samedi 23 mai 2015

Trois souvenirs de ma jeunesse - Arnaud Desplechin

Paul Dedalus est de retour en France après une absence de dix ans passés dans les anciennes Républiques Soviétiques d'Asie et en Iran pour mener son travail d'anthropologue... Après un passage de frontière délicat pour un problème de double identité, il prend un emploi au ministère des affaires étrangères, il est seul dans la capitale, il doit se rendre à la DGSE pour être interrogé au sujet de son passeport... Des événements qui l’amènent à se retourner sur trois souvenirs de sa jeunesse ...
Paul Dedalus enfant s'oppose à sa mère, armé d'un couteau il lui interdit l'accès à l' étage partagé avec sa sœur et son frère  alors que le père est absent. Il finit par quitter le domicile familial pour aller vivre chez une grande tante. Sa mère se suicide quelque temps plus tard.
Nous retrouvons Paul Dedalus adolescent, il doit faire un voyage scolaire à Minsk. C'est l'occasion pour son meilleur ami, juif  de transmettre une enveloppe d'argent à des membres de la communauté juive de Minsk pris au piège en URSS et qui espèrent rejoindre Israël. Paul Dedalus aide son ami et l'accompagne, il abandonne même son passeport pour permettre au jeune homme de la famille de partir...
Enfin c'est la figure d'Esther,  jeune fille irrésistible  qui faisait tourner la tête de tous les garçons de Roubaix qui revient à la mémoire de Paul. Il se souvient de cette première fois... De retour de Paris où il étudiait l’anthropologie , il aborda la jeune fille... Le début d'une relation amoureuse chaotique et passionnée... Esther, il l'aime, il la trompe elle le trompe, ils s'écrivent, ils franchissent ensemble les années qui vont les mener vers l'âge adulte...

Paul Dedalus nous l'avions découvert dans Comment je me suis disputé ma vie sexuelle... et il est fort à parier que le cinéaste ne se doutait pas alors de l'importance qu'il allait prendre dans sa filmographie. Un personnage à qui l'acteur Mathieu Amalric révélé par ce rôle a donné toute son épaisseur. Paul Dedalus nous le retrouvions jeune adolescent , dans Un conte de Noel . Personnage récurent des films de Arnaud Desplechin, il ne forme pas pour autant un individu cohérent, l'histoire est chaque fois différente mais pour autant il y a une forte proximité entre tous ces homonymes. Il nous semble être le double romanesque du cinéaste qui à partir des expériences de sa propre vie  a cette capacité rare à créer du romanesque, de vivre un même événement en  multipliant les fictions bien loin de l'autobiographie. Ce film est en quelque sorte son temps retrouvé, celui qui nous éclaire sur ses précédents films: La vie des morts, Comment je me suis disputé..., Un conte de noël. C'est une variation autour du même thème et notamment de celui de la famille qui est au cœur du cinéma de Arnaud Desplechin.
Par l'utilisation de la voix off, il est facile de le situer  dans la la lignée de François Truffaut un héritage qu'il revendique mais il nous semble aller plus loin que l'auteur de la série des Doisnel dans la construction de ses films jamais linéaires mais où il ne nous perd jamais.
Paul Dedalus a toujours une bande qui vit autour de lui, mais il reste  seul, il trace sa route et affronte les difficultés , refusant le renoncement aussi bien dans ses études que pour ses amours... Un courage qui ne l'abandonne jamais qui lui permet de faire face à sa mère , aux prétendants d'Esther... Il reste le centre de sa famille malgré son départ vers la capitale, il est celui vers qui tous les regards convergent . Rien ne l'arrête, pas même l'absence d'argent qui le contraint à tous les culots pour arriver à se loger ou convaincre le professeur qu'il s'est choisi pour maître de l'accepter comme élève . Sa volonté lui permet de devenir anthropologue assurément c'est la même force qui a porté le cinéaste à s'accomplir.

C'est un film impressionnant, captivant .Arnaud Desplechin est un virtuose du récit mais il n'est jamais dans l’esbroufe, il est assurément le cinéaste le plus romanesque de sa génération, il a aussi cette capacité rare à mettre en lumière tout le talent de ses acteurs. 
Emmanuelle Devos était une fabuleuse Esther du Comment je me suis disputé ma vie sexuelle, et nous sommes presque à pleurer que le cinéaste ne lui ai pas trouvé une place dans ce nouveau film mais  Lou Roy Collinet est tout aussi remarquable... La jeune fille nous semble ici incarner un personnage plus complexe évoluant au fil de l'histoire, parce que peut être plus que Esther elle est  la réunion des trois personnages féminins de Comment je me suis disputé incarné alors outre Emmanuelle Devos par Jeanne Balibar et Marianne Denicourt.
Quentin Dolmaire est tout aussi extraordinaire dans son incarnation de Paul Dedalus, par son charisme sa force ,sa voix si particulière il est  un héros en quête d'absolu qui ne vous lâche plus ..
Nous avons vu et déjà revu Trois souvenirs de ma jeunesse de Arnaud Desplechin, et nous en voyons pas comment il pourrait exister un film plus beau, plus grand en cette année.


Ce film se situe totalement dans le thème du ciné club de Potzina consacré ce mois à la famille !

2 commentaires:

  1. J'aime beaucoup le cinéma de Desplechin, j'attends avec impatience que ce Trois souvenirs de ma jeunesse sorte dans mon ciné de quartier. Vous m'avez donnée l'eau à la bouche :)

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  2. Ce film ne passe déjà plus dans mon cinéma.... il faut dire que ces derniers moi j'ai délaissé le cinéma pour vivre d'autres choses, et je dois reconnaître que cela me manque énormément (soupir).

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