couples dansent avec élégance, en ce temps là les gens riches avaient un certain sens de l'élégance, cela correspond totalement à notre vision fantasmée de ce temps là.
Mais la première rencontre entre Gatsby et Daisy cette femme tant désirée dans ses jeunes années qu'il n'a pu épouser parce qu'il était sans fortune, tombe dans une mièvrerie vite ridicule, ridicule confirmé par la présence d'un cygne dans un premier plan. Les fondus enchainés ne font qu'amplifier cette impression de mauvais mélo. Le film traine en longueur, nous finissons par nous ennuyer nous aussi aux soirées de Gatsby...
Il est assez facile d'adapter l'histoire de Gatsby, dont la trame est assez simple, mais ce qui reste impossible au cinéaste c'est de rendre la magie de l'écriture de Francis Scott Fitzgerald !

dimanche 19 mai 2013

Les anges du péché - Robert Bresson

Les anges du péché est le premier long métrage de Robert Bresson réalisé en 1943.  Premier film qui annonce une œuvre importante à venir, Robert Bresson situe l'action  au cœur d'un couvent des Dominicaines de Bethanie.
Une congrégation fondée en 1856 par le père  Lataste dont la première mission est de porter secours aux femmes emprisonnées, les emmener sur le chemin de la réhabilitation et le salut de leurs âmes. De nombreuses sœurs qui vivent dans le couvent se sont engagées dans les ordres à la fin de leur peine de prison.
Anne-Marie qui rejoint la congrégation au début du film, n'a pas un passé de délinquante, au contraire c'est une jeune bourgeoise issue d'un milieu convenu, elle entre d'ailleurs contre l'avis de sa mère qui aurait préféré la voir rejoindre un ordre "plus respectable".
Elle va entretenir une relation ambigüe avec Thérèse une jeune délinquante venue se cacher au couvent après avoir tué un homme, cette dernière multiplie les humiliations sur celle qui tente de sauver son âme. Anne-Marie glisse peu à peu vers la folie, la mère supérieure finit par renvoyer la jeune fille. Mais elle reste dans les environs, venant la nuit prier sur la tombe du fondateur de l'ordre...  prête à aller jusqu'au sacrifice pour obtenir la rédemption de sa protégée...

Robert Bresson dit du cinéma sonore qu'il inventa le silence. Cette formule colle parfaitement à son art , même si ce premier film nous semble être un de ses plus bavards, peut être du fait que Jean Giraudoux a participé au scénario et qu'il nous est difficile d'imaginer un écrivain  laisser le silence exprimer les choses.
Ce n'est certainement pas le film le plus abouti de Robert Bresson, mais il pose ici de nombreuses thématiques qu'il va reprendre tout au cours de sa filmographie, notamment sa réflexion autour du mal, le principe voulu par la congrégation : "les très grands pécheurs ont en eux ce qui fait les plus grands saints" ne pouvait pas le laisser indifférent. Il affiche un véritable sens du récit, son montage, ses cadrages sont d'une totale modernité, ils font que le cinéma de Robert Bresson ne se regarde pas comme un objet du passé, c'est un cinéma toujours vivant...

Film vu dans le cadre du ciné club de Claude Jean Philippe, cinéma l'Arlequin.

AM IV - Arman Méliès

"Arman Méliès est devenu aujourd'hui l'un des plus fins représentants de la pop hexagonale. Son quatrième album nous le dévoile moins mélancolique et moins contemplatif que par le passé. Plus incisif et plus synthétique. Le chanteur délaisse même un peu ses guitares de prédilection pour des claviers et des programmations très électro"

Vu dans Télérama, un extrait de l'article de Valerie Lehoux qui emploie également les adjectifs raffiné, élégant, précis, posé pour décrire Arman Méliès connu notamment pour avoir participé au dernier Album de Alain Bashung "Bleu Pétrole". Nous avions particulièrement aimé ses deux précédents albums "les tortures volontaires" et "Casino", nous ne pouvions pas passer à coté de son dernier album !

