dimanche 30 novembre 2014

La prochaine fois je viserai le coeur - Cedric Anger

La prochaine fois je viserai le coeur raconte l'histoire d'un gendarme, Frank devenu un tueur en série .Ses victimes sont des jeunes filles qu'il prend en stop avant de les liquider brutalement  à l'arme à feu... Il se retrouve à enquêter sur ses propres crimes ce qui n'aide pas l'enquête à avancer. Les soupçons finissent par se rapprocher, le style  des lettres anonymes envoyées par le tueur laisse à penser selon les experts qu'il est serait un membre de la police ou de la gendarmerie. Une hypothèse refusée par la hiérarchie militaire mais les preuves s'accumulent ...Frank est finalement confondu...
Inspiré par un fait divers, l'affaire Alain Lamare, le film de Cédric Anger aux accents melvilliens par sa reconstitution précise nous plonge dans la fin des années 70, un vrai film en costume où nous retrouvons les gendarmes et leurs képis et les voitures d'époque. La composition de Guillaume Canet particulièrement impressionnant, au niveau de Delon dans le Samourai donne toute la complexité du personnage rongé par la maladie mentale. Gendarme reconnu pour sa disponibilité, sa rectitude, Frank cache parfaitement son asociabilité révélée par  de scènes de vie, où chez lui il se baigne dans de l'eau glacé ou s'enroule le bras de fils barbelés, moments qui nous rappellent le personnage de Taxi Driver. Nous découvrons son dégout du contact,  il n'a de vrais liens qu'avec son jeune frère. Il y a aussi Sophie une jeune fille interprétée par Ana Girardot qui vient faire un peu de ménage chez le gendarme, elle finit par tomber amoureuse de lui, il n'est pas insensible mais c'est une affaire compliquée pour lui...
Puis il y a ces scènes de traque où poussé par des pulsions irrépressibles, Frank dans une voiture volée cherche sa proie, la victime jeune et naïve se laisse facilement piéger... Des moments terribles et éprouvants. Arrêté par ses collègues, il se mure dans le silence,n'acceptant de reconnaitre ses actes qu'une seule fois, face à son supérieur.
C'est un film totalement maitrisé qui ne se laisse jamais emporter par les émotions qu'il génère, le film de Cedric Anger est particulièrement impressionnant.

Echo and the Bunnymen - Ballyhoo (1998)


Pour continuer avec les compilations, nous avons choisi un groupe de Liverpool des années 80, Echo and The Buynemman. Ian Mcculloch est son leader. Chanteur, il est l’âme de ce groupe.Son inspiration vient des Doors et de Television mais aussi de Joy Division, originaire de la ville voisine, Manchester... Le groupe s'est séparé, reformé sans jamais retrouver la même grâce que lors de sa première décennie.

Ballyhoo nous offre une plongée dans le meilleur des années 80,c'est notre album de la semaine


samedi 29 novembre 2014

Interstellar - Christopher Nolan (2014)

Nous n'avons pas une grande passion pour les films de science fiction qui ont pour cadre l'espace, sans doute nos connaissances scientifiques limitées ne nous permettent d'en prendre toute la mesure. Mais notre curiosité nous a poussé à aller voir le dernier film de Christopher Nolan, et nous devons bien l'avouer , nous n'avons pas vraiment saisi le sens de son propos ...

Nous ne savons pas vraiment à quelle époque nous nous trouvons mais la Terre va mal et voit son avenir particulièrement entamé, balayée par des tempêtes de sables, seul le maïs continue à pousser, l'apocalypse n'est pas loin,  certains plans nous rappelle le roman de Cormack McCarthy, la route...Cooper un ancien pilote de chasse s'est reconverti comme agriculteur, élevant seul ses deux enfants dont sa fille Murphy.
Recruté par la Nasa, il est choisi pour mener une opération spatiale qui doit notamment permettre de trouver une nouvelle planète où il fait bon vivre... Il laisse ses deux enfants avec leur grand père sans date de retour, Murphy est particulièrement triste...

Ensuite il est question de relativité, de gravité, d'espace-temps... nous aurions dû décrocher, mais nous sommes restés scotchés par les images de Christopher Nolan, et absolument fascinés par sa représentation de l'espace.  C'est du grand spectacle, où finalement il n'est pas absolument indispensable d'adhérer à cette fable futuriste et sentimentale  pour être captivés.

vendredi 28 novembre 2014

De passage - Stephane Jaubertie /Johanny Bert

Photo Jean Louis Fernandez
Un casque sur la tête, la voix est ainsi chuchotée à chacun dans un cadre intime. De passage, c'est une histoire qui nous est contée comme pouvait le faire nos ainés le soir alors que nous étions de jeunes enfants. Un conteur et un jeu d'ombres pour illustrations mêlant silhouettes et dessins , une histoire d'un enfant élevé par  sa mère. Le soir il se retrouve seul, sa mère devant rejoindre son travail de l'autre coté de la ville.
Un soir n'y tenant plus, il met ses bottes, son manteau traverse la ville dans le froid pour rejoindre l’hôpital... Puis c'est la découverte d'un "caillou noir" qui lui ronge le cerveau, il va devoir ce battre contre cette maladie, il découvre alors sa véritable histoire, son adoption mais surtout il engage un combat contre la mort, il ne veut rien céder, vivre...
Une histoire intime qui parle à chacun, parce qu'il est question d'identité, de parents, de souvenirs... nous retrouvons la magie d'une histoire simple remplie d’humanité merveilleusement racontée qui agit pour les plus grands comme une savoureuse madeleine.Un joli spectacle !

