"Limonov, lui, a été voyou en Ukraine; idole de l'underground soviétique; clochard; puis valet de chambre d'un milliardaire à Manhattan; écrivain à la mode à Paris; soldat perdu dans les Balkans; et maintenant, dans l'immense bordel de l'après communisme, vieux chef charismatique, d'un parti de jeunes desperados. Lui-même se voit comme un héros, on peut le considérer comme un salaud: je suspends sur ce point mon jugement."
Emmanuel Carrère résume ainsi le personnage éponyme de son roman . Il nous embarque dans un grand voyage à travers le monde et à travers l'histoire de ces cinquante dernières années. Personnage complexe, Histoire complexe que celle de la Russie, Emmanuel Carrère ne simplifie rien, mais par son style, sa clarté, sa connaissance, il nous permet de les appréhender sans difficulté . Son roman se lit d'une seule traite et cela est déja une première gageure.
Limonov, comme lui, nous sommes sans cesse partagés dans nos sentiments. Détestable, touchant, émouvant nous sommes habités sans cesse par des sentiments différents à la lecture de ces pages,c'est le type même du personnage qui ne peut s'exprimer que dans les périodes troubles de l'Histoire. Il se rêve en héros et en cela son histoire est plutôt un échec, il est toujours vivant et c'est quelque part miraculeux . Nous l'avons préféré en écrivain, son séjour à New-York où il va véritablement se consacrer à l'écriture nous fait penser à la période parisienne de Henry Miller, d'ailleurs cité par l'auteur. Emmanuel Carrére nous donne l'envie de nous plonger dans ses livres véritables petits brûlots qui ne semblent malheureusement plus très bien édités. Finalement nous pouvons penser que c'est la littérature qui a sauvé sa vie, il reste peut être encore une once de respect pour les écrivains en Russie et pour cette raison il a surement échappé à une exécution sommaire.
Mais ce livre est aussi un livre de géographie, celui d'un voyageur. Comme dans "un roman russe"; nous aimons la description faite de ce pays gigantesque que l'auteur semble avoir arpenté dans tous ses recoins, la description de Kharkov, de Moscou des provinces asiatiques sont remarquables et ne sont pas sans nous rappeler celles faites par Fitzroy Mac Lean dans "Diplomate et Franc Tireur" un autre très grand livre sur la Russie malheureusement devenu introuvable.
Limonov est un roman extraordinaire, pas de doute Emmanuel Carrère est un de nos grands écrivains!
Je n'ai pas encore lu mais je n'en lis que du bien de cet auteur ! J'ai "D'autres vies que la mienne" qui m'attend aussi, il va falloir que je trouve le temps (pas évident en ce moment quand on lit à "ma" vitesse...)
RépondreSupprimerNous aimons énormément Emmanuel Carrére, depuis "un roman russe" nous lisons définitivement dés la parution chaque nouveau roman...
RépondreSupprimerNous n'avons peut être pas été assez complet au sujet de livre sur un point précis de la situation russe. C'est sa démographie, notamment l'espérance de vie des hommes qui ne cesse de diminuer, il y fait allusion à un moment dans son livre.
Dans un article du monde du 16 juillet 2009, il était précisé que l'espérance de vie des hommes était de 61,4 alors qu'elle était de 63,8 ans. L'article précisait que l'espérance de vie était en deçà d'un pays pauvre comme le Bangladesh. Ces chiffres expliquent la déliquescence de ce pays.
La connaissance de cette situation doit nous permettre de mieux comprendre la personnalité du héros
J'aime aussi beaucoup Emmanuel Carrère et depuis longtemps.
RépondreSupprimer"La moustache " la classe de neige " ses livres " noirs "
Après la parution de " l'adversaire " et son investissement si névrotique pour cette histoire incroyable qui l'a rendu presque dingue...
( c' est lui qui le dit, pas moi !)
Ses 2 derniers romans
"d'autres vies que la mienne " contiennent de très belles pages sur l'engagement et le sens que l'on peut donner à la vie lorsqu'une succession d'événements terribles la bouleverse
"Le roman Russe" l'histoire de ses origines,et de ses obsessions.
j'aime l'impudeur de cet homme
qui ne triche pas et semble avancer pour être plus en paix avec lui même, alors, bien sur, je suis avec attention chaque parution nouvelle.
Sybil- in
Merci de ce rappel complet de la carrière de Emmanuel Carrére, nous l'avons rencontré avec "l'