Il était une fois, c’est ainsi que pourrait s'ouvrir ce roman tant il nous renvoie aux contes de notre enfance. En 1187, Esclarmonde jeune fille de 15 ans a fait le choix de vivre en recluse, de se donner au Christ: elle refuse la main de Lothaire de Monfaucon que son père veut lui imposer pour mari allant jusqu'à se mutiler lors de la cérémonie du mariage.
Face à une telle détermination, son père n'a pas d'autre choix que de bâtir la chapelle de ses vœux où une cellule fermée fera office de tombe avec une simple ouverture pour communiquer avec l'extérieur... Esclarmonde est violée le matin même du jour où elle doit entamer sa vie de recluse, elle garde le silence... Enfermée dans sa cellule, elle découvre son corps qui va donner vie à un enfant dont l'arrivée ébranle son mysticisme mais elle est prise au piège de son engagement.
En outre cette naissance est vue comme un miracle par son entourage . La chapelle devient un lieu de pèlerinage où elle reçoit les confessions de tous. La mort a cessé de frapper dans le comté, du fond de sa cellule Esclarmonde finit par diriger la vie du domaine, par organiser le départ de son père aux croisades.... mais en ce temps là, il est très rapide de basculer du statut de Sainte à celui d'hérétique...
Nous avons ici un univers romanesque remarquable, un récit de légende tel qui devait en exister au Moyen Age, quand le dogme chrétien mêlait mysticisme et superstition . Le style est parfait, le texte glisse c'est une lecture sans difficulté, la langue est admirable. Les personnages secondaires ont une vraie épaisseur , nous pensons notamment ici au couple Bérengère et Martin. Il y a de vrais morceaux de bravoure comme les scènes de vision d' Esclarmonde: dans son sommeil elle voit avec précision son père aux croisades...
Mais ce roman reste un mystère; malgré toutes ces qualités, nous n'avons pas été saisis, nous avons gardé une distance parce que nous n'avons finalement pas cru au personnage d'Esclarmonde, les scènes de dialogues nous sont apparus comme la partie faible de ce texte. C'est un bel ouvrage, mais nous avons l'impression d'être restés à quai, de ne pas participer au voyage. Une sacrée plume que Carole Martinez mais elle n'a pas la magie de Séhérazade, la conteuse ne nous a pas transportés, nous refermons ce livre sans émotion avec une certaine froideur.
Mais nous conseillons cette lecture aux jeunes gens, car s'il y a un message c'est à eux qu'il s'adresse: Méfiez-vous de vos certitudes!
Dommage, nous n'avons pas eu le même ressenti au final. Mais ce n'est pas la première fois, je me souviens du bouquin de Kundera qui malgré votre enthousiasme m'avait laissé sur ma faim.
RépondreSupprimerJe n'ai encore rien lu d'elle et je le ferai certainement un jour mais même les critiques enthousiastes la concernant ne me font pas frémir justement ! Je ne sais pas pourquoi, un peu comme Emmanuel Carrère dont le Limonov m'attend et que je rechigne à ouvrir. Et je suis tellement déçue que Lyonel Trouillot (et Actes Sud) , n'ait pas eu le Goncourt, que je m'éloigne un peu pour l'instant de cette rentrée littéraire particulièrement médiatisée...
RépondreSupprimerCertains se précipitent le jour de la sortie dans les salles de cinéma, pour voir les films le jour j. Nous nous avons ce réflexe pour les livres et un Emmanuel Carrére, ça n'attend pas... Limonov il ne faut pas le laisser trainer, il pourrait venir frapper à la porte!
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