Un certain sourire - Françoise Sagan (1956)

Dominique est une jeune étudiante souvent confrontée à l'ennui. Elle partage son temps avec Bertrand son premier amour mais ce n'est pas non plus la passion. Dés qu'elle rencontre Luc l'oncle de Bertrand, elle est sous le charme de cet homme mur . Luc marié à Françoise n'a pas de mal à séduire la jeune étudiante et partage avec elle un séjour en amoureux sur la croisette à Cannes dans un hôtel de luxe... L'aventure est vue ici comme un voyage initiatique où Dominique découvre le sentiment amoureux, Luc rejoint Françoise, Dominique a toujours su que cette histoire était sans avenir, elle a définitivement grandi: " j'étais une femme qui avait aimé un homme. C'était une histoire simple; il n'y avait pas de quoi faire des grimaces".

Deuxième roman de Françoise Sagan qui fait ici une véritable étude du sentiment amoureux, à travers les yeux du personnage habituellement honni, la jeune fille qui "vient débaucher" l'homme marié. Mais pas de moralisme chez Sagan qui ne se permet aucun jugement, elle écrit en femme libre passionnée par la littérature de Proust. C'est absolument le genre d'histoire qui peut apparaitre sans intérêt, mais comme toujours l'écriture de Sagan captive même si parfois des figures de styles peuvent apparaitre désuètes, nous pensons notamment à la première nuit partagée par les deux amants: " Il me prenait dans ses bras, enlevait mon pyjama avec des gestes précautionneux, le jetait en boule par terre. Je lui fis remarquer qu'il serait tout de même froissé. Il se mit à rire doucement. Tous ses gestes étaient devenus d'une incroyable douceur. Il m'embrassait tranquillement les épaules, la bouche, continuait à parler: "Tu sens l'herbe chaude. Tu aimes cette chambre? Sinon, on irait ailleurs. C'est agréable Cannes..." Je répondais "oui oui" d'une voix étranglée. J'avais très envie d'être au lendemain matin. Ce n'est que lorsqu'il s'écarta un peu de moi et posa sa main sur ma hanche que le trouble me prit. Il me caressait et j'embrassais son cou, son torse, tout ce que je pouvais toucher de cet ombre, noire sur le ciel de la porte-fenêtre. Enfin il glissait ses jambes entre mes jambes, je glissais mes mains sur son dos; nous soupirions ensemble...."

Nous avons été marqué par cette scène du film de Xavier Beauvois "Des hommes et des Dieux"où la jeune fille interroge le moine incarné par Michael Lonsdale: "Comment sait on que l'on aime ?"
La réponse est peut être tout simplement dans ce roman de Françoise Sagan.