AMIV de Arman Méliès est notre album de la semaine.



samedi 18 mai 2013

Le passé - Asghar Farhadi

Ahmad après quatre ans d'absence est de retour d’Iran . Il a rejoint Paris pour divorcer de Marie dont il découvre la nouvelle vie  et les difficultés qu'elle rencontre avec sa fille ainée Lucie née d'un précédent mariage qui n'accepte pas la nouvelle liaison de sa mère avec Samir.
Ahmad va tenter d'apaiser le climat tendu, grâce à la confiance que lui accorde Lucie, il découvre le terrible secret qui pèse sur la nouvelle relation de son ex-épouse Marie . Ce film nous rappelle combien cette idée de "refaire sa vie" est fausse, on ne peut jamais gommer son passé qui finit toujours pas rejaillir, nous pourrions reprendre ici le titre d'un film d'un autre cinéaste iranien Abbas Kiarostami "et la vie continue", réalisé en Iran après un terrible tremblement de terre, ici le séisme est familial ...
Film parfait de Asghar Farhadi qui réalise une chronique familiale sans jamais porter le moindre jugement moral sur ses personnages, un regard qui révèle toute l'humanité du cinéaste. Il intègre parfaitement les enfants dans son récit, sans tomber dans la mièvrerie. Ce n'est jamais trop bavard, chaque plan est d'une précision chirurgicale, il laisse le temps à ses personnages de prendre place dans son film, il n'a jamais peur de tomber dans une certaine lenteur laissant ses plans se dérouler dans leur intégralité, c'est un vrai régal pour les acteurs tous brillants dans leur composition. Que ce soit Tahar Rahim, Berenice Bejo ou Ali Mosaffa, ils sont d'une justesse incroyable, par un simple geste, un regard, ils expriment les tourments de leurs âmes, ils en sont poignants. Il n'y a pas de gentils, de méchants, personne n'est parfait ici.
La construction du récit  crée un véritable suspens autour du secret qui doit être percé. La femme de Samir est dans le coma après une tentative de suicide. Personne n'a vraiment tous les éléments pour comprendre les raisons de son geste, la parole va se libérer, elle doit permettre de reconstituer le puzzle.

Vu à l'Arlequin

vendredi 17 mai 2013

Jorge Videla (1925-2013)

Nous pourrions militer, sans aucun problème de conscience, pour la libération des personnes incarcérées en prison, qui sont en fin de vie au nom de la dignité humaine. Mais il faut en convenir apprendre que Jorge Videla est mort seul dans sa cellule à l'age de 87 ans ne nous a fait ni chaud ni froid.
Il fut un des pires dictateurs de l'histoire récente de l'Amérique du sud, n'ayant jamais eu le moindre remords pour ses crimes.. Executions, enlèvements, tortures, disparitions, la dictature argentine était un crime contre l'humanité, une ignominie.
Nous imaginons combien la mort d'un tyran doit être un soulagement pour ceux qui furent les victimes de son régime. C'est à eux que vont nos pensées ce soir; et plus particulièrement aux mères et grand-mères de la place de mai qui défilaient chaque semaine pour rappeler la disparition de leurs enfants et ainsi dénoncer les crimes de la junte militaire à l'opinion mondiale!

Nous nous souvenons que la Fédération internationale de Football avait choisi de maintenir l'organisation de la coupe du monde 1978 sur le sol argentin alors que nous étions dans les mois les plus sanglants de la répression. On torturait les opposants du régime au son des discours d'Adolf Hitler à quelques encablures de stades de Football. L'Argentine remporta le trophée dans des conditions plus que douteuses, ceci ne fut qu'un épisode parmi tant d'autres sur les rapports troubles qu'ont pu entretenir les grandes organisations sportives et les dictatures au cours du XXème siècle.

mercredi 15 mai 2013

Recession


L'Europe a fait le choix de freiner fort en imposant aux pays endettés de réduire drastiquement leur dépense publique, il ne faut pas s’étonner que nous allions un peu moins vite.
Récession est le mot du jour, il ne faut pas oublier que derrière lui ne se cache pas uniquement une statistique de l'activité économique calculée par l'INSEE, c'est également des vies qui plongent dans la détresse, la galère. Pour mieux comprendre cette "récession" nous avons ouvert notre dictionnaire historique de la langue française rédigé sous la direction du remarquable Alain Rey.

Récession n.f est un emprunt savant (1869) au latin recessio, -onis "action de s'éloigner", formé sur le supin (recessum) de recedere "s'éloigner, se détacher". Ce verbe est formé de re- marquant le mouvement en arrière (re-), et de cedere "aller, marcher" (-> ceder).

