mercredi 28 mars 2012

Mars - Fritz Zorn

C'était lors d'une émission littéraire où nous avons surpris Jean- Philippe Blondel exprimant sa gratitude à Bernard Pivot pour ses émissions littéraires passées qui lui avait permis de découvrir des auteurs durant son adolescence qui le marquèrent à tout jamais. Il cita notamment Mars de Fritz Zorn, Bernard Pivot l’œil pétillant confirma: " Quel livre!"

Alors nous avons eu la curiosité d'ouvrir ce livre, il débute ainsi:

"Je suis jeune et riche et cultivé; et je suis malheureux, névrosé et seul. Je descends d'une des meilleures familles de la rive droite du lac de Zurich, qu'on appelle aussi la rive dorée. J'ai eu une éducation bourgeoise et j'ai été sage toute ma vie. Ma famille est passablement dégénérée, c'est pourquoi j'ai sans doute une lourde hérédité et je suis abimé par mon milieu. Naturellement j'ai aussi le cancer, ce qui va de soi si l'on en juge d'après ce que je viens de dire. Cela dit, la question du cancer se présente d'une double manière: d'une part c'est une maladie du corps, dont il est bien probable que je mourrai prochainement, mais peut-être aussi puis-je  la vaincre et survivre; d'autre part, c'est une maladie de l'âme, dont je ne puis dire qu'une chose: c'est une chance qu'elle soit enfin déclarée. Je veux dire par là qu'avec ce que j'ai reçu de ma famille au cours de ma peu réjouissante existence, la chose la plus intelligente que j'ai jamais faite, c'est d'attraper le cancer."

C'est à une description clinique de sa névrose que s'attelle Fritz Zorn. Il commence par le récit de sa vie de famille qu'il considère à l'origine de son mal et nous voulons bien le croire tant la description est anxiogène dans ce milieu où il faut masquer ses émotions, n'exprimer aucune opinion juste son anticommunisme primaire. Nous sourions parfois à la lecture de ces pages avant de glisser vers la description de la dépression qui rend l'auteur asocial, totalement asexué. "Mon âme est castrée, je n'ai pas d'impulsions sexuelles, je ne puis éprouver de sentiments sexuels ni pour les femmes ni pour les hommes."

Le rire est le propre de l'homme énonçait Rabelais, l'auteur suisse en est privé: "un autre signe de la névrose est que je ne peux pas rire. Signe peut être un peu moins dramatique que celui qui a trait au sexe, mais qui n'en est pas moins accablant que cela."

Lorsque le diagnostic tombe, Fritz Zorn ne s'étonne pas de ce cancer qu'il considère comme "la simple illustration corporelle de son état d’âme"... cette volonté de faire de cette maladie la conséquence de ses états d'âme est assurément discutable au point de vue médical, mais nous comprenons le sens de son propos". C'est pour lui le début d'une renaissance; par le biais de cette maladie, il découvre son corps.

Fritz Zorn se sait condamné, sa vie fut un échec, il en fait le bilan, l'autopsie psychique avec une précision effrayante... C'est terrible, comme Bernard Pivot nous dirons simplement; "quel livre!"

3 commentaires:

  1. Carrère en parle aussi dans "D'autres vies que la mienne". Il cite d'ailleurs le même passage que vous. La référence est noté en tout cas. Ca me donne encore plus envie de le lire.

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  2. J'ai vu ce passage que vous citez quelque part ! Et j'ai aussi très envie de le lire !

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  3. Merci de nous rappeler que Emmanuel Carrére en parle dans "d'autres vies que la mienne", nous avions complétement oublié.

    Pour mars de Zorn, vous trouverez un lien ci dessous qui renvoie sur un article plus détaillé, plus complet, plus brillant...

    http://www.poin-poin.com/littture-mainmenu-89/380-fritz-zorn-mars

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