P.D James (03/10/1920 - 27/11/2014)


P.D James a bien dû avoir une jeunesse, mais dans notre imaginaire, elle reste une vieille dame qui écrit des romans policiers dans une tradition bien anglaise... Un genre que nous n'affectionnons pas spécialement mais dont  parfois nous nous laissons aller à la lecture avec un plaisir certain même si rapidement nous oublions la trame de l'histoire.
Dans notre bibliothèque, nous trouvons ainsi Meurtres en soutane et la salle des meurtres. C'est du bel ouvrage!

dimanche 23 novembre 2014

Notorious (Les enchainés) - Alfred Hitchcock (1946)

Les Enchainés (1946) de Alfred Hitchcock, merveille parmi les merveilles, nous pouvons le voir et le revoir... A chaque fois nous nous inquiétons et peut être encore plus, pour Ingrid Bergman envoyée par les services secrets américains espionner des nazis  installés à Rio de Janeiro après le second conflit mondial ...  c'est là toute la magie du cinéma de Alfred Hitchcock!
Alicia Huberman, fille d'un espion allemand condamné à vingt ans de prison est approchée par les services américains qui savent qu'elle honnissait les activités et les engagements de son père. Désespérée, Alicia s'est réfugiée dans une succession de fêtes entre  alcool et séduction ... Pour les puritains américains, elle est l'espionne sans morale dont ils ont besoin.  Elle est prise en main par Devlin (magnifique Cary Grant) qui va l'aider à intégrer le cercle des anciens amis de son père dont Alexander Sebastian qui a la faiblesse d' être amoureux de la jeune femme , celle ci  accepte de l'épouser pour faire avancer l'enquête...
Mais ce qui n'était pas prévu c'est qu'Alicia et Devlin tombent amoureux, que l’accès de la cave du chef nazi soit compliquée... une série d'embuches qui vont révéler à Alexander Sebastian la vraie nature de sa nouvelle épouse. Alicia est en danger....
Un Hitchcock au sommet de son art servi par un duo d'acteurs éblouissants, Ingrid Bergman parfaite dans l'émotion est filmée avec passion par le cinéaste anglais et Cary Grant irrésistible a cette capacité de toujours glisser une once de légèreté dans les moments les plus dramatiques, la classe absolue .Un rôle que Hitchcock définit simplement dans ses entretiens avec François Truffaut: "L'histoire de Notorious, c'est le vieux conflit entre l'amour et le devoir. Le boulot de Cary Grant est de pousser Ingrid Bergman dans le lit de Claude Rains. C'est une situation réellement ironique, et Cary Grant est amer tout au long de l'histoire."

Chef d’œuvre où Hitchcock à travers de bouteilles de Pommard rend hommage au vin français et plus  précisément le Bourgogne que nous avons vu pour la première fois projeté dans une salle de cinéma dans le cadre du ciné club de Claude Jean Philippe. C'était encore plus grand !

The Doors - Best of

Nous ne sommes pas de grands fans des compilations, nous leur préférons sans contestation les albums qui relèvent d'un projet cohérent à un instant donné. Mais le Best Of des Doors fait exception parce que leur carrière fut courte, intense, il donne un aperçu parfait  de cette musique au son  facilement reconnaissable par les sonorités de l'orgue électrique de Ray Manzarek. Un son si particulier mais qui traverse sans embûche les années, la musique des Doors n'a rien perdu de sa force elle ne s'écoute pas comme un simple témoignage de la fin des années 60 et le début des années 70, elle a gardé toute sa fraicheur. Et puis rien n'a changé People are strange ....
Il se dégage toujours un coté animal et sensuel de leur rock porté par la voix de Jim Morrisson qui nous fait ressentir dès les premières notes tout son charisme...Un chanteur qui derrière un abord brutal révèle une vraie fragilité. Ecoutez la musique des Doors, cela donne du peps, nous avons donc choisi de faire du Best of des Doors notre album de la semaine !

samedi 22 novembre 2014

Eden - Mia Hansen Love

Eden le dernier film de Mia Hansen Love, à travers le portrait  de Paul est une plongée dans les années 90 dans le monde de la techno et des rave parties.
Ce dernier fonde avec son meilleur ami un duo de DJ les "cheers", spécialisé dans la musique de Garage, une branche parmi d'autres de la musique techno où les voix chaudes de chanteurs R,nb viennent se coller aux rythmes froids de la musique techno.
Ils connaissant leurs heures de gloire qui les amènent à jouer dans tous les clubs de la capitale ou à tenir l'antenne de La Radio FG .  Paul entraîné par le succès renonce à terminer son mémoire universitaire et abandonne ses études littéraires.
Il vit la nuit, sniffe la cocaïne et rate ses histoires d'amour, le succès va jusqu'à le mener à New York où avec son acolyte il anime des raves parties. Mais la mode est éphémère, la chute est rapide brutale... Paul se retrouve à sec, trente ans, sans situation, sans argent, désespérément seul avec pour seul soutien sa mère qui n'avait cessé de l'alerter sur l'aspect précaire de sa situation même au plus fort de son succès...

Inspiré par l'histoire de son propre frère qui a coécrit le scénario, Mia Hansen Love signe le portrait d'une génération et du mouvement de la French Touch où pour une fois la scène musicale avait pour épicentre la France... Elle raconte cette histoire à travers l'échec de son frère alors que ses camarades de Daft Punk qui ont grandi dans la même période connaissent un succès planétaire jamais démenti à ce jour. Ils ne sont que des seconds rôles dans ce film, ils reviennent régulièrement de manière comique où ils sont chaque fois refoulés des soirées parisiennes, pas reconnus par les services de sécurité... Rien n'est plus sympathique que les premiers moments de cette musique qui a grandi dans la clandestinité, où les soirées sont organisées dans le secret dans une ambiance festive qui n'est pas sans rappeler les rassemblements des années 70. Mais le succès entraîne l'embourgeoisement et ouvre les portes des clubs parisiens ...
On est emporté par la bande musicale du film magistral durant toute la première partie, où l'on ressent parfaitement la frénésie des nuits passées au son de la house music, la chute est sévère en un clin d'œil notre héros se retrouve à animer des soirées sans vie, d'une tristesse infinie.  La cocaïne se referme comme un piège, les rêves et espérances ont été emportés définitivement...il ne reste plus que les souvenirs...