C'est d'abord un terme didactique, signifiant "action de se retirer", il s'est spécialisé en astronomie dans l'expression récession des nébuleuses "éloignement progressif des nébuleuses extragalactiques avec des vitesses proportionnelles à leurs distances" (1949) concept à la base de la théorie de l'expansion de l'Univers et de celle du big-bang

Son usage en économie politique, devenu très fréquent, est emprunté (1954) à l'anglo-américain recession (1929 dans ce sens), de même origine que le français. Recession a eu d'abord une valeur d'euphémisme (au lieu de crise, depression); il s'est imposé dans la langue des spécialistes pour un type de crise mineure.

(Dictionnaire historique de la langue française - Ed Le Robert)
 
La récession ce n'est pas vraiment des lendemains qui chantent !

Alors rappelons nous ces simples mots de Jean-Jacques Vanier: "A part ça, la vie est belle!"


dimanche 12 mai 2013

Model Shop - Jacques Demy

"J'ai pris une de ces routes qui montent aux collines. De là-haut, j'avais toute la ville à mes pieds. Je me suis senti... soulevé, bouleversé par sa géométrie, son harmonie étrange. C'est une ville fabuleuse. Certains la trouvent laide, et elle n'est que pure poésie. J'aurais voulu bâtir quelque chose sur le champ, créer. "

Model Shop - Jacques Demy

Si nous avons voulu mettre en exergue ce passage dit par le héros du film de Jacques Demy, c'est parce qu'il synthétise parfaitement la volonté du cinéaste de rendre compte de cette fascination qu'exerce sur lui la mégapole, de retranscrire à travers l'image la poésie de la ville, il réalise un road movie où un jeune homme s’apprête à tourner une page de sa vie, obligé de rejoindre les rangs de l'armée américaine engagée alors au Vietnam.
Durant cette errance à travers la ville où il doit trouver impérativement la somme de 100 dollars pour pouvoir conserver sa voiture, une MG décapotable achetée à crédit, il croise sur un parking public une jeune femme qui le bouleverse par sa beauté, c'est Lola une jeune française venue de Nantes. Il suit la jeune femme avant de perdre sa trace puis de la retrouver par hasard, il découvre alors qu'elle travaille dans un Model Shop où elle pose pour des clients désireux de réaliser des photos grivoises...
Après une nuit d'amour, il lui laisse la somme empruntée à un ami pour qu'elle puisse rejoindre Paris et retrouver son enfant.
Reconnu par le succès des Parapluies de Cherbourg et des Demoiselles de Rochefort, Jacques Demy s'installe à Los Angeles où les studios lui ouvrent leurs portes. Ce n'est pas une comédie musicale qu'il réalise, mais un film d'une grande simplicité au rythme lent qui par sa beauté formelle captive le regard du spectateur. Il retranscrit avec une grande justesse, l'état d'esprit de la jeunesse américaine en rupture avec sa classe dirigeante dont elle ne comprend plus la politique étrangère et son engagement au Vietnam. Le film est empreint d'une certaine nostalgie d'un désenchantement qui va être la source de nombreux bouleversements sociologiques. L'arrivée d' Anouk Aimée dans une sublime robe blanche illumine le film, sa beauté n'est pas sans rappeer celle d'Audrey Hepburn, elle reprend ici le personnage de Lola, la jeune fille qui dansait et chantait dans un cabaret à Nantes, donnant au film son coté romanesque.

Pour interpréter son personnage principal, Jacques Demy avait repéré un jeune acteur, mais les producteurs  refusèrent le choix du metteur en scène convaincus que le jeune homme n'avait aucun avenir, son nom était Harrison Ford. Ils lui imposèrent Garry Lockwood qui venait de tourner avec Stanley Kubrik, 2001 l'Odyssée de l'espace.

Model Shop est un film magnifique, captivant. Nous l'avons vu avec un plaisir immense au cinéma l'Arlequin dans le cadre du ciné club de Claude-Jean Philippe

Pizza - Alain Bashung

Lorsque que nous sommes sans idée le dimanche matin pour choisir la musique qui nous accompagnera durant la semaine, nous aimons   ressortir un vieil album qui a pris un peu la poussière sur les étagères. Et c'est avec un grand plaisir que nous ressortons celui d'Alain Bashung composé avec Boris Bergman, sorti juste après le succès de Gaby, Oh Gaby au début des années 80.
Avec cet album, Alain Bashung enfonce le clou, il s'installe au sommet du rock français, avec notamment un nouveau tube indémodable: Vertige de l'amour. Le géant prend définitivement son envol !

