Condamné en 2010 pour avoir participé aux manifestations
dénonçant la réélection truquée de Mahmoud Ahmadinejad, Jafar
Panahi n' a plus le droit de faire des films de cinéma pendant 20
ans. C'est une histoire vieille comme le monde, impossible de
faire taire celui qui doit parler... Coûte que coûte Jafar Panahi
tourne... Ces deux films précédents furent tournés
clandestinement dans son appartement. Pour celui ci, il s'est
installé malicieusement au volant d'une voiture qui se promène tel un taxi dans les rues
de Téhéran avec des petites caméras numériques embarquées à son bord. Les personnages
défilent et nous dressent un portrait de la capitale iranienne et de
son irrépressible désir de liberté.
Films de palabres qui oscillent entre rire et gravité, nous
finissons même à rire du plus consternant quand la nièce du
cinéaste lui explique qu'elle doit tourner un film pour l'école
dans le cadre d'un concours organisé par l'éducation nationale.
Elle lui récite les consignes strictes qui lui sont imposées pour
réaliser "un film diffusable": "respect du voile et
de la décence islamique, aucun contacte entre hommes et femmes, pas
de noirceur, pas de violence, pas de cravate pour les personnages
positifs, pas de prénom persan pour les personnages positifs.
Préférer les prénoms sacrés des prophètes."
L'avocate Nasri Sotoudeh vient d'être rayée du barreau pour
avoir défendu les opposants au régime islamique , en évoquant le
cas d'une jeune fille , elle nous rappelle que l'oppression est
toujours présente en Iran où tout est contrôlé.
Aprés Cosmopolis de David Cronenberg et Holy Motors de Leos
Carax , la voiture est devenue un lieu de tournage, mais si les
limousines des deux premiers cités ressemblaient à des bunkers
ambulants les mettant à l'abri du chaos du monde, la berline du
cinéaste iranien ne lui offre aucune protection. Il vit en
permanence avec le sentiment d'être surveillé, épié où les gardiens de la révolution peuvent à tout moment jaillir...
Cinéma de résistance, le film sympathique atteint cependant ses
limites avec ses moyens minimalistes mais là n'est pas vraiment le
souci. L'important est que le créateur ne soit pas réduit au
silence, qu'il trouve le moyen d'envoyer des "cartes postales"
au reste du monde pour témoigner de sa situation, c'est peut être
là le meilleur moyen d'assurer sa sécurité: éviter l'oubli...
Il faut aller voir Taxi Téhéran..
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