Chaque fois c'est le théâtre qui nous amène à Romain Gary. Notre première expérience "La vie devant soi" ne fut pas concluante, nous n'avons pas accroché à ce roman dégoulinant de bons sentiments. L'adaptation au théâtre de ce texte avec Myriam Boyer dans le rôle titre de Rosa dans une mise en scène de Xavier Jaillard avait fini de nous décourager, la longue agonie de Rosa nous avait plongé dans une soirée d'ennui.
La nuit sera calme est notre deuxième expérience, nous avons voulu découvrir ce texte avant d'assister à une lecture faite par Jacques Gamblin. Ecrit sous forme d'interview, il ne faut pas se duper c'est Gary lui même qui se pose les questions, cet ouvrage permet de revenir sur la vie de l'auteur aux deux Goncourt. Nous n'avons pas pu apprécier toute la substance de ces propos, trop ignorants de son oeuvre .Nous sortons avec un avis mitigé de cette lecture où nous avons vu deux facettes du personnage:
- Le Gary intellectuel, qui a travers son expérience de diplomate se lance dans des théories géopolitiques qui nous semblent datées et finalement peu intéressantes. Sa vision du monde bipolaire, de la Chine ou ses commentaires sur l'histoire récente nous ennuient totalement. Il se révèle plus intéressant lorsqu'il nous parle du Maccarthysme sur lequel il porte un jugement sans concession. Parfois son sens de la formule sonne particulièrement juste : "Le nationalisme surtout quand il est jeune, frais, pimpant, c'est d'abord le droit de disposer sans appel d'un peuple - par tyrannie intérieure - au nom des peuples à disposer d'eux mêmes"; mais sa justification de la peine de mort dans certaines situations nous a littéralement consterné par sa pauvreté intellectuelle...
-Le Gary conteur, celui qui nous raconte sa mère, son engagement dans la résistance, ses expériences diplomatiques en Bulgarie, à New-York ou Los Angeles, nous a bien plus séduit. car il et vrai que cet homme a eu une vie d'une richesse incroyable, il est truculent, captivant, nous ne nous lassons pas de ses récits incroyables, de ses rencontres (quel plaisir de retrouver ici un des nos cinéastes favoris John Ford)... On découvre un homme fragile, sujet à la dépression, parcourant le monde parce que finalement sa place n'est nulle part, parce qu'il espère un monde plus féminin et moins macho... si c'était une chanson ce serait le métèque de Georges Moustaki. Nous retenons que sa période la plus heureuse fut celle de la résistance où il connut avec ses amis aviateurs une période de vraie fraternité, d'ailleurs le titre de l'ouvrage est un hommage à l'un d'entre eux, Bordier un pilote de son escadrille qui aimait à dire en regardant le ciel : "la nuit sera calme". Enfin comment ne pas être glacé par sa réflexion sur le suicide qui nous rappelle le mythe de Sysiphe d'Albert Camus: "Il n'y a qu'un problème philosophique sérieux: le suicide. Juger que la vie vaut ou ne vaut pas la peine d'être vécue, c'est répondre à la question fondamentale de la philosophie", il justifie ainsi le nombre élevé de suicides à San Francisco: "Je crois que c'est parce que la vie est beaucoup moins rapide qu'ailleurs aux Etats Unis: les gens ont le temps de méditer...et de conclure"
J'ai commencé pour ma part cette lecture après avoir vu Gamblin en lire des extraits qui sont très bien choisis car ils sont tous encore complètement d'actualité et pas du tout datés. Mais c'est vrai ses réflexions sur la peine de mort me consternent également...
RépondreSupprimermalgré nos quelques réserves,il ya de quoi faire une très belle lecture, il y a de très beaux passages dans ce livre. Puis nous sommes tombés sous le charme de Gamblin!
RépondreSupprimerJe ne sais pas si je me trompe en disant cela mais après Chien Blanc dans lequel il dénonce le racisme en général et celui qui existe chez les noirs en particulier, je pense que Gary n'était pas politiquement correct et disait ce qu'il pensait, certains de ses écrits ne passeraient pas aujourd'hui le barrage de certains éditeurs. Quant à son style, il varie légèrement avec les époques (grand écart entre La Promesse de l'aube et Clair de femme), mais comme il a écrit sous pseudo, peut-être était-ce voulu ? Il n'en reste pas moins un grand romancier et un humaniste profond. Je n'ai pas lu "La nuit sera calme" mais ça ne m'étonne qu'à moitié vos réflexions sur la peine de mort. Autre époque et éducation partiellement militaire... Il sera lu quand j'aurai fini ce qui me reste de lui en magasin (encore deux !)
RépondreSupprimerNous avons du mal à être séduit par Gary, nous ressentons pas vraiment son humanisme,le personnage nous semble ambigu, complexe mais notre expérience est limité, nous y reviendrons, nous persisterons...
RépondreSupprimerA suivre...