Loin de vouloir  plagier le critique du Monde , Jacques Mandelbaum,  nous le citerons car nous partageons totalement son avis et nous ne saurions mieux l'exprimer : "On a ainsi défini ce que ce film ne veut surtout pas être : un biopic officiel de la « French Touch ». Ressortissant lui-même d’une incontestable « French Touch » cinématographique, c’est néanmoins avec le lumineux Inside Llewyn Davis (2013) des frères Joel et Ethan Coen qu’il cousine. Même façon de décrire une histoire de légende musicale par le biais d’un personnage qui reste à quai, même attention méticuleuse à la vérité documentaire de l’histoire, même succession de moments faibles et de morceaux mythiques : Eden est à l’électro française ce que Inside Llewyn Davis est au folk américain."

jeudi 20 novembre 2014

Garry Winogrand au Jeu de paume


Garry Winogrand est né en 1924 dans le Bronx, il va passer sa vie un appareil photo autour du cou.Si Manhattan est son territoire favori, il accomplit de nombreux voyages tel Robert Frank pour nous donner son portrait de l'Amérique des anonymes.
Une œuvre immense qui trace le quotidien  de l'après guerre d'un pays qui va connaitre maints remous  du maccarthisme à la guerre du Vietnam. Le propos n'est jamais directement politique même si le photographe suit avec intérêt les différentes campagnes. On croise ainsi au cours de l'exposition,  Nixon et ses hommes qui ressemblent à une bande de maffieux  tout droits sortis d'un film de Martin Scorsese ou l'autre visage de l’Amérique celui de JFK entouré par des afro-américaines pleines d'espoir , mais comme il l'indique lui même il n'est que spectateur des événements, il ne se prononce jamais vraiment. "Parfois c'est comme si [...] le monde entier était une scène pour laquelle j'ai acheté un billet [...]Un grand spectacle qui m'est destiné, comme si rien ne se produirait si je n'étais pas sur place avec mon appareil."


L'exposition se déroule en trois parties, la première du "Bronx à Manhattan" un portrait du centre névralgique de sa cité américaine.Gary Winogrand utilise souvent le grand angle ce qui lui permet de restituer toute l'amplitude de la ville. La deuxième "c'est l'Amérique que j'étudie" montre son ouverture sur le reste du pays et notamment les villes en expansion comme Houston, ou Los Angeles. Il aime les stades, les réunions de cowboys... son travail situe clairement ici dans la lignée de celui de Robert Frank.



La troisième partie "Splendeur et déclin" témoigne de la fin des illusions, Watergate, guerre du Vietnam, l'idéal américain d'une démocratie modèle, n'est qu'une illusion, un fantasme... Garry Winongrand continue de photographier dans les stades, à partir de la fenêtre de sa voiture mais il aime à repérer, les âmes seules un peu à l'écart. La vie toujours en mouvement que montraient les premières années se fige peu à peu...



Sublime exposition, qui vient après celles consacrée les années précédentes à Robert Frank puis Diane Arbus, elle est  la plus  importante jamais consacré à son œuvre. Il faut dire que le photographe n'a utilisé qu'une partie mineure de son travail, laissant à sa mort de nombreux rouleaux inexploités. Les clichés ainsi découverts  permettent ainsi découvrir l'ampleur de son travail  dont il reste surement beaucoup à découvrir. Au cœur de l'exposition  une vidéo nous permet de mesurer la dimension du personnage qui plein de truculence parle de son travail sans aucune langue de bois.

C'est un voyage dans l'Amérique du siècle dernier que nous propose l'exposition de Garry Winogrand. un voyage à ne pas rater !



mercredi 19 novembre 2014

Chante ton bac d'abord - David André

Un film au charme fou, un objet nouveau dans l'univers cinématographique, le documentaire chanté... un film rare qui enchante les  plus jeunes qui se retrouvent totalement dans les personnages de ce documentaire et qui rendent mélancoliques les plus anciens qui revisitent les sentiments de leurs jeunes années.
Tourné sur une année scolaire dans la ville de Boulogne sur mer dans le Pas de Calais, nous suivons la destinée d'un  groupe de lycéens, avec au centre d'eux  Gaëlle qui doit négocier son avenir avec ses parents divorcés. Ils doivent préparer leur bac et trouver leur nouvelle route. La crise économique qui frappe la région du Nord depuis 40 ans a pris une nouvelle ampleur ces dernières années... Il n'y a plus cette alternative qu'ont connu leurs parents, voire leurs grands parents où si tu ne travaillais pas à l'école, tu allais à l'usine ou sur les bateaux de pêche...pas de place pour l'échec scolaire !
Gaëlle est au centre du documentaire parce qu'elle est celle qui porte une revendication claire, le droit à l'insouciance qui nourrit son charisme. Elle connait clairement le contexte économique, elle s’inquiète même de l'avenir professionnel de son père électricien sur le port, mais elle connait aussi Arthur Rimbaud elle sait qu'on n'est pas sérieux quand on a dix sept ans, alors rien ne la fera renoncer à aller boire des bocks de bière avec ses amis. Gaëlle, son rêve c'est de faire une école de marionnettes, Charleville justement...  mais son père s’inquiète de ce chemin qui lui semble sinueux et à la destination incertaine, il a la peur de l'impasse... elle porte finalement son choix sur l'école des Beaux Arts de Tourcoing....
Autour d'elle, il y a Rachel qui ne doute pas d'elle, ses parents n'ont jamais eu peur de vivre à la marge, à l'opposé Caroline la seule à être rongée par l'anxiété, incapable de se projeter dans l'avenir. La situation de ses parents, sa mère n'a plus d'emploi et  celui de son père ouvrier est largement menacé, ne fait que nourrir son désarroi .  Nico, lui  s'est créé un personnage inspiré par Dylan et Gainsbourg dont il reprend les tics quand il chante, physiquement il est un mix de Miossec et de Cali. Il déprime quand son canard Douglas  meurt, mais cela tient surtout du personnage "poète maudit "qu'il compose. Surement agaçant mais ici particulièrement touchant...
Puis enfin Alex, un personnage hors norme, n'a pas suivi ses copains en terminale redoublant sa première. Pourtant lors du bac de Français il est allé décrocher un 16 la meilleure note de sa classe ce qui ne lui servira à rien, mais là est Alex, imprévisible, joyeux, un look bien à lui, impossible de le rater. Il a déjà frôlé la mort dans son jeune age victime d'une leucémie, une expérience qui lui  donne un autre regard sur la vie. Il partage avec son père une passion pour le rock, ils ont formé un groupe lui à la contrebasse, son père au chant et au ukulélé, ils donnent des concerts dans les bars. Ils font la route aux sons des Clash et le soir ils donnent une version tendre et touchante d' Antisocial de Trust. Un père qui est resté conforme à ses rêves d'adolescent sans avoir le coté pathétique de l'adulte refusant de vieillir, il a décidé que la crise n'aurait pas de prise sur lui, il est l'adulte le plus joyeux, le plus accompli de ce film.
Le documentaire chanté, David André a confessé que c'était pour lui une vieille idée qui faisait toujours rire son entourage , comme une idée folle et improbable... mais cette vieille lubie a trouvé tout son sens ici, ces jeunes chantant leur vision de la vie, leurs états d’âmes librement ne font qu'exprimer l'insouciance et les peurs propres à leur temps, c'est diablement beau !


Nous avons croisé là un groupe de lycéens d'une section littéraire, qui aime les livres, la poésie...Filmés dans leur territoire du Nord merveilleusement rendu par David André , leur parcours a suscité en nous le désir de visiter Boulogne sur mer et les plages du Pas De Calais... A coté de ces jeunes gens lucides mais pas gâtés non plus ne nous y trompons pas, nous nous souvenons des jeunes filles perdues dévorées par la société de consommation de Bande de filles;  les rêves murmurés ici font du bien.. .   Ce film est à la base un documentaire où le réalisateur est parti sans scénario,  si ce n'est l'objectif de suivre des jeunes gens passant le bac durant une année scolaire,afin de montrer ce moment angoissant de l'épreuve et du choix des possibles ... Par la force des intervenants, il prend la puissance d'une fiction, les personnes devenant personnages au sens le plus romanesque, il se crée quelque chose de rare sous nos yeux, on peut se demander si la bande à Alex n'a pas finalement phagocyté le projet initial pour se l'approprier définitivement avec la bénédiction du réalisateur qui parti dans un lycée immense de Province  a trouvé cinq pépites, un petit trésor en quelque sorte.Il confessa d'ailleurs après le film que le rapport exclusif qu'il eut avec cette bande ne fut pas sans créer des tensions et des jalousies l’empêchant notamment de tourner des scènes de classe.
Chante ton bac d'abord, s'inscrit dans une grande tradition du cinéma français qu'est le film sur la jeunesse avec l'école pour arrière plan. Il y eut zéro de conduite de Jean Vigo, les 400 coups de François Truffaut, Passe ton bac d'abord de Maurice Pialat, ou plus récemment Après mai de Olivier Assayas et bien d'autres encore... nous pourrions également citer les films de la série d'Arte Toutes les garçons et les filles de leurs ages dont nous retenons  les roseaux sauvages de André Téchiné tant Gaëlle nous parait aussi lumineuse que pouvait être alors Elodie Bouchez. Une page magnifique du cinéma français où il convient d'inscrire ce dernier film qui vient nous rappeler que cette jeunesse idéaliste existe toujours!

Chante ton bac est un film magnifique, c'est un pur enchantement !




mardi 18 novembre 2014

Passe ton bac d'abord - Maurice Pialat

Lorsqu'il tourne "passe ton bac d'abord", Maurice Pialat est dans une situation d'urgence absolue. Il a obtenu une avance sur recettes de 2 millions pour réaliser un projet écrit par Arlette Langmann. Mais parce qu'il a n'a jamais trouvé l’actrice idéale, il préfère abandonner provisoirement  ce qui deviendra  "A nos amours". Il s'est alors engagé dans un autre film "les meurtrières" mais au bout de cinq jours de tournage, il abandonne encore une fois déçu par son actrice principale.
Il a claqué ainsi 1.3 millions sur les 2 millions versés, il lui faut réaliser un film en toute urgence pour ne pas avoir à rembourser le CNC, ce dont il est parfaitement incapable alors qu'il vient tout juste de se relever de l'échec retentissant de son précédent film "la gueule ouverte". Ainsi est tourné en toute urgence "Passe ton bac d'abord" dans la ville de Lens avec quasiment que des acteurs amateurs croisés dans le bar  de la ville "chez Caron" véritable centre névralgique de la jeunesse  lensoise. Sabine Haudepin et Philippe Marlaud sont les seuls acteurs professionnels de la bande... Il convient aussi de signaler la présence de Jean- François Adam incarnant professeur de philosophie sans illusion qui s'ennuie tout autant que les gamins depuis que sa femme l'a quitté, il essaye bien de créer un contact avec la plus jolie de ses élèves mais cette dernière ne lui trouve aucun intérêt, lui renvoyant cruellement son image pathétique de "vieille personne".
Portrait d'une jeunesse désœuvrée, qui tue son ennui en se retrouvant dans le bar chez Caron,puis pendant les vacances sur les bords de mer. L'amour et les relations amoureuses sont au centre de leurs préoccupations alors qu'ils n'affichent pas une grande passion pour leurs études, ils n'y voient pas la promesse d'un avenir radieux. D'ailleurs une seule  parvient à décrocher le bac, se retrouvant aussitôt à une caisse de supermarché, déjà mariée elle n'a pas pas souhaité continuer ses études...
Les relations sont tendus avec leurs parents qui n'arrivent pas à accepter leur journée "glandouille" alors qu'eux n'ont pas eu dans leur temps beaucoup d'alternatives. Il fallait bosser pour ramener un salaire même lorsque les résultats scolaires étaient bons comme le rappelle un père racontant à son fils avoir obtenu le certificat d'études avec une mention bien.
Mais du boulot, il n'y en a plus pour cette jeunesse, les mines se meurent c'est le début du chômage de masse. Ils ont encore quelques illusions, voyant Paris comme un eldorado où il suffit de se rendre pour trouver un métier, notamment dans les banques. A travers cette fiction, Pialat filme une vérité sociale ,celle d'une région, le nord au bord du sinistre. L'unique dérivatif où se retrouvent  toutes les générations est le club de football local le RC Lens le seul à pouvoir donner des moments de joies collectives inter générationnelles.
Si Pialat capte la vérité sociale du moment, il fantasme la vérité sexuelle de cette jeunesse, semblant dans son film s'aimer librement et plutôt joyeusement. Le témoignage récent de deux acteurs, notamment celui du séducteur, Don Juan de la bande révèle une réalité tout autre de leurs jeunes années où les relations n'étaient pas aussi libres que le  laisse croire le film. Ils rappellent d'ailleurs que Pialat avait fait sensation en débarquant pour le tournage, avec son ancienne épouse, une ancienne maitresse ainsi que sa maitresse du moment; une situation inimaginable...
Maurice Pialat filme la vie dans toute sa crudité,  il montre un talent rare à montrer cet age rempli de certitudes que chacun a tendance à magnifier avec les années qui passent mais qui n'est pas fait que de moments heureux.
Le dvd vaut aussi largement le détour par ses suppléments et notamment les entretiens de Serge Toubiana qui font un portrait de Maurice Pialat, personnage hors norme, insupportable, coléreux, mais dans le même temps attachant. Il a toujours su trouver des compagnons de route fidèles capables de tout supporter, conscients du talent du cinéaste.

dimanche 16 novembre 2014

Une auberge à Tokyo - Yasujiro Ozu

Dans les années 30, le Japon comme les grands pays industriels n'échappe pas à la crise financière. Un homme Kihachi accompagné de ses deux garçons erre sur les chemins à la recherche d'un hypothétique emploi .Il se présente aux gardiens des usines mais les refus s'enchainent pour leur plus grand désespoir. Parfois ils tombent sur un chien errant ce qui leur permet d'obtenir une récompense dans le cadre d'un programme luttant contre la rage. Ces sous inespérés leur permettent quand le gamin n'a pas la mauvaise idée d'aller s'acheter une casquette, de faire un repas ou de passer une nuit à l'auberge où ils rencontrent une jeune femme et sa fille qui sont dans la même dèche.
Kihachi par hasard croise une vieille amie qui lui offre un toit et lui permet de trouver un poste d'ouvrier. Mais lorsqu'il découvre que la jeune fille croisée à l'auberge souffre de la dysenterie, il n'a pas suffisamment d'argent pour aider la jeune femme à payer les frais d’hôpital. il n'a pas d'autres choix que de voler.
Dans une ultime confidence à sa logeuse avant d'aller se rendre à la police, il se confie: "il est affreux d'être pauvre".
Dés le premier plan filmé caméra au sol on reconnait la patte de Yasujiro Ozu. En 1935, par fidélité à son chef opérateur qui ne sent pas prêt à utiliser de nouvelles techniques, il tourne toujours en muet avec des cartons pour résumer les dialogues entre les personnages. Ozu a cette capacité à capter l'intimité de ses personnages même si ici il ne rentre jamais dans leurs domiciles puisqu'ils n'en ont plus. Il filme avec une compassion mais sans pathos , son film plein de délicatesse ne sombre jamais dans un misérabilisme larmoyant, la pauvreté n’empêche pas la dignité.Nous resterons marqués par cette scène sublime et terrible, où le père s'amuse avec son ainé à mimer le repas qu'ils ne peuvent pas faire, le jeune frère la faim au ventre dit combien il n'aime pas ce riz fictif qu'on lui propose.
Il filme magnifiquement les enfants, et par bien des cotés, il est difficile de ne pas penser  à Charlot au cœur de la crise américaine. Sans hésitation, nous classons au même niveau que les chefs d’œuvre de Charlie Chaplin ce film d'Ozu qui donne un éclairage sur le désarroi de la société japonaise des années 30 qui allait succomber au nationalisme le plus fou. Malgré la piètre qualité de la copie qui mériterait largement une restauration, nous avons été subjugués par le film de Yasujiro Ozu.

Claude Jean Philippe remarquait dans sa présentation que Ozu était peut être  le cinéaste le plus programmé dans son ciné club. Peut être tout simplement parce qu'il est le plus grand!

Baxter Dury - It's pleasure

Pour ne pas sombrer dans une langueur monotone de saison , nous ne connaissons pas de meilleur remède qu'un disque de pop anglaise... Une musique conforme à leur éducation, un mélange racé de correction et de non conformisme comme la définissait Doris Lessing dans le carnet d'or...
Nous avons donc choisi pour nous accompagner cette semaine, le dernier album de Baxter Dury. Rien de révolutionnaire, il est quasi certain que nous ne l'écouterons plus dans dix ans... Mais totalement conforme à son personnage de dandy quelque peu négligé... Voix grave , accompagnée de celle, douce et féminine de Fabienne Débarre, il se dégage un charme certain de cet album modeste, suave  rayon de soleil face à la grisaille automnale

It's a pleasure de Baxter Dury est notre album de la semaine !


samedi 15 novembre 2014

Quand vient la nuit - Michael R. Roskam

Alors que nous avions été particulièrement impressionnés par son premier film Bullhead, le deuxième long métrage du cinéaste belge qui ne fait que confirmer sa capacité réelle à filmer la part bestiale des hommes est une sincère déception.
Portrait d'un homme Bob d'origine polonaise du genre taiseux hanté par un crime du passé qui lui interdit la confession ... Bob finit par s'ouvrir  aux sentiments après la découverte d'un bébé pitbull qu'il découvre blessé et enfermé dans une poubelle,découverte qui lui permet de lier une relation amicale avec une jeune fille de son quartier.
Il tient un bar avec son cousin Marv habitué aux petits trafics et qui n'a jamais accepté de voir son établissement confisqué par un gang Tchétchène peu porté sur les sentiments humanistes. Bob le taciturne se retrouve embringuer dans les emmerdes de son cousin revanchard  un peu malgré lui...

Le cinéaste s'est entièrement reposé sur le scenario de l’écrivain Dennis Lehane pour ce film américain. Il ne crée aucune empathie avec les personnages pour lesquels finalement nous ne nous inquiétons à aucun moment,à vrai dire nous nous fichons de leur destinée. Nous nous embourbons dans la lenteur du film, les cadrages sont propres,le jeu des acteurs est sans reproche... mais à part peut être cinq minutes, c'est d'un mortel ennui.

Film sans grand intérêt qui restera dans l'histoire du cinéma comme le dernier du remarquable James Gandolfi connu pour avoir incarné Tony Soprano dans l'excellente série Les Sopranos

jeudi 13 novembre 2014

Deux anglaises et le continent - François Truffaut

Les deux Anglaises et le Continent est le deuxième roman de Henri Pierre Roché. Comme pour Jules et Jim, le propos est largement autobiographique, le romancier revient ici, sur une période de sa vie antérieure à son premier roman. Histoire d'un jeune homme vrai dandy, Claude qui tombe amoureux de deux sœurs anglaises.
Il fait la connaissance d'Ann la fille d'une amie de sa mère, les deux jeunes gens se plaisent, partageant une vraie complicité. Naturellement la jeune fille l'invite à son tour à venir lui rendre visite au Pays de Galles, elle pousse son jeune ami dans les bras de sa jeune sœur Muriel... ils se plaisent, évoquant un mariage prochain. La mère de Claude qui veut maintenir un lien exclusif avec son fils, arrive à mettre un terme à ce projet... Les deux amoureux se séparent habités d'un même sentiment de tristesse mais avec la promesse de se retrouver un an plus tard.
Claude de retour à Paris devenu marchand d'art mène une vie de libertin, tout en écrivant des articles dans des revues d'art .Il finit par renoncer à son mariage pour le plus grand plaisir de sa mère. Mais il retrouve Ann venu à Paris exercer son métier de sculptrice. Les deux jeunes gens se retrouvent, Claude initie la jeune fille à l'amour physique tout en la poussant à rencontrer d'autres hommes. Muriel se morfond au Pays de Galles mais elle finit par rendre visite à sa grande sœur ...
Il est facile de deviner la proximité entre le cinéaste et l’écrivain qui partagent le même amour des femmes. Un amour qui n'est jamais grossier, mais au contraire respectueux, sensuel où il n'est à aucun moment question de jugements moraux mais au contraire de liberté des sens. Henri Pierre Roché décrit pour le cinéaste un monde idéal. Ce film amène Truffaut le citadin à filmer la campagne et la nature. Surement plus inspiré par les films de Jean Renoir que ses propres promenades, il montre parfaitement combien la nature est propice à révéler la volupté des sentiments... ici l'amour platonique est tout aussi célébré que l'amour physique.
De ce récit autobiographique, il fait un film en costumes totalement romanesque...Dans des documentaires datant de sa sortie François Truffaut synthétise son film comme la rencontre du jeune Marcel Proust avec les deux soeurs Bronté, confirmant ainsi son caractère littéraire. Sa voix off, accompagne le récit par des lectures d'extraits  des lettres que s'envoient les personnages. Romanesque mais finalement totalement personnel, il suffit de connaitre l'amour de François Truffaut l'art épistolaires. Tourné en1971 après avoir connu la dépression nerveuse suite à sa rupture avec Catherine Deneuve. Le cinéaste qui avait tourné auparavant avec Françoise Dorléac ne pouvait que comprendre la complexité des sentiments qui habitent Claude incarné parfaitement par son double Jean-Pierre Leaud qui pour la première fois dans un film de François Truffaut n'incarne pas le personnage de Antoine Doisnel, il signe une composition remarquable et émouvante de son personnage. Chez Truffaut l'amour tend vers l'absolu et n'échappe pas à la souffrance...
Le film ne trouva pas son public pourtant il est un des ses plus beaux, que nous revoyons toujours avec un plaisir infini, et sans aucun sentiment de lassitude.L'amour n'est jamais sans douleur chez François Truffaut !

Film vu dans le cadre de notre cycle, 2014 année François Truffaut...

dimanche 9 novembre 2014

Trains étroitement surveillés - Jiri Menzel

Séance exceptionnelle au ciné club de Claude Jean-Philippe, où était projeté le premier long métrage du cinéaste tchèque Jiri Menzel, Trains étroitement surveillés en présence même du cinéaste. Il est ainsi venu témoigner des conditions de vie, et notamment de création dans la Tchécoslovaquie des années 60 tenue de main de fer par le régime pro soviétique.
Avec un humour rempli d'une ironie décapante, il nous a expliqué que ces conditions  furent une chance pour le jeune étudiant qu'il était. Puisque les meilleurs cinéastes de son pays rencontraient d'énormes difficultés pour tourner, ils étaient devenus enseignants, alors à la différence des écoles du monde capitaliste où les professeurs des écoles de cinéma étaient des mauvais cinéastes, sinon de simples théoriciens du septième art, il eut comme professeur la crème des crèmes.
S'il y a lieu de s'offusquer des censeurs, il faut y voir  parfois une source inspiration qui stimule la créativité des artistes. Toujours plus malins, ils ont su trouver des espaces nouveaux pour passer à travers les mailles du filet.
Adapté du roman éponyme du grand écrivain tchèque Bohumil Hrabal, l'action se déroule durant l'occupation nazie, période particulièrement propice pour parler librement du désir de résistance des travailleurs sans attirer  les foudres du censeurs, incapables d'imaginer un communiste sous les traits d'un nazi.
Milos est un jeune homme venu prendre un poste de contrôleur  dans une petite gare de Tchécoslovaquie. Particulièrement timide, il n'a pas le contact facile avec les jeunes femmes contrairement à ses collègues plus anciens. Il n'arrive à rien avec une jeune contrôleuse qui 's'offre littéralement à lui. Meurtri par sa défaillance, le jeune homme tente de se suicider.
Il finit par retrouver sa place au sein de la gare, donnant un coup demain à ses camarades pour placer une bombe sur un train de l'occupant rempli de munitions alors que la jeune fille n'a pas renoncé à le séduire.

Un film d'une ironie mordante . Il est assez irrésistible de voir l'officier de la Vermacht soutenir en 1944 que les troupes nazies malgré quelques difficultés passagères contrôlent la situation avec la même conviction qu'un commissaire politique défendant les vertus du plan  quinquennal, personne n'est dupe... 
Film sensuel aussi où en opposition à la pruderie des autorités, il montre en contrepoint la beauté des femmes, le plaisir des corps avec une grâce absolue. Notamment dans une scène mythique où un homme s'amuse à tamponner les cuisses et les fesses de son adorable collègue qui se retrouve momentanément tatouée de tous les tampons officiels.
Le film de Jiri Menzel, drôle, intelligent, sensuel respire la liberté dans toutes ses formes... Liberté sexuelle, liberté politique, liberté de rire... Il nous a d'ailleurs confié que si peu de films de l'ouest étaient projetés alors de l'autre coté du mur,ils avaient pu voir les films de la nouvelle vague, qui furent pour eux une vraie révélation et une source inépuisable d'inspiration, les nouvelles caméras permettaient un tournage rapide dans les rues en décor naturel loin des lourdeurs imposées par un tournage en studio. Trains étroitement surveillés est un film  tchèque rempli d'espoir qui annonçait un printemps à venir...
Il nous a d'ailleurs confié l'histoire des sentiments tchèques depuis l'après guerre: "Nous n'avions plus de liberté mais nous avions espoir, nous avons eu la liberté mais nous avons perdu l'espoir... j'ai bien que peur que nous perdions à nouveau la liberté, cette fois ce sera sans espoir... Sombre époque!"

Sorti dans une copie neuve le film est à nouveau sur les écrans !

Elvis Presley - The Sun Session

Nous avions découvert Elvis Presley bouffi, dévoré par les médicaments, habillé par des combinaisons de strass, la voix plutôt sirupeuse... nous n'aimions pas, nous ne comprenions pas le phénomène autour de sa personne. Puis un jour nous avons posé sur notre platine, ses premiers titres enregistrés dans les studios mythiques de Sun Records de Memphis, nous révélant tout le génie du jeune homme nourri par le blues le country et le gospel qui inventait une nouvelle musique, le rock'n roll.
Une musique nouvelle, sensuelle allait sortir de ces studios, et allait bouleverser pas mal de choses par les déhanchements qu'elle engendrait, un tremblement de terre sexuel... Un chant qui libère les corps ne pouvait que créer le scandale.Le début d'une nouvelle ère parti du sud des Etats Unis, celle de la libération sexuelle !

The sun sessions de Elvis Presley est notre album de la semaine.

samedi 8 novembre 2014

Les fourberies de Scapin - Laurent Brethome

Qu'est-ce qu'un classique ? Un texte que l'on relit et qui nous semble toujours nouveau . (Cécile Ladjali - Le monde du 23 mars 2013).


Dans le port de Naples, Octave a tout d'une petite frappe qui aime à jouer les caïds, mais dés qu'il apprend le retour prématuré de son père Argante, il panique, il s’effondre. Il sait que son tout récent mariage avec Hyacinthe une jeune fille sans fortune va déclencher le  courroux d'Argante qui avait d'autres projets pour lui.  Son ami Léandre n'est pas plus fier, son père est aussi de ce voyage  et il ne va pas apprécier de découvrir sa passion pour la bohémienne Zerbinette. C'est panique et désarroi sur les quais.
Scapin le valet de Leandre est l'unique recours. Habile, rusé,  il sait manipuler, inventer. Lui seul peut faire accepter aux parents la situation de leurs enfants. Il ne se fait pas fait prier, trop heureux d'aller contre l'ordre établi, lui dont les forfaits passés lui vont valu quelques séjours en geôles. De quoi nourrir son goût pour la rébellion...
La tache n'est pas si ardue, le bourgeois souvent compromis par ses affaires se révèle face à la difficulté, pleutre, geignard, ne refusant plus de lâcher un peu de monnaie malgré une pingrerie maladive.Il s'amuse d'eux, Scapin, profitant même de l'occasion pour leur filer quelques coups de bâtons bien sentis.... le mariage est imposé aux deux pères mais par une pirouette finale, nous découvrons que l'ordre établi n'est point compromis, les deux fils deviendront comme les pères. Comme Bérénice, Job ou Tac, les héros des précédents spectacles de Laurent Brethome, Scapin  se retrouve seul, confronté à sa propre solitude, exclu... Sombre final.
Deux containers, des costumes d'aujourd'hui, des flingues qui remplacent les dagues, un Scapin contemporain mais où l'esprit de Molière est partout... Il ressort toujours un coté sombre de ses pièces , une impossibilité à ébranler le socle établi des puissants, mais ils ne nous empêcheront pas de  rire d'eux, d'en faire des ridicules.... Laurent Brethome est totalement dans cet esprit là, nous offrant un spectacle drôle et sombre duquel on sort totalement revigoré. Et si nous avons cité Cécile Ladjali en préambule, c'est parce que justement ce spectacle nous invite sans en trahir l'auteur à poser un regard nouveau sur la comédie de Molière. Il rend ici parfaitement l'urgence de la situation qui n'est pas sans engendrer une violence inéluctable. Pas de temps pour la réflexion, tout est action.
L'aspect impressionnant du théâtre de Laurent Brethome est sa capacité à jouer avec les espaces comme si la scène n'était pas une contrainte mais un espace de liberté sans limite, capable de passer en un instant de la scène intime à la scène de groupe. Tel un cinéaste, usant de tous les artifices, lumière, son,  il manipule le regard du spectateur . Cela fonctionne par une scénographie brillante mais aussi par un jeu parfait des acteurs qui livrent une performance physique où la voix  révèle toute la puissance du texte avec cette volonté de ne jamais perdre le spectateur, qu'il soit toujours au fait de ce qui se joue sans chercher à nous conforter, il aime à nous déstabiliser, nous oblige à nous interroger, c'est toute la richesse de son travail et l'essence même du théâtre populaire.
Si tous les acteurs sont parfaits dans leur rôle dans un parfait esprit de troupe, nous restons impresssionnés par la présence de Philippe Sire qui donne une épaisseur redoutable  à son personnage d'Argante qui ne fait que rendre plus grand Scapin. Scapin c'est Jérémie Lopez de la comédie Française, il communique parfaitement le plaisir qu'il prend à jouer ce délicieux voyou. Il sait parfaitement que la justice n'est pas juste mais qu'elle est juste là pour protéger les puissants. Mais qu'importe, il se bat, il ruse, il met à genou le bourgeois, mais le rideau tombe et le monde n'est pas meilleur...
Laurent Brethome révèle sans gâcher le plaisir du rire toute la noirceur et la violence des Fourberies de Scapin. Magistral !

dimanche 2 novembre 2014

La chambre verte - François Truffaut

François Davenne est un miraculé, il a traversé la "Grande Guerre" sans aucune blessure. Tous ses amis proches sont morts. Lorsqu'il rentre chez lui il peut épouser la jeune femme qu'il aime tendrement mais elle décède .
Nous le retrouvons dix ans plus tard , aux obsèques de l'épouse d'un ami pour lequel il est le seul à trouver les mots justes .
 Julien Davenne vit avec les morts, rédacteur au Globe,vieux journal d'une ville de l'est,  il est le spécialiste des nécrologies. Il partage sa demeure avec sa gouvernante Madame Rambaud et un enfant sourd muet.
Il  a consacré une chambre  à la mémoire de son épouse où des bougies brulent en permanence.
Il rencontre une jeune fille Cécilia dans une vente publique. Cette dernière se rappelle avoir rencontré Julien Davenne alors qu'elle était adolescente avant la guerre, elle avait alors été impressionnée par la qualité d'écoute de cet homme qui lui avait parlé comme à une adulte. Il partage avec elle sa fascination secrète pour les  morts et sa volonté de leur dédier un temple dans une chapelle abandonnée. Meurtrie par la mort récente  d'un homme dont elle fut très amoureuse, la jeune femme est prête à le suivre dans sa folie.
Coupable d'être vivant, d'avoir traversé la guerre sans une écorchure, Julien Davenne est incapable de faire le deuil de son épouse. Il veut consacrer tout son temps aux disparus, maintenir leur mémoire, n'acceptant pas de voir son camarade se remarier, un acte qu'il considère comme une immonde trahison. Il porte à lui seul, l'ambiance mortifère de l'après guerre, amplifiée par le désastre de la guerre espagnole. La mort est partout, on lui érige des monuments dans tous les villages.
François Truffaut, inspiré par des nouvelles d'Henry James, signe un film sombre d'une sobriété totale. Lui, l'homme qui aimait les femmes filme sans sa sensualité coutumière, Nathalie Baye. Aucun plan  ne s'attarde sur ses jambes. Mais un film qui lui est aussi personnel , lui a qui a toujours rappelé à travers ses articles, ses interviews les disparus qui lui furent proches:  André Bazin Françoise Dorléac... Comme tout un chacun il vivait avec son panthéon.
C'est dans ce film fascinant,qu'il réalise sa meilleure performance d'acteur, il est particulièrement émouvant.
Un film parfait pour cette journée du 2 novembre qui fête les morts.

Film vu dans le cadre de notre cycle 2014, année François Truffaut.

Jean-Louis Murat - Babel


Jean-Louis Murat n'est pas comme les autres. Il ne respire pas, il chante, c'est quasiment une question de survie que vient nous rappeler régulièrement et pour notre plus grand bonheur la sortie d'un nouvel album... Nous imaginons ses tiroirs remplis de chansons écrites de bon matin ou au soir tombant, inspirées par le chant d'un oiseau, le bruit d'une rivière  , la pluie qui tombe, où le sentiment du temps qui passe et des états d’âme qui rythment la vie... Des chansons de paysan au sens le plus noble, des chansons d'un homme de la terre... une musique qui ne semblait exister qu'en Amérique !
Une rencontre avec le groupe voisin "Delano Orchestra", nous rappelle le temps passé celui où il se faisait accompagner par Calexico. Nous sommes transportés par le son des cuivres, l’énergie de cet album épais de 20 chansons à l'esprit fraternel ... Qu'on se le dise Jean-Louis Murat n'est pas misanthrope, il n'aime pas les mauvaise gens et le fait savoir, parfois bruyamment. Pourrions nous lui reprocher ?

Nous aimons passionnément la chanson de l'auvergnat, Babel est notre album de la semaine !


LinkWithin

Related Posts Plugin for WordPress, Blogger...