Pizza de Alain Bahung est notre album de la semaine !


samedi 11 mai 2013

Enfance Clandestine - Benjamin Avila

C'est à travers le regard  d'un enfant que Benjamain Avila raconte la vie en Argentine en 1979 au temps de la dictature militaire, d'un groupe d'opposants. Après une période d'exil, les parents du jeune Juan sont revenus s'installer dans leur pays d'origine pour combattre la dictature au sein de leur mouvement peroniste: les motoneros. Juan est condamné à la clandestinité, il doit vivre sous un faux nom, il devient Ernesto. Il intègre une  l'école où il vit une histoire d'amour avec Maria, ce sont les seul moments où il peut vivre son enfance avec une certaine insouciance. Mais dés qu'il rentre au domicile où il retrouve ses parents, son oncle et sa jeune sœur, l'angoisse est de retour, tout bruit de sirène est un moment de suspens.
Le mouvement d’opposition n'a pas vraiment les moyens de lutter contre un régime puissant et organisé qui profite de l'enthousiasme créé par la victoire de l'équipe nationale lors de la coupe du monde de Football pour assoir son autorité. L'oncle Bento est le premier à tomber...
Film subtil qui échappe par son récit fait à travers le regard d'un enfant à toute forme d'académisme. Véritable parcours initiatique, ce film est aussi une chronique intimiste d'un jeune enfant qui découvre le sentiment amoureux, prêt à  prendre tous les risques malgré les recommandations de ses parents. 
Son regard d'enfant sur les évènements est parcellaire, cela créé un vrai suspens qui nous tient en haleine. Les cadrages au plus prés des personnages saisissent les sentiments, les peurs de chacun, offrant de magnifiques portraits de ces héros anonymes qui refusent l'ordre imposé et les violences perpétrées par les militaires.
Une vraie réussite !

Vu au cinéma l'Arlequin

dimanche 5 mai 2013

The Stone Roses

Lorsque sort en 1989, l'album Stone Roses du groupe  éponyme, Manchester est la capitale européenne du rock alternatif, et cet album est assurément le sommet de cette époque avec The Queen is Dead des Smiths sorti trois ans plus tôt. Il s'ouvre sur "I wanna be adored" totalement envoutant qui donne le ton à cet album qui enthousiasme jusqu'à sa dernière note. Hypnotique !
Le groupe s'est rapidement dissous, mais cet album marque à jamais l'histoire de la musique anglaise, il n'a jamais vraiment cessé de tourner depuis sa première écoute. Ian Brown le leader charismatique du groupe n'a jamais rencontré  le même succès lors de sa carrière solo.
The Stone Roses est un album majeur qui n'a rien perdu de sa fraicheur, il a eu une influence majeure au Royaume Uni, notamment sur Oasis.

Stone Roses est notre album de la semaine !


jeudi 2 mai 2013

Deux vies valent mieux qu'une - Jean-Marc Roberts

Demain, Jean-Marc Roberts aurait eu  59 ans, "Deux vies valent mieux qu'une" est son dernier récit, sorti quelques semaines avant son décès, de sa confrontation avec sa maladie qui allait rapidement l'emporter. Ce n'est ni larmoyant, ni triste. Il ne se laisse jamais emporter par son ressentiment, pourtant la vie lui est chère et nous sentons combien il lui est douloureux de devoir la quitter après avoir vaincu la tumeur 1, la tumeur 2 s'annonce trop coriace.
Occasion pour lui de se rappeler ses jeunes années et ses vacances passées dans les Calabres, chez son  oncle Félix, un personnage haut en couleur. Il y découvre les premiers émois amoureux auprès de jeunes filles Amalia et Mariella. Les pages sont magnifiques, remplies de soleil, de grains de sables qui se collent entre les doigts de pieds.
En quelques pages, il trace un portrait chaleureux de sa famille, de ses enfants nés de trois mariages. Il ne renonce jamais à son humour lui permettant de surmonter les situations pénibles comme les rencontres avec les médecins où il est celui qui détend l'atmosphère lors des annonces difficiles.

