jeudi 31 octobre 2013

L'échange des princesses - Chantal Thomas

Pour sceller définitivement une ère de paix entre le royaume de France et celui d'Espagne, Philippe d’Orléans, régent depuis la mort de Louis XIV se lève un bon matin avec une idée géniale: faire un mariage croisé, l'un unissant Louis XV et Anna Maria infante d'Espagne, l'autre Don Luis prince des Asturies à la fille du régent , Louise Elisabeth d'Orléans ... les  quatre promis alors âgés de 4 à 14 ans... Les diplomates négocient les unions qui sont scellées par l'échange des deux princesses chacune rejoignant par delà les Pyrénées et dans la  plus complète solitude son futur royaume... 
Les deux petites filles de 4 et 12 ans se retrouvent en pays étrangers définitivement éloignées de leurs familles. A Paris, Anna Maria débarquée avec ses poupées imagine Louis XV comme un prince charmant idéalisé, mais ce dernier ne répond pas à ses attentes, déjà pris dans les intrigues de cour pour qui la princesse n'est que quantité négligeable.
En Espagne, Louise Elisabeth arrive malade, hostile à son sort et refuse de se plier à l'étiquette affichant au contraire une totale exentricité, elle s'attire ainsi la haine de la famille royale espagnole quelque peu dégénérée. Le prince impatient de copuler cherche à séduire la jeune fille, en vain cette dernière se refuse à lui.
Le beau projet du régent tourne au pourrissement...

Magnifique roman de Chantal Thomas, qui se lit d'une seule traite. Elle donne vie à ses personnages, son écriture a quelque chose de cinématographique, elle nous plonge avec sensualité dans l'univers impitoyable des monarchies du XVIII° à l'ambiance morbide et perverse,  où l'enfant n'est rien, aucune place pour ses sentiments. Déjà, nous pressentons la déliquescence de ce régime tenu par la bigoterie où les monarques en représentation permanente partagent leur temps entre messes et chasses...

Un chateau en Italie - Valeria Bruni Tedeschi

Louise, 43 ans, riche héritière se trouve prise dans une course contre la montre sur tous les plans de sa vie affective. Son frère adoré Ludovic malade du sida est en fin de vie, son désir d'avoir un enfant s'amenuise... Par ailleurs, se pose la question de la vente du château familial situé en Italie, et d'un tableau Brueghel , vente rendue nécessaire notamment pour faire face à un contrôle fiscal mais à laquelle s'oppose Ludovic.
C'est à ce moment de sa vie que Louise rencontre Nathan, un acteur beaucoup plus jeune qu'elle, qui termine le tournage d'un film réalisé par son père.... Nathan est peut être la rencontre inespérée pour Louise.
C'est de sa propre vie que Valeria Bruni Tedeschi s'inspire pour écrire ses fictions, un genre classique du cinéma déjà rencontré chez Woody Allen, Nani Moretti, ou encore dans les 400 coups de François Truffaut ou certains films de Arnaud Desplechin, voire le Fanny et Alexandre de Ingmar Bergman, nous pourrions ainsi multiplier les exemples ... Ce qui fait sa singularité c'est sa situation d'héritière, de rentière  qui pour certains rendent ses états d’âmes inacceptables...
Au fond elle nous rassure, elle nous dévoile l'universalité des douleurs et sentiments  auxquels elle se retrouve confrontée  nul ne peut y échapper: la mort d'un proche, le temps qui passe et que rien ne peut retenir... Mais elle nous séduit également par son art de la comédie, son sens du burlesque soutenue par une belle troupe d'acteurs dont sa mère absolument remarquable... Les femmes sont ici un peu allumées, parfois bigotes et franchement ennuyées d'avoir à gérer cette fortune colossale qui ne se vit pas si facilement surtout lorsqu'on a rien fait pour l'obtenir ...mais pour autant elles n'ont pas idée à y renoncer, même si cela fausse tous les rapports sociaux !
Et nous nous aimons les films de Valerie Bruni Tedeschi

mercredi 30 octobre 2013

Heimat II - L'exode - Edgar Reitz

Nous retrouvons Jakob en prison où il se rapproche d'un compagnon de cellule pour mettre au point son projet de départ vers le Brésil. Libéré, il se prépare à partir mais il doit renoncer à son projet lorsqu'il découvre que son frère et son épouse désespérés par la mort de leur fille décident de quitter leur pays sans avenir. Jakob reste au pays près de ses parents vieillissants,sa mère est atteinte de la tuberculose. Il se marie mais s'il ne participe toujours pas au rude travail de la terre, il   met définitivement au point la machine à vapeur qui vient aider son père au quotidien...Jakob correspond avec l'élite intellectuelle berlinoise dont il conteste avec justesse les travaux sur les populations indiennes du Brésil, il y trouve reconnaissance et considération  ...
Deuxième partie qui nous a bien plus enthousiasmé que la première, surement du fait de la connaissance de tous les personnages dont  nous avons le désir de connaitre le destin . La nature est omniprésente dans chaque plan, l’Allemagne voit partir ses forces vives malgré les  injonctions dominicales du pasteur, le pays du romantisme se sent impuissant à trouver les réponses face à une terre qui semble devenue hostile.
Sublime noir et blanc, nous avons retrouvé dans les images de Edgar Reitz, le même désespoir que dans les pages du premier volume de la saga des émigrants, mais à la différence de Vilherm Moberg, la caméra de Edgar Reitz ne suit pas ceux qui partent pour l'Amérique, elle reste attachée à la patrie...et nous espérons avec impatience connaître  la suite des aventures de Jakob et des siens ...

