dimanche 21 février 2016

Tartuffe de Molière (Mise en scène Luc Bondy)


Trois générations d'une même famille se retrouvent au petit matin autour d'une table pour le petit déjeuner, les gestes précis presque mécaniques nous font comprendre que c'est là une habitude, l'ambiance est plutôt tendue, le souci porte un nom : Tartuffe .
Tartuffe est le nom du dévot qu' Orgon le chef de famille de famille, absent ce matin là a fait entrer dans la demeure. Tartuffe, il n'est question que de lui, il est au centre des conversations pourtant il n'apparait qu'au début du troisième acte.
Orgon veut le marier à sa fille Marianne pourtant promise à Cléante qu'elle aime tendrement, schéma classique du théâtre de Molière ... Révéler l'hypocrisie de Tartuffe à Orgon devient une urgence, comme un signe le sol à damier noir et blanc parfait pour la partie d'échec qui va se jouer !
Luc Bondy comme pour mieux révéler l'universalité et donc le génie de Molière a situé cette intrigue familiale dans un cadre bourgeois contemporain... Ainsi on voit la servante Dorine, esprit éclairé  cacher un enregistreur pour mieux confondre l'hypocrite Tartuffe et on se retrouve un instant chez les Bettencourt où les employés de maison usaient des mêmes stratégies pour confondre ceux qui cherchaient à  spolier leur patronne et à  séparer les parents des enfants.
Tartuffe, c'est Micha Lescot, impressionnant il joue de son physique, ses bras tentaculaires font penser à des pattes d'araignée qui tissent la toile pour garder prisonnier celui qui est prêt à lui céder sa fille mais aussi sa fortune.

Orgon n'est pas vu pour autant comme un idiot cela serait trop simple, il n'a pas su voir l'hypocrite en Tartuffe, il ne voit qu'un homme de foi, droit, un homme qui offre des garanties de bonne morale dans cette maison dont il doit parfois s'absenter. Heureusement sa femme Elmire est là pour confondre l'hypocrite, merveilleusement interprétée par Audrey Fleuriot, Tartuffe succombe à ses charmes dans une scène cocasse où Molière est au sommet de la drôlerie et d'une certaine cruauté...
La famille libérée se retrouve pour le diner un peu triste, Cléante et Marianne dansent, l'amour est sauf ?

Magnifique, Tartuffe est peut être notre pièce préférée de Molière, Luc Bondy en fait une affaire familiale, il aime à regarder le fonctionnement de chacun quand un élément extérieur vient révéler les failles, cette mise en scène complète son travail sur Ivanov de Tchekov que nous avions vu il y a quelques mois.  Subtile, terrible, drôle, cette pièce captive, elle sonne juste, comme les mots de Dorine lorsque Tartuffe lui tend un voile pour qu'elle couvre son sein:

"Vous êtes donc bien tendre à la tentation,
Et la chair sur vos sens fait grande impression?
Certes je ne sais pas quelle chaleur vous monte:
Mais à convoiter, moi, je ne suis pas si prompte,
Et je vous verrais nu du haut jusqu'en bas,
Que toute votre peau ne me tenterait pas"

Vu aux Ateliers Berthier - Théâtre de l’Odéon

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