dimanche 15 février 2015

Les merveilles - Alice Rohwarcher

Chronique familiale au cœur de l'Ombrie, Gelsomina et ses trois jeunes sœurs vivent avec leurs parents et une tante  dans une ferme délabrée à l'écart du monde. Wolfgang persuadé que la fin du monde est proche veut tisser des liens privilégiés avec la nature. Ils élèvent les moutons, et produisent du miel... Les enfants participent aux taches de la ferme, Gelsomina l'aînée est particulièrement mise à contribution notamment pour le suivi des ruches.
Wolfgang d'origine allemande affiche un caractère difficile , rugueux, tentant souvent maladroitement de diriger son entourage féminin... Nous devinons vite un passé dans les mouvances d'extrême gauche , la petite communauté a renoncé à la révolution pour atteindre une forme d'idéal écologiste à l'abri des dérives de la société de consommation . Mais le caractère rugueux, impulsif  du père finit par devenir insupportable , Gelsomina qui assume une lourde charge  doit vivre telle une adulte privée des plaisirs de son âge, tiraillée entre son monde et son envie d'ailleurs. Nous comprenons certes les colères de Wolfgang qu'en il s'en prend aux chasseurs ou  à son voisin utilisant les produits nocifs qui tuent ses abeilles mais lorsque Gelsomina rêve de participer à une émission de téléréalité dans le plus pur style berlusconnien, "Le village des merveilles", il ne sait pas trouver les mots pour lui expliquer son refus.  Sa femme doit faire preuve d'une patience à toute épreuve face à son inflexibilité mais aussi à ses gamineries notamment quand il  décidé stupidement d'acheter un chameau plutôt que de consacrer les maigres revenus à la réhabilitation de la ferme, personnage lumineux et aimant, sa tendresse et son écoute tiennent la famille.
Martin, un jeune délinquant placé dans la ferme dans le cadre d'un programme de réinsertion, vient bouleverser cet équilibre familial, ouvrir le regard de ces jeunes filles habituées à vivre en vase clos.

Le film  nous renvoie aux origines du cinéma moderne  et au néo-réalisme italien, nous voyons ici le travail de l'apiculteur comme nous voyions les pécheurs à leur labeur dans Stromboli de Roberto Rosselini...mais il a une vraie grâce dans la justesse des relations humaines qu'il nous raconte. Ce film est une heureuse surprise, Gelsomina sûrement un clin d’œil  au personnage de la Strada incarné par Giuletta Massena donne par sa présence toute la puissance à cette chronique familiale où les éléments autobiographiques de la cinéaste sont apparemment nombreux.

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