dimanche 25 août 2013

Macbeth - Orson Welles

Il existe deux versions de Macbeth tourné par Orson Welles. La première fut mal reçue par le public et les critiques notamment du fait de l'accent écossais rendant le texte difficilement compréhensible par le spectateur américain. Une deuxième version est réalisée où les voix sont en grande partie réenregistrées, parfois par d'autre acteurs, le film est lui même raccourci pour être ramené à moins d'une heure trente et satisfaire ainsi les diffuseurs qui peuvent multiplier les séances dans une même journée.
Orson Welles avait fait le choix de faire parler ses acteurs avec un fort accent écossais, les voix furent pré enregistrées et le film tourné en play back. Il s'explique sur ce choix dans son livre d'entretien avec Peter Bogdanovitch:
"Ses moments les plus truculents souffrent terriblement de cet accent raffiné et distingué du Sud de l'Angleterre qui est devenu l'anglais standard. C'est merveilleux quand un acteur irlandais ou écossais qui a une bonne élocution joue du Shakespeare. Même certains accents américains aussi, tant que les accents gardent leur vigueur. De toute façon, pourquoi les écossais de Macbeth ne devraient-ils pas paraitre écossais? Le chantonnement coloré de l'Ecosse est parfait pour cette terre et cette horreur. Si je faisais un film sur le paradis, je le ferais avec un accent écossais."

C'est la première version que nous avons vu cet après midi, celle voulue par Orson Welles. Tourné en trois semaines dans un décor de carton pâte, le film est particulièrement prodigieux, absolument terrifiant. Composé de longs plans séquences où selon Jean Cocteau la caméra est toujours placée d'où l’œil du destin suivrait ses victimes.
Alors qu'il vient de battre un prétendant au trône d'Angleterre, Macbeth de retour chez lui accompagné de son acolyte Banquo est interpellé par trois sorcières dans la campagne brumeuse. Elles lui annoncent  qu'il sera roi, et à Banquo que ses descendants seront eux aussi rois contrairement à lui. Encouragé par sa femme , Macbeth accélère par le meurtre du Roi Duncan sa prise du pouvoir. Mais très vite son entourage suspecte le nouveau monarque et le meurtre appelle le meurtre, il lui faut par la suite pour assoir son pouvoir la mort de Banco et de ses fils... mais il est impossible d'aller à l'encontre des prémonitions des trois sorcières.
C'est la trajectoire d'un couple qui glisse dans la Tyrannie, le sang, la folie... Dans un final ahurissant, Macbeth se retrouve seul dans son château, au milieu de nulle part, épilogue qui  peut faire penser à celui de Citizen Kane.
Par ses plans séquences, les clairs obscurs, la brume omniprésente, sa mise en scène baroque Orson Welles fait de la pièce de Shakespeare un long poème macabre absolument terrifiant, par certains détails notamment la couronne portée par le héros qui fait penser à celle de la statue de la Liberté nous retrouvons toute l'ironie du cinéaste. Son interprétation particulièrement impressionnante donne toute la dimension à son personnage, nous le voyons physiquement glisser vers  la folie.
Il fut reproché à Orson Welles de n'avoir pas respecté  la chronologie de la pièce, il a coupé, il a interverti certaines scènes. Il s'est réapproprié le texte de Shakespeare, c'est peut être là le seul moyen de faire une véritable œuvre de cinéma et non une simple version enregistrée d'une représentation théâtrale. Pour autant par sa puissance évocatrice, sa réflexion sur le pouvoir et la folie, il nous semble difficile de voir dans le film de Orson Welles une trahison à l’œuvre de Shakespeare .

Macbeth de Orson Welles est un chef d’œuvre.

Film vu dans le cadre de 2013, année Orson Welles

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