Jean-Marc Robert fut un jeune écrivain prometteur, il a rapidement délaissé sa plume pour se consacrer au métier d'éditeur, il était devenu un personnage incontournable du milieu littéraire jouant de son influence pour défendre ses écrits notamment lors de la saison des prix littéraires. Avec ce bref récit, une sorte d'adieu d'une rare élégance, il nous rappelle avec modestie qu'il était bien plus qu'un simple lecteur avisé.

mercredi 1 mai 2013

Remonter la Marne - Jean-Paul Kauffmann

Après nous être régalés de l'ouvrage d'Henri Calet "Poussières de routes", il était fort logique de nous plonger dans le dernier récit de Jean-Paul Kauffmann "Remonter la Marne" tant la filiation entre les deux hommes de lettres nous semble évidente. Les deux se révèlent d'excellents conteurs capables en quelques mots de reconstituer une ambiance, des odeurs. Leur humanisme est sincère.
Nous retrouvons ici le même éloge de la lenteur, l'écrivain a décidé de remonter à pied,  jusqu'à la source de la Marne en partant de sa confluence avec la Seine. Henri Calet nous avait enchantés avec ses deux chroniques consacrées à la Loire et la Garonne, nous avons eu le même plaisir à suivre Jean-Paul Kauffmann qui durant prés de sept semaines va errer dans les campagnes françaises sur les chemins de halage. Un exercice solitaire, à l'exception de quelques jours où il fut accompagné par un ami photographe Milan puis d'un chien errant, ce dernier l'abandonnant sans aucune considération pour un autre chemineau. Lorsqu'il est seul, Gaston Bachelard originaire des lieux lui tient régulièrement compagnie ...
La Marne fait partie intégrante de l'histoire de France, lors des guerres pour l'ennemi la franchir, c'est s'ouvrir la route vers Paris. Elle fut un enjeu capital lors du début de la première guerre mondiale quand Joffre et ses hommes sauvèrent miraculeusement le pays d'une défaite rapide... Kaufmann nous remémore cet épisode,  notamment grâce au récit d'un ancien poilu Jules Blain revenu sur les lieux après la paix signée, un texte édité à compte d'auteur,et  trouvé par hasard dans une librairie ... C'est aussi  la patrie de De Gaulle installé à Colombey les Deux Eglises, Napoleon n'est jamais très loin non plus, c'était pour lui une zone de repli.
Mais remonter la Marne, c'est aussi une rencontre avec la l'histoire de la littérature: Bossuet à Meaux, La Fontaine à Chateau-Thiery, Diderot à Langres ou encore André Breton qui fut de passage à Saint Dizier affecté en 1916 dans un hôpital psychiatrique...
C'est également la traversée de la riche Champagne avec son coté austère marqué par le jansénisme, mais qui ne peut laisser indifférent l'amoureux du vin. Chaque soir il s'offre une flute, il n'est jamais déçu par ce moment de douceur au contraire de la gastronomie qui s'avère souvent décevante, heureusement  après son repas il savoure un cigare... C'est un amoureux de la vie qui traverse les campagnes, il en hume les odeurs, reste à l'affut des bruits et ne se se lasse pas de cette rivière que longea le roi Louis XVI de retour de Varennes.
C'est aussi un retour sur son enfance, et ce premier voyage qu'il fit avec ses parents après la deuxième guerre mondiale à Vitry le Francois où son père retrouvait un ami de régiment, boulanger comme lui.
Après avoir traversé les terres de Champagne, le journaliste termine son trajet dans les terres sinistrées par la désindustrialisation, la Haute Marne est un département qui voit sa population diminuer...

C'est avec un plaisir infini que nous avons suivi le parcours de Jean-Paul Kauffmann à travers une région qui nous est inconnue, il fait des rencontres, certaines sont surprenantes comme cet étudiant japonais venu étudier les mouvements d'eau de la rivière, il aime ses contacts, prendre le temps d'écouter, ce n'est pas un homme pressé, son parcours quotidien est en moyenne de 10 km.

Extrait :
"L’hôtellerie et la gastronomie furent, pour nous, des sujets de conversation inépuisables auxquels s'ajoutait l'étude du comportement de nos contemporains dans leur milieu naturel. Nous pratiquions cette éthologie marnaise chaque soir, pimentée d'observations sur le patron, la serveuse, le directeur qui invite son staff, la commercial solitaire assis à la table d'à coté, l'habitué notable du coin traité avec obséquiosité: le "salaud sartrien" comme nous le nommions. Le type odieux de prétention, persuadé que les hommes ne peuvent se passer de son existence. Celui- là on ne le ratait pas: ce spécimen convaincu de son importance était à ranger dans la catégories des considérables.
Des considérables nous en voyions aussi beaucoup à la télé. "Se croire un personnage est fort commun en France", notait déjà La fontaine. Souvent quand la chère est mauvaise, le patron branche en effet la télévision. L'initiative est loin d'être idiote, elle permet de faire oublier la tristesse de la pitance."

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