Vu le dimanche 27 au cinéma l'arlequin

mardi 29 octobre 2013

Les Voyages de Sullivan - Preston Sturges (1941)

Sullivan, un cinéaste en vogue explique à ses producteurs son désir de ne plus tourner de comédies, un genre qui lui semble devenu impossible au vu de la crise économique que traverse son pays. Il souhaite réaliser un film qui témoigne d'un homme ordinaire confronté aux difficultés de la vie. Les producteurs lui opposent son ignorance du peuple, le cinéaste ayant eu une vie privilégiée depuis sa plus tendre enfance..
Sullivan en convient et annonce son départ sur les routes en tenue de vagabond avec 10 cents en poche pour découvrir la vie des victimes de la crise... Un parcours qui n'est pas sans embuches mais qui va lui permettre de découvrir l'amour. Les imbroglios se succèdent qui vont mener le pauvre Sullivan en prison, il assiste au milieu des prisonniers à une séance de cinéma où sont projetés des films de Disney; les mésaventures de Pluto déclenchent le rire de ses compagnons d'infortune, un vrai moment de connivence où les barrières sociales tombent, ... Sullivan découvre l'universalité du burlesque, le vrai pouvoir de la comédie et du bonheur qu'elle peut apporter aux plus défavorisés, .
De retour à Hollywood, le cinéaste n'a plus d'états d’âmes pour réaliser des films légers et drôles.
Film sublime de Preston Sturges, un hommage aux comédies du cinéma américain et notamment  à deux géants du genre, Ernst Lubitsch et Frank Capra. Un film remplit d'humanité servi par un duo d'acteurs plutôt inattendu dans ce répertoire de la comédie: John Mc Crea et Veronica Lake, Preston Sturges se hisse au niveau de ses modèles. Il réalise ici le film rêvé de Sullivan, parler des désastres de la crise économique sans renoncer à la comédie !

Film vu dimanche 27 Octobre, dans le cadre du ciné club de Claude Jean Philippe au cinéma l'Arlequin.

lundi 28 octobre 2013

Vaux le Vicomte






Merveilleux château de Vaux le vicomte voulu par Nicolas Fouquet le surintendant des finances de Louis XIV. Conçu par l'architecte Louis Le Vau, le peintre Charles Le Brun et André le Notre le paysagiste, le château et ses jardins sont inaugurés le 17 aout 1661, une fête de toute splendeur organisée par André Vatel en présence du roi Louis XIV, Molière y donne une représentation des "Fâcheux".
Un sommet dans la carrière de Nicolas Fouquet, pas très perspicace tout de même puisqu'il ne voit pas ce qui se trame contre lui. et notamment la désastreuse campagne que Colbert mène à son encontre... Le 5 septembre, il est arrêté à Nantes par d'Artagnan  sur ordre du Roi. Nicolas Fouquet finit sa vie en prison.
Vaux le Vicomte est une pure merveille, un exemple exceptionnel de jardins à la française Louis XIV ne s'y trompe pas, ses créateurs se retrouvent à la tête du projet royal: le château de Versailles.

dimanche 27 octobre 2013

Lou Reed (02/03/1942 - 27/10/2013)

Lou Reed est mort, la nouvelle tombe telle un couperet. Lou Reed est mort, il n'a jamais cessé de nous accompagner depuis notre adolescence, cet été encore nous avions amené son album "Berlin" qui fêtait ses 40 piges lors de notre séjour dans la capitale allemande, nous nous étions alors rendus au milieu de la forêt de Grunewald sur la tombe de Nico, celle qui était venue lui disputer le leadership du Velvet Underground à la fin des années 60.
Ce soir, nous avons envie de ressortir l'album New-York de 1989, et notamment le titre Dirty Boulevard... pour rappeler que le poète Lou Reed traitait de l'exclusion et des bas fonds, il était le chanteur des parias.

Salut l'artiste !


Gaetan Roussel - Orpailleur

Gaëtan Rousel est de retour avec un deuxième album solo. Louise Attaque, Tarmac, une participation essentielle au dernier album de Alain Bashung, Bleu Pétrole, la carrière du chanteur ressemble à un parcours sans faute, en faisant une des figures les passionnantes de la scène Rock depuis Noir Désir. 
Orpailleurs a un coté patchwork où Gaëtan Roussel ne se laisse enfermé dans aucune case si ce n'est une recherche de la simplicité qu'il chante comme un aveu dans son premier titre, la simplicité: " "C’est rien mais c’est si compliqué, la simplicité, ça paraît toujours avoir existé".

Gaetan Roussel trace sa route, elle se révèle magnifique, alors c'est pour nous un bonheur de l'accompagner.
Et puisque tout a commencé avec "je t'emmène au vent", c'est avec sourire que nous écoutons "Eolienne" comme une suite logique.

Orpailleur de Gaëtan Roussel est notre album de la semaine !


samedi 26 octobre 2013

Voyage au bout de l'enfer - Michael Cimino

Revoir sur grand écran "Voyage au bout de l'enfer" se révèle une épreuve plus bouleversante que sa première découverte. Dés les premiers plans nous sommes étreints d'un malaise, d'une douleur , les scènes de joie du mariage dans la tradition russe deviennent terribles, insoutenables  parce que nous connaissons le destin tragique des trois héros qui vont découvrir le bourbier vietnamien...
Après 1H10 avec une sublime transition d'une totale simplicité , nous basculons dans l'horreur de la guerre, dont  nous ne verrons définitivement jamais les parties de roulette russe, un chemin qui mène vers l'enfer de Saigon dans des scènes absolument hallucinantes où la capitale vietnamienne n'est qu'une reproduction de Sodome et Gomorrhe. On ne peut pas se remettre d'un tel voyage, la jeunesse, les plaisirs de la vie sont définitivement confisqués. Steven revient totalement mutilé, Mick est brisé, il repart en vain à Saigon pour tenter de ramener Nick totalement détruit, déjà parti dans un autre monde.
Ce qui donne la force à  ce film, c'est la perfection de sa mise en scène, notamment lors de la première partie, la soirée de mariage impressionnante. De bout en bout,une totale maitrise, cela reste absolument inégalable; le jeu des acteurs Robert de Niro, Christopher Walken, John Savage  est extraordinaire de justesse,  le drame, les turpitudes de l'esprit se découvrent travers un simple regard, c'est un film plutôt silencieux. Nous resterons à jamais hanté par le regard perdu de Christopher Walken dans les fins fonds de Saigon. Il convient à noter la présence de John Cazale, compagnon de Meryl Streep, qui participa au film malade c'est d'ailleurs pour être à ses cotés que l'actrice accepta un rôle secondaire où elle est absolument lumineuse, il mourut avant la fin du tournage mais toutes ses scènes purent être tournées par Cimino.
C'est à nos yeux le film le plus fort sur le drame du Vietnam, mais plus généralement sur la barbarie de la guerre !
Il est malheureux que Hollywood n'aime pas les cinéastes, car le génie de Michael Cimino aurait mérité un autre traitement... 

