mardi 27 janvier 2015

Le grand sommeil - Raymond Chandler

Raymond Chandler
Il est difficile de ne pas penser au Père Goriot à la lecture du Grand Sommeil de Raymond Chandler et de se faire la remarque qu'il n'est finalement pas drôle de se retrouver veuf avec du patrimoine entouré de ses deux filles...
Celles du général Sterwood, un homme richissime  ne cessent de le tourmenter alors qu'il n'a plus qu'un fil de vie . Victime d'un maitre chanteur en possession de photos compromettantes et plutôt dénudées de sa plus jeune fille Carmen, il fait appel aux services du détective Philippe Marlowe.
Aussitôt ressorti de son entretien avec le vieux général, le détective est alpagué par sa fille ainée Vivian persuadée que le détective a été engagé pour résoudre  la disparition inexpliquée de son mari un ancien bootlegger qui avait su attirer la sympathie de son beau père malgré son passé louche.
Marlowe le détective décontracté et quelque peu persifleur ne s 'offusque pas de cette famille de dingues mais il ne mesure pas tout de suite où cette affaire simple en apparence va le mener, il n'en ressort pas totalement indemne  ramassant au passage quelques beignes.  Il découvre bien vite que le maitre chanteur est Geiger, un bouquiniste dont la boutique n'est que la couverture d'un trafic de photos pornographiques.  Alors qu'il planque devant sa maison, le détective alerté par un coup de feu retrouve Geiger mort et Carmen nue et complétement droguée. C'est l'Amérique, et il suffit de peu pour que les flingues sortent et que les morts tombent.... Le détective n'en a pas fini avec les filles Sternwood.
Il pleut sans cesse dans le Los Angeles de Raymond Chandler, où se croisent   au cœur de la nuit ,névrosés et canailles formant un cocktail explosif  . Il fut catalogué dans un genre mineur de la littérature celle des séries noires, mais ici l'intrigue plutôt bien ficelée n'est qu'un prétexte à porter un regard sans concession et sans illusion sur l'Amérique corrompue et peu fidèle à ses idéaux, un portrait qui fait de Raymond Chandler un écrivain majeur de la littérature américaine; Boris Vian ne s'est pas trompé en le traduisant . Cet extrait d'un dialogue où un flic confie à Marlowe sa vision de l'Amérique illustre parfaitement la noirceur de l’écrivain:
"- Je suis un flic, dit-il. Un flic tout ce qu'il y a d'ordinaire. Raisonnablement honnête. Aussi honnête qu'on peut l'espérer pour un homme vivant dans un monde où ce n'est plus de mise. C'est la principale des raisons pour lesquelles je vous ai demandé de venir ce matin. Je voudrais que vous en soyez convaincu. Etant un flic , je préfère que la loi triomphe. j'aimerais voir de belles canailles bien habillées comme Eddie Mars s'abimer les ongles dans des carrières de cailloux à Folsom, côte à côte avec les petits minables des faubourgs sous-alimentés qui se sont fait poirer à leur premier casse et n'ont jamais eu de chance depuis. C'est ça que je voudrais. Vous et moi, nous avons vécu assez longtemps pour savoir que jamais je ne verrai jamais ce jour là. Ni dans cette ville, ni dans une ville moitié moins grande , ni dans le moindre recoin des florissants, vastes et verdoyants Etats-Unis d'Amérique. Nous ne dirigeons pas ce pays de cette façon là."
C'est  notre première contribution à notre cycle 2015, année noire

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