mercredi 1 août 2012

Les faux-monnayeurs - André Gide (1925)

Un jeune homme Bernard Profitendieu est seul à son domicile pour réviser et préparer les épreuves du baccalauréat. Il ne peut s’empêcher d'aller fouiller dans les affaires de ses parents, où il finit par découvrir une correspondance de sa mère avec un amant  et apprend qu'il  est le fruit de cette relation. Bernard quitte définitivement le domicile familial après avoir écrit à celui qui n'est plus son père. Il rejoint son ami Olivier au jardin du Luxembourg pour obtenir son aide.
Mais très vite, nous comprenons que nous ne sommes pas en présence d'un simple récit linéaire, André Gide renouvelle ici le roman, pratiquant avec art la mise en abyme, déjà utilisée dans Paludes son précèdent ouvrage. Edouard, un oncle d'Olivier, qui engage pour un temps Bernard comme secrètaire particulier, est un écrivain travaillant sur un roman nommé "les faux-monnayeurs". Il nous détaille d'ailleurs parfaitement ses ambitions:

"-Eh bien ! Je voudrais un roman qui serait à la fois aussi vrai, et aussi éloigné de la réalité, aussi particulier et aussi général à la fois, aussi humain et aussi fictif qu'Athalie, que Tartuffe ou que Cinna.
- Et... le sujet de ce roman?
- Il n'en a pas, repartit Edouard brusquement; et c'est là ce qu'il y a de plus étonnant peut-être. Mon roman n'a pas de sujet. Oui, je sais bien; ça a l'air stupide ce que je dis là. Mettons si vous préférez qu'il n'y aura pas un sujet... "une tranche de vie", disait l'école naturaliste. Le grand défaut de cette école, c'est de couper sa tranche toujours dans le même sens; dans le sens du temps, en longueur. Pourquoi pas en largeur? ou en profondeur? Pour moi, je ne voudrais pas couper du tout. Comprenez moi: je voudrais tout y faire entrer, dans ce roman. Pas de coup de ciseaux pour arrêter, ici plutôt que là, sa substance. Depuis plus d'un an que j'y travaille, il ne m'arrive rien que je n'y verse, et que je n'y veuille faire entrer: ce que je vois, ce que je sais, tout ce que m'apprend la vie des autres et la mienne...
"

Nous croisons une multitude de personnages, mais nous sommes jamais perdus au cours de la lecture,  fluide et agréable. A travers toutes ces histoires, Gide  fait une description sans concession du petit monde littéraire parisien à travers un écrivain en vogue plutôt ridicule, Passavant. Nous retrouvons également par différents personnages, de nombreux éléments biographiques de l'auteur, le poids de la religion protestante et surtout l'homosexualité, même si ici, le terme n'est jamais explicité, il est clairement abordé .Nous comprenons combien l'hypocrisie de l'époque, le règle du silence  pèse sur l'auteur.  Ce livre est d'une totale modernité par ses thèmes, le ton de liberté, le regard posé sur les femmes. Gide porte un regard d'espoir sur la jeunesse, qui refuse de reproduire les conventions sociales des ainés.
Cette liberté d'écriture n'a jamais quitté André Gide et lui valu de sérieuses inimitiés. Par la suite il s'est exprimé tout aussi librement sur les politiques coloniales en Afrique, ou sur la réalité soviétique, dénonçant avec vigueur la mascarade des procès de Moscou. 

Il est assurément un grand nom du XXeme siècle!

Ce livre a été lu en partie à l'ombre de cet arbre pas loin de la lanterne des morts de Fenioux .

6 commentaires:

  1. Lu adolescente et j'avais adoré ;-)

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    1. Nous voulons bien le croire, c'est exactement le genre de roman que les adolescents adorent. Il y a comme cela des livres que nous pouvons regretter de ne pas avoir lu au cours de cet âge, c'était également le cas du livre de Steinbeck "des souris et des hommes"

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  2. Je le note!
    Mais pour l'instant je suis aux prises avec Chamoiseau et c'est bien difficile...

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    1. Nous n'avons jamais lu Chamoiseau, merci de nous prévenir...

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  3. Un an que je dois le relire, j'avais beaucoup aimé jeune, mais c'est si loin !! Et ce n'est pas ce mois-ci que ça va s'arranger, programme de lectures over-booké !!! ;)

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    1. Chez nous, il a attendu une bonne année au coin d'une étagère

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