Film vu à la filmothèque du quartier latin

jeudi 24 octobre 2013

Heimat I - Chronique d'un rêve - Edgar Reitz

Heimat,chronique d'un village fictif de Rhénanie Schabbah tout au long du XXème siècle fut un événement télévisuel majeur où pour la première fois le peuple allemand s'est retourné sur son Histoire tourmentée du siècle passé.
Edgard Reitz offre deux nouveaux épisodes qui nous ramènent en 1842, l'Allemagne n'existe  pas, son unification intervenant près de trente ans plus tard. Nous découvrons la vie du village à travers la famille d'un forgeron, Johan Simon désespéré de son fils cadet Jakob qui passe sa vie plongé dans les livres, notamment des récits sur les indiens d'Amazonie. Le retour de l'armée de Gustav le fils ainé réjouit Johann qui espère là un vrai soutien. Jakob aime se promener dans la nature, regarder les oiseaux, et découvrir par hasard deux jeunes filles se rouler toutes nues dans un champ ... Jakob tombe sous le charme d'une d'elle , les premiers émois amoureux pour un garçon en quête d'absolu...
La pauvreté frappe la région, les famines se succèdent, les familles sont de plus en plus nombreuses à émigrer en Amérique, un voyage qui fait rêver Jakob. Un moyen pour lui d"échapper à la sévérité paternelle.
Il choisit de fuir le village pour rejoindre sa soeur bannie depuis qu'elle a épousé un vigneron catholique...
Une histoire qui nous a rappelé "la saga des émigrants" de Vilhem Moberg, son coté romanesque est assurément le point fort de cette chronique, la partie la plus faible étant sa réalisation un peu trop académique, même si des passages sont absolument magnifiques, nous pensons notamment à une scène où nous voyons passer des émigrants sur une route qui nous renvoie à bien des films de John Ford. Le noir et blanc avec un coté "papier glacé" dessert quelque peu le film, donnant un coté parfois artificiel à cette chronique...
Mais au delà de ces réserves, nous avons été emportés par cette histoire, impatients d'aller découvrir sa deuxième partie.

mardi 22 octobre 2013

Portraits - Dezso Kosztolanyi

Un livre composé de trente cinq portraits de personnes venant de milieux divers et variés. A chaque fois le même principe, une courte présentation, un entretien entrecoupé  parfois d'un commentaire suivi  d'une conclusion. Notre enquêteur part ainsi à la rencontre notamment d'une sage femme, d'un curé, d'un jockey, d'un éboueur, d'un diplomate.... se faisant raconter  détails et anecdotes, aimant à découvrir les dessous du métier, tous ont en commun d'aimer leur métier et de le défendre avec passion. Le ton est toujours enjoué, joyeux, ainsi il rencontre  une française venue s'installer à Budapest, il l'interroge sur la langue hongroise que la jeune fille a eu à domestiquer:

- Quel effet la langue hongroise a-t-elle exercé sur vous?
- Elle m'a aussitôt fascinée parce qu'elle me semblait virile. une langue d'hommes.
- Quels sont les premiers mots que vous avez appris?
-Oui et non
- Lequel avez-vous utilisé en premier?
-En tant que jeune fille, le "non", bien entendu.

Légèreté, ironie, ces portraits sont une véritable ode à la vie,  toute mérite d’être vécue. Ecrits dans les années 20, ces courts textes humanistes ne sont pas sans rappeler les portraits du photographe allemand August Sander ou ceux de Irving Penn montrant des travailleurs dans leur environnement professionnel . Nous pouvons nous interroger sur la réalité de ses entretiens, qui ne sont peut être que le fruit de l'imagination de l'écrivain mais cela est finalement sans intérêt. Lorsque Pierre Lazareff demandait à Blaise Cendrars si il avait réellement pris le Transsibérien, le poète lui répondait: "qu'est ce que ça peut te faire puisque je vous l'ai fait prendre à tous?" . Deszo Kostolanyi aurait pu faire la même réponse à ceux qui auraient pu douter de la réalité de ses entretiens.

Ce recueil nous pensions le lire sur un long terme en y piochant de temps en temps un entretien, en faire un compagnon de route pour des trajets en transport, ou remplir des périodes d'attente mais il s'est révélé totalement addictif, une fois commencé nous l'avons dévoré.

Edité chez un petit éditeur (La Baconnière - Ibolya Virag) , il n'est pas toujours dans les rayons de librairie, n'hésitez pas à le commander.

lundi 21 octobre 2013

9 mois ferme - Albert Dupontel

Les critiques ont bien fait leur travail. Nous n'avions pas prévu d'aller voir la dernière comédie d'Albert Dupontel , trouvant la bande annonce plutôt lourde mais les articles  élogieux nous ont poussé au cinéma. Et convenons en, nous ne l'avons pas regretté; cette comédie est particulièrement réussie, traitant d'un sujet grave à travers un humour loufoque et parfois gras, c'est en quelque sorte Raymond Depardon revisité par les Monthy Python. Les deux sont d'ailleurs présents dans ce film, où nous retrouvons dans ses fonctions une des juges de "10ème Chambre" documentaire de Raymond Depardon et que Terry Gilliam fait une apparition plutôt remarquée en serial killer.
Histoire d'une juge d'instruction sérieuse, plutôt rigide qui découvre une grossesse, plutôt inexpliquée vu son mode de vie... Mais pas de miracle divin, tout s'explique, la juge un soir de réveillon contrainte de délaisser ses dossiers pour une fête débridée entre collègues se retrouve dans les bras d'un inconnu qui se révèle être le suspect d'un crime particulièrement odieux. Mais il convient de se rappeler qu'être mis en examen ne signifie pas être coupable...
Sandrine Kiberlain après nous avoir réjouie dans Tip Top de Serge Bozon confirme que l'éventail de son jeu est sans limite, elle est énorme, elle forme avec Albert Dupontel un couple improbable mais peut être pas sans avenir... Le film vaut également pour ses seconds rôles qui donnent une vraie densité à cette comédie grinçante et hilarante...
Le ministère de l'intérieur, n'est pas à son avantage mais au vu de l'actualité récente toute ressemblance n'est peut être pas fortuite !

dimanche 20 octobre 2013

La femme du boulanger - Marcel Pagnol

On pourrait sourire du jugement  d'Orson Welles faisant de Raimu le plus grand acteur du monde, mais après avoir revu la femme du boulanger de Marcel Pagnol on partage facilement cette opinion tant sa prestation est énorme. Et si ce film est célèbre pour sa chatte Pomponnette, c'est aussi un sublime duo d'acteur Raimu et Ginette Leclerc, le film faisant la célébrité de cette dernière.
 Histoire d'un boulanger qui voit sa jeune femme partir avec un berger, déprimé il n'est plus en état de faire du pain pour le grand désarroi du village qui va s'organiser pour ramener la jeune femme dans son foyer... un film que Claude Jean Philippe dans sa présentation a qualifié "Iliade rustique"....
Tourné en 1938 d'après un roman de Jean Giono qui avait trouvé son inspiration dans un fait réel , Marcel Pagnol pensait tenir un petit film mineur pour assurer une activité à ses studios . Grâce à ses succès, Marcel Pagnol avait acquis une indépendance financière qui lui permettait d'avoir une totale maitrise sur ses films, un privilège rare qu'il partagea avec Charlie Chaplin mais qui l'obligeait à tourner régulièrement.
Loin d'être un petit film, la femme du boulanger est un drame intime où Pagnol revient sur le thème de la passion amoureuse déjà traité dans son cycle marseillais (Marius - Fanny - César). Tourné dans un petit village de Provence, il  fait le portrait  de la France de la IIIème République quand le curé et l'instituteur se livraient une guerre spirituelle sans merci.Une discussion sur les voix que Jeanne d'arc crut entendre est un des moments les plus savoureux du film... Marcel Pagnol fut un grand cinéaste.
Le film qui n'existe pas en DVD est devenu rare, ce fut un vrai bonheur que de le voir sur le grand écran de l'arlequin!

Anna Calvi - One Breath

Janis Joplin, Patti Smith, Kate Bush, PJ Harvey sont les grandes dames de notre discothèque. Après avoir fait une écoute du dernier album de la jeune chanteuse anglaise Anna Calvi, nous ne doutons plus qu'elle vienne rallonger cette liste... One breath confirme tout son talent annoncé par premier album déja enthousiasmant...
Nous traverserons cette semaine au son de la voix envoutante de cette blonde londonienne, "One Breath" est notre album de la semaine !


samedi 19 octobre 2013

Omar - Hanny Abu-Assad

Cisjordanie, Omar un jeune Palestinien franchit à la corde le mur dressé par les israéliens, c'est plutôt dangereux et culotté. Parfois on lui tire dessus, et si des policiers l'attrapent, il subit humiliations et tabassages. Il ne supporte plus ce barrages, gravir ce mur est un acte de liberté, le moyen le plus rapide pour rejoindre ses deux amis d'enfance Tarek et Amjad avec qui il a décidé de créer une cellule de résistance. C'est aussi l'occasion de croiser Nadia, la jeune sœur de Tarek dont il est secrètement amoureux.
Les trois jeunes, se décident à mener une opération contre une caserne israélienne comme acte fondateur, un soldat est tué . Les forces israéliennes sont à leurs trousses. Omar est arrêté, emprisonné, il subit des séances de tortures, les services israéliens souhaitent en faire un collaborateur, c'est le début d'un angoissant jeu de manipulation.
Brillant thriller, où le cinéaste évite toute forme de manichéisme qui aurait plombé son film  . On comprend dés le premier plan qu'il n'existe pas de vie tranquille en territoire palestinien. Une superbe histoire d'amour tragique et romanesque des poursuites dans les rues étroites de Cisjordanie qui peuvent faire penser aux méandres des traboules lyonnaises vues notamment dans l'armée des ombres de Jean-Pierre Melville. les jeunes ont voulu engager la lutte, mais l'adversaire est bien trop fort usant de toutes les armes psychologiques pour les manipuler ...
Un film d'une grande intelligence qui nous rappelle l'absurdité de la situation désespérante du Proche Orient,    qui semble sans avenir depuis la mort tragique de Itzhak Rabin.

vendredi 18 octobre 2013

Ibrahim Maalouf en concert

Soirée des premières ce soir pour Ibrahim Maalouf qui interprétait pour la première fois sur scène avec ses musiciens les morceaux de son prochain album "Illusion" qui doit sortir le 5 novembre prochain.Ce fut aussi pour lui l'occasion d'user d'une trompette qu'il venait juste de réceptionner. Un album qui sera assurément plus rock que les précédents, mais aussi plus festif. A son quintet habituel, il a ajouté un trio de trompettes qu'il a initié aux quarts de tons donnant à l'ensemble une pêche incroyable...

Un concert qui démarre sur les chapeaux de roue, la musique sonne fort mais elle est remplie de sonorités venues d'orient, et lorsque se détache les solos de trompette on atteint le sublime, comme ce final du troisième morceau où il laisse tomber sa trompette pour terminer en sifflant dans un silence admiratif...
Une  pause pour nous offrir un court retour sur les morceaux de ses précédents albums, et de nous offrir trois notes de la Javanaise, comme si cette chanson était devenue l'hymne du festival "jazz in Clamart", avant de revenir sur ses dernières compositions absolument enthousiasmantes. Ibrahim Maalouf voulut une soirée festive, ce fut une réussite, s’effaçant à l'occasion devant ses musiciens qui purent exprimer tout leur talent dans des solos réjouissants ... Une générosité essentielle pour donner à sa fête  toute sa dimension !

Nous connaissions la passion du musicien d'origine libanaise pour Miles Davis, il ne nous étonnerait pas qu'il ait écouté aussi Led Zeppelin dans ses jeunes années. Ce fut un concert de feu !

mercredi 16 octobre 2013

Le troisième homme - Carol Reed

Lorsque Orson Welles fait le comédien ce n'est pas uniquement pour son pur plaisir, mais pour financer ses propres projets,notamment après l'échec commercial de Macbeth. Ainsi nous le trouvons à l'affiche du film de Carol Reed "le troisième homme" , histoire d'un trafiquant de pénicilline Harry Lime  à Vienne au lendemain de la seconde guerre mondiale; recherché par les américains, il est retrouvé mort  le jour même où son meilleur ami Holly Martins, un modeste écrivain débarque dans la capitale autrichienne, la ville est alors divisée en plusieurs secteurs . Intrigué par les activités de son ami, il cherche à comprendre les raisons de sa disparition.
Il y avait fort longtemps que nous avions vu ce film de Carol Reed et nous avons été finalement plutôt déçus, trouvant le tout assez lent, nous nous ennuyons rapidement malgré un sublime noir et blanc fortement influencé par l'expressionnisme d'avant guerre. Il ne se passe pas grand chose jusqu'au moment où apparait Harry Lime , plan magnifique où le visage de Orson Welles apparait alors que tous le croit mort et enterré ... La fin est plus intéressante avec notamment une course poursuite dans les égouts de la capitale. La musique du film qui revient comme une ritournelle finit par devenir particulièrement agaçante.
Dans son livre d'entretiens, Peter Bogdanovitch suspecte Orson Welles d'avoir contribué à l’élaboration de certains plans notamment celui dans lequel il apparait pour la première fois à l'écran. Le cinéaste n'en revendique aucun, il avoue juste avoir rédigé le monologue qu'il dit sous la grande roue à son ami Holly Martins, interprété par Joseph Cotten:
"Et ne sois pas triste.... Après tout ce n'est pas si terrible. Tu sais ce qu'on dit: En Italie, pendant trente ans de règne des Borgia, le pays a connu la guerre, la terreur, le meurtre, les bains de sang... et a produit Michel Ange, Léonard De Vinci et la Renaissance. En Suisse, ils ont l'amour fraternel, cinq siècles de paix et de démocratie, et qu'est ce qu'ils ont produit? ... Le coucou"

Film vu dans le cadre de 2013, année Orson Welles"

mardi 15 octobre 2013

Marc Berthoumieux et ses amis - Jazz in Clamart

Nous nous sommes étonnés au départ de la volonté de notre cité de créer un festival de Jazz. Un de plus, nous nous sommes dit, ne voyant pas ce qu'il pouvait apporter à ceux existants. Son nom "Jazz in Clamart" nous a fait sourire, au vu de la dimension du projet beaucoup plus modeste que le gigantesque "Jazz in Marciac".
Pourtant nous devons reconnaitre que cela égaie la vie de la cité plongée dans le gris automnal, et nous a permis de découvrir que Clamart avait des liens avec cette musique venue d'Amérique, puisque des noms de la scène française en ont fait leur lieu de résidence. Nous avions pu ainsi   assister  à un enregistrement du Duke Ellington Orchestra dirigé par Laurent Mignard au conservatoire Henri Dutilleux.
Lors d'une promenade, l'été dernier nous avons trouvé le lien entre le petit "Jazz in Clamart" et le géant "Jazz in Marciac" à travers la galerie d'art "l’âne bleu", un endroit incontournable de la cité gersoise tenue par une ex-clamartoise curieuse, au regard distingué. Les expositions y valent le détour !

Pour sa deuxième édition, le festival s'ouvrait par une soirée consacrée à Marc Berthoumieux , clamartois et accordéoniste qui a fait le choix de célébrer son instrument en compagnie de deux amis Lionel Suarez et le toujours jeune Marcel Azzola, l’accordéoniste qu'il aimait aller écouter lorsqu'il était petit garçon .... accompagnés par l'extraordinaire pianiste Giovanni Mirabassi, le contrebassiste Jèrome Regard et le batteur Etienne Ceccaldi. Soirée d'amis comme le réserve si souvent la scène Jazz, où de nombreux standards furent revisités,  notamment des reprises de Pat Metheny, Sting ou Michel Petrucciani ou encore des standards de la chanson française "A la claire fontaine" ou "sous le ciel de Paris". Mais aussi des compositions personnelles comme Amazone (ou la valse Kenzo) sublime morceau joué à trois accordéons. Mais définitivement la javanaise de Serge Gainsbourg semble être la chanson emblématique de ce festival, l'an dernier Roberto Fonseca nous offrit sa version, elle fut à nouveau à l'honneur ce soir!

Une soirée joyeuse et légère, un pur moment de bonheur !

lundi 14 octobre 2013

Esprit d'hiver - Laura Kasischke

C'était un signe, ce livre nous l'avons perdu dans une salle de cinéma, celle où nous avons vu Blue Jasmine le dernier film de Woody Allen. C'est la première fois qu'une telle mésaventure nous arrive , elle est peut être l'expression d'un manque d'affection pour ce roman dont on nous vantait les mérites un peu partout.
Mais nous avons insisté, nous l'avons acheté à nouveau  pour en connaitre la fin, espérant qu'elle nous emporterait. Il n'en fut rien nous nous sommes embourbés dans le blizzard du Michigan, spectateurs lointains nous sommes restés étrangers à l'atmosphère si particulière voulue par l'auteur.
Unité de lieu, unité de temps, tous les éléments propres à la tragédie sont là. C'est le jour de Noël, Holly est la première à se lever accompagnée par cette phrase mystérieuse et prémonitoire:“Quelque chose les avait suivis depuis la Russie jusque chez eux.” .  Son époux part pour l'aéroport voisin chercher ses parents venus  partager cette journée de fête. Le blizzard se lève, terrible tempête de neige, les invités se décommandent, Holly se retrouve dans un huis clos improvisé avec sa fille adoptive Tatiana ...
Quelques heures d'enfermement pour découvrir le passé de Holly, l'ablation des ovaires et de ses deux seins subie alors qu'elle est une jeune femme pour prévenir un cancer quasi certain du fait de son patrimoine génétique et ainsi éviter le destin tragique de sa mère et de sa sœur. 
Tatiana enfant abandonné de deux ans dans un orphelinat au fin fond de la Sibérie où règne une grande misère sociale fut adoptée, elle est devenue une adolescente américaine de quinze ans. Le comportement lunatique de Tatiana devenue soudainement imprévisible en ce jour de Noël  inquiète, sentiment renforcé par un Iphone qui se met à dérailler, des appels étranges et anonymes se succèdent...
Cela aurait pu être un grand roman sur l'adoption, mais à vouloir installer une atmosphère inquiétante, Laura Kasischke nous détache de ses personnages qui  semblent se réduire à un prétexte pour créer un thriller psychologique , rendant le tout bien ennuyeux et plutôt prévisible voire artificiel mais il y a peut être là de quoi faire un grand film !

dimanche 13 octobre 2013

Wind - Ibrahim Maalouf

Puisque la semaine qui s'engage sera Jazz dans notre cité clamartoise, nous avons décidé de poser sur notre platine le dernier album de Ibrahim Maalouf le trompettiste franco-libanais, né en 1980 dans une famille de musiciens, à Beyrouth, en pleine guerre guerre civile. Il trouva refuge en France et grandit dans notre pays . Vendredi, il donnera un concert dans le cadre du festival de Jazz in Clamart.
Wind est une commande de la cinémathèque qui a demandé au trompettiste de composer la musique du film muet de René Clair "La proie du vent" tourné en 1927. C'est la rencontre entre Miles Davis et la musique orientale, difficile de ne pas penser à "Ascenseur pour l'échafaud" à l'écoute de cette bande originale où à la tête d'un quintet le musicien fait un retour vers un jazz plus "bebop" sans renoncer à des sonorités orientales ce qui n'est pas sans rappeler l'atmosphère des vieux films policiers en noir et blanc. Une musique élégante et diablement envoutante !

Wind de Ibrahim Maalouf est notre album de la semaine !


samedi 12 octobre 2013

Le destin tragi-comique de Tubby et Nottuby

Un soir de Noël sur les bords de la Tamise, deux clochards ont décidé de mettre fin à leurs jours ne supportant plus la misère. Ils s'associent dans leur démarche pour se donner le courage de sauter dans l'eau froide du fleuve, mais ils n'y arrivent pas.... Pourtant c'est la crise économique, ils ne sont pas seuls à avoir sombré dans le désespoir , on attend ici ou là le cri de désespérés se jetant du haut d'un pont. Une guerre s'annonce dans le Moyen Orient pour mettre la main sur la dernière réserve de pétrole... Nos deux compères, Tubby et Nottuby s'engagent finalement dans les rangs de l'armée toujours à la recherche de chair à canon.  C'est le début d'une grande aventure où la mort n'est jamais loin ....
Elle Sophie Brech est britannique, lui Louis Fortier est québecois, la France est devenue leur patrie... Ils forment un duo de clowns réjouissant à l'humour anglais, Shakespeare est leur source d'inspiration, mélangeant sans complexe Jules César et Hamlet....Burlesque et tendresse se mêlent .... Tous les arts du théatre sont convoqués, pantomime, théâtre d'objets et  d'ombres, ils utilisent le corps pour s'exprimer mais ils causent aussi et n'oublient pas de pousser la chansonnette.... Ils sont drôles et poétiques, ils sont deux merveilleux clowns !

La vie est belle !

La vie d'Adèle (Chapitre I et II) - Abdelattif Kechiche

La caméra de Abdelattif Kechiche, filme au plus près, elle colle à ses personnages pour capter l'indicible, l'émotion secrète, il filme la peau, ses nervures et pour que cela fonctionne le comédien ne doit pas jouer l'émotion, il doit la ressentir, il doit la vivre.... exercice assurément difficile, compliqué, douloureux mais d'une beauté bouleversante, où tout semble naturel...  Kechiche filme la vie, la vérité parce que l'émotion n'est justement jamais jouée, rien n'est factice, en cela il est un enfant du cinéma de Maurice Pialat. Mais à la différence du réalisateur de "A nos amours", le regard posé par le cinéaste sur ses personnages est toujours bienveillant, aucune trace de misanthropie
Histoire d'une passion amoureuse entre Adèle une jeune lycéenne et Emma une étudiante en quatrième année aux Beaux Arts aux cheveux bleus, suivie sur plusieurs années ...Les deux jeunes femmes sont magnifiquement incarnées par Adèle Exarchopoulos et Léa Seydoux; la triple palme d'or réunissant à juste titre mise en scène et interprétation....
 Elle ne viennent pas du même milieu, Adèle issue d'un milieu modeste découvre la culture à travers ses professeurs, notamment les grands textes de la littérature dont la vie de Marianne le roman inachevé de Marivaux qui devient son compagnon de route, Emma appartient à une classe privilégiée où la culture fait partie du quotidien.
La vie passionnée d'Adèle avec Emma dont elle devient le modèle et la source d'inspiration n'a finalement que peu d'influence sur la jeune fille. Après des années de vie commune elle ne montre pas véritablement une grande connaissance pour la peinture, elle ne fut jamais plus qu'une muse pour son ainée; au delà de la passion des corps, elles sont finalement restées fidèles à leur milieu, une faille qui avec le temps pose problème. En dehors de leur domicile, elles vivent chacune dans leurs mondes qui restent étrangers l'un à l'autre.
Adèle réalise sa vocation: devenir professeur des écoles par passion des enfants mais aussi pour rendre à l'école tout ce qu'elle lui a apportée. Et si Emma décèle chez la jeune fille qui tient un journal intime un vrai talent littéraire, Adèle ne change pas sa ligne de conduite malgré les encouragements de son ainée, l'IUFM est son univers.

La vie d'Adèle, chapitres 1 et 2 est un film magnifique sur la passion et la transmission;  les scènes défilent, nous accrochent nous donnant aussi à voir le portrait de toute une génération... La caméra ne se limite pas à filmer la passion de deux corps, elle se glisse dans les manifestations où comme à chaque génération les jeunes réclament un monde plus juste, plus tolérant, mais aussi dans les salles de classe où Kechiche rappelle comme dans ses précédents films que l'école est l'institution républicaine qui doit permettre à chacun de trouver sa place, mais aussi à tous d’accéder à la beauté des chefs d'oeuvre de l'humanité.

Nous avons été scotchés sur notre fauteuil,  toute notion de temps fut oubliée, submergés par ce grand moment de cinéma, le temps de découvrir ce film immense dont il ne fait déjà pas de doute qu'il fait partie du patrimoine des grands films du cinéma le jour même de sa sortie!

jeudi 10 octobre 2013

Daniel Duval (28/11/1944 - 10/10/2013)

Nous venons d'apprendre la mort de Daniel Duval. Si tout le monde cite la dérobade le film qu' il a réalisé où il jouait un proxénète et Miou Miou  une prostituée, pour nous c'est le Fils de l'épicier de Eric Guirado qui nous vient immédiatement à l'esprit, il y tenait un rôle magnifique de père irascible. Il nous avait également fortement impressionné dans le film de Jeanne Labrune Si je t'aime prends garde à toi, où il partageait l'affiche avec Nathalie Bayet et Jean-Pierre Darroussin.
Doté d'un charisme impressionnant, Daniel Duval n'avait pas besoin d'en faire beaucoup pour marquer sa présence, nous aimions son jeu sobre et efficace, il faisait partie de ces taiseux dont un regard suffisait pour exprimer le fond de la pensée.

mardi 8 octobre 2013

Le cinéma au féminin

Rebecca Zlotowski, Axelle Ropert, Justine Triet, Emmanuelle Bercot, Isabelle Czajka, Claire Simon, Claire Denis,  Valéria Golino,Valéria Bruni Tedeschi et plus tôt dans l'année 2013 Sophie Letourneur, Solveig Anspach, Agnes Jaoui, Anna Novion,  Valérie Donzelli et nous en oublions certainement....

Les films de femmes se multiplient en 2013, notamment depuis la rentrée de Septembre.... Nous nous souvenons qu'il fut un temps où les films de femme étaient un évènement, qu’Agnès Varda était bien seule dans un désert.... Les femmes font des films, cela n'émeut plus grande monde, on ne parle même plus d'un "film de femmes" comme un genre à part... c'est peut être là une belle victoire.

Nous dédions ce billet à Thierry Frémaux !

lundi 7 octobre 2013

Patrice Chereau (2/11/1944 - 07/10/2013)

Patrice Chereau est mort, la nouvelle sonne comme un coup de tonnerre, une nouvelle bouleversante. Spontanément, nous nous souvenons en vrac: la reine Margot, la tétralogie de Wagner avec Pierre Boulez à la baguette, le théâtre des amandiers, Phédre, l'homme blessé ,  Bernard-Marie Koltes, la Douleur de Marguerite Duras, Pascal Greggory, Vincent Perez, Dominique Blanc...

Patrice Chereau est mort, nous sommes prêts à prendre le train !

Christian Gailly (1943 - 04/10/2013)

Il est toujours triste de voir disparaitre un auteur qui fait partie de sa bibliothèque. De Christian Gailly, nous avons quatre livres: Un soir au Club, les oubliés, Dernier amour et l'incident, ce dernier ayant fait l'objet d'une adaptation au cinéma par Alain Resnais sous le titre Des herbes folles. Tous publiés aux éditions de minuit. Saxophoniste de Jazz, psychanalyste, écrivain, nous aimons ces parcours atypiques ...Puisque le Jazz était sa musique et qu'elle rythmait sa langue, nous écrirons ici le début de Un soir au club, qui avait obtenu en 2002 le prix Inter:

Le piano n'était pas le violon d'Ingres de Simon Nardis. C'était bien plus qu'un violon d'Ingres. Le piano était pour lui ce que la peinture était pour Ingres. Il cessa de jouer comme Ingres aurait pu cesser de peindre. C'eut été dommage,  dans le cas d'Ingres. Ce fut dommage dans le cas de Simon Nardis.
Après sa désertion, il reprit son ancien métier. Le prétexte était de se nourrir. Se loger, se blanchir. Au sens de blanchiment. Il s'agissait surtout de bien se tenir. Le jazz n'incite guère à bien se tenir. Simon Nardis était pianiste de Jazz. Oublié, perdu de vue, rayé du monde, on le retrouve ici, aujourd'hui à la veille, d'un week-end prolongé.

dimanche 6 octobre 2013

Les beaux orages (qui nous étaient promis) - Collectif petit travers

Jongler plus d'une heure sur la scène du théâtre sans lasser le public est une gageure. Nous avons pensé un moment que le collectif le petit travers n'allait pas tenir la distance, tant les 7 jongleurs habillés en costume noir, rythmés par la musique contemporaine de Pierre Jodlowski, ont ouvert leur spectacle sur  un mouvement mécanique et froid devenant lassant, puis les vestes et les chemises sont tombées la chorégraphie s'est déliée, le spectacle est devenu plus ludique, plus léger, plus poétique ... pour se terminer sur un final absolument bluffant à réjouir tous les passionnés de physique.
Ils ont jonglé, chacun de leur coté avant de s'ouvrir sur l'autre, de devenir complices, les balles tombent parfois mais le spectacle intègre parfaitement ses ratés inéluctables comme un hasard auquel on ne peut échapper.

C'était l'ouverture de saison au théâtre Jean Arp !

La vie domestique - Isabelle Czajka

Juliette Docteur en lettres modernes attend une réponse pour un emploi dans une maison d'édition. Pour elle c'est l'espoir de reprendre une vie professionnelle de s'évader de sa zone pavillonnaire, coincée en Seine et Marne bien loin de la capitale. Son mari, proviseur dans un Lycée Provisionnel est absent la journée, la vie domestique repose sur ses épaules. A travers cette journée d'attente, Isabelle Czajka inspirée par le roman de Rachelle Cusk Airlington Park fait à travers un panel de personnages un portrait de la classe moyenne française des zones pavillonnaires qui  semblent avoir pour seule distraction le centre commercial voisin, c'est desperate Housewives made in France. Un monde idéal qui s'avère une véritable prison où il est difficile d'échapper à la névrose.
Nous aurions pu placer ce film dans la filiation des films de Claude Sautet qui avait su donner une représentation juste de la vie bourgeoise de la France pompidolienne. Mais ici,  parce que tous les personnages à l'exception de Juliette relèvent du stéréotype, cela ne fonctionne pas. Ce film choral se déroule sur un ton monocorde, le tout étant prévisible et convenu, nous finissons par nous ennuyer devant cette comédie sociale caricaturale...
Heureusement il y a Emmanuelle Devos, absolument merveilleuse, au fil des années elle démontre une palette impressionnante. Elle est la femme française dans toute sa diversité.

Aventine - Agnes Obel

Nous avions succombé dés sa sortie à son premier album, Philarmonics, nous gardons un souvenir ému de son concert donné aux Bouffes du nord, nous attendions avec impatience le deuxième opus dela chanteuse danoise installée à Berlin. Elle nous revient avec une petite merveille, Aventine, où nous retrouvons ce mariage heureux entre les sons de son piano et du violoncelle de Annä Muller. Le duo du premier album est ici renforcé par la musicienne du groupe Canadien Timber Timber, Mika Posen venue jouer de l'alto et du violon.
Il se dégage une douce mélancolie de ce sublime album. Aventine est notre album de la semaine !


samedi 5 octobre 2013

La belle et la bête - Jean Cocteau

Belle est maltraitée par ses deux sœurs qui lui réservent toutes les corvées. Lorsque son père part pour un voyage d'affaire, promesse de fortune pour la famille, Belle lui demande modestement de lui ramener une rose... Le voyage s'avère un désastre, mais le vieille homme qui se perd au retour au milieu de la forêt se retrouve dans une étrange demeure.. Il y trouve une rose qu'il cueille pour sa fille, mais il déclenche ainsi le courroux du maître des lieux: la bête... Elle lui accorde grâce à condition qu'une de ses filles viennent vivre avec lui au château. Belle se sacrifie pour sauver son père... D'abord effrayée, elle finit par prendre en pitié le monstre qui révèle son humanité et lorsqu'elle finit par lui déclarer son amour, la bête se révèle être un prince charmant.
Voir le film de Jean Cocteau sur l'écran d'un cinéma fut un plaisir immense, un enchantement visuel... Réalisé à la fin  de la deuxième guerre mondiale avec des moyens limités ce qui stimula l'inventivité de Jean Cocteau et de son équipe technique, le film restauré révèle son caractère intemporel comme les contes d'Andersen ou des frères Grimm. Les scènes fantastiques où des bras tendent des chandeliers et où les visages des statues prennent vies sont d'une beauté absolue comme la scène réaliste où les huissiers viennent vider la maison du père de Belle ruiné, C'est une suite de tableaux sublimes .
Il était une fois.... le film de Jean Cocteau est un conte, mais surtout un grand film sur l'amour, la mort ...

Vu à la filmothèque du quartier latin .

jeudi 3 octobre 2013

Working Girl - Mike Nichols

En revoyant, Working Girl de Mike Nichols, histoire d'une jeune secrétaire ambitieuse qui va usurper l'identité de sa patronne absente pour réaliser ses rêves d’ascension sociale, nous avons mesuré un vrai talent chez Mike Nichols pour capter l'air du temps. Nous ne l'aurions jamais cité parmi nos cinéastes favoris, et nous devons  convenir qu'il n'est pas le conteur le plus fabuleux de l'histoire du cinéma.
Mais comme précédemment dans le Lauréat et sa Mrs Robinson, il convient de lui reconnaitre cette capacité à poser une époque, ses films  vieillissent avec le temps mais  il s'en dégage un certain charme.
Working Girl est un film à voir si on veut comprendre les années 80 où en France par exemple Bernard Tapie était un modèle de réussite, exposé  dans un ouvrage au titre évocateur "gagner". Ronald Reagan était à la tête de son pays, les monétaristes de l'école de Chicago étaient les maitres à penser.
John Maynard Keynes était voué aux gémonies.
L'histoire de cette jeune fille symbolise parfaitement la pensée de ces années là, où les puissants  voulaient nous faire croire qu'en libéralisant le monde, chacun pourrait réussir selon l'investissement qu'il mettrait à sa propre réussite... pure fadaise puisqu'il est facile d'observer nos sociétés pour se rendre compte que cette libéralisation s'est accompagnée d'une reproduction de ses élites, l’ascension sociale est devenue exception. Il montre parfaitement comment chaque classe sociale se définit par un code vestimentaire qui lui est propre, changer de classe sociale c'est changer de coiffeur, de tailleur...et plus positivement le film défend la place de plus en plus importante de la femme parmi les cadres superieurs.
Le film nous rappelle également que les années 80 marque la revanche mesquine des coiffeurs boudés la décennie précédente par les hordes de Hippie. C'est peut être bien dans Working Girl que nous avons les pires coiffures de l'histoire du cinéma.

mardi 1 octobre 2013

Emmanuelle Devos lit "Heureux les heureux" de Yasmina Reza

Voila plus de vingt ans que la voix singulière de Emmanuelle Devos nous accompagne pour notre plus grand plaisir, alors nous ne pouvions pas rater hier soir la lecture d'extraits du roman de Yasmina Reza "Heureux les Heureux" par l'actrice fétiche de Arnaud Desplechin, au théâtre de l’Odéon.
Une lecture de quatre chapitres de ce roman aux multiples personnages, où chacun se retrouve confronté à sa propre solitude, ou plus précisément à la sodade comme la définit si bien Robert Toscano le personnage du premier chapitre qui se chamaille avec sa femme dans un supermarché lieu de désarroi par excellence.

"Je dis s'il te plait, je reste calme, s'il te plait, de façon modérée, je me vois roulant à toute allure sur un périphérique, écoutant à fond Sodade, chanson découverte récemment, à laquelle je ne comprends rien, si ce n'est la solitude de la voix, et le mot solitude répété à l'infini, même si on me dit que le mot ne veut pas dire solitude mais nostalgie, mais manque, mais regret, mais spleen, autant de choses intimes et impartageables qui s'appellent solitude, comme s'appellent solitude le caddie domestique, le couloir d'huiles et de vinaigres, et l'homme implorant sa femme sous les néons."

Une lecture sublime de l'actrice qui fit le choix à priori étonnant de la lenteur, refusant de jouer les dialogues. Une lecture sans artifice qui révèle toute la beauté de la langue de Yasmina Reza., sa noirceur, sa drôlerie. L'actrice s'efface devant la littérature, un acte de grand talent.

La lecture réalisée dans le cadre de l’émission de France Culture, "Fictions / Théâtre et Cie" était suivie d'une interview de Yasmina Reza par Jean Birnbaum, entretien pertinent qui a notamment porté sur les différences entre personnages de théâtre et de roman. Yasmina Reza parle sans langue de bois de son travail d'écrivain.  Nous n'en dirons pas plus, pour vous laisser le plaisir de  découvrir la suite dimanche soir à 21 heures sur France Culture (Emission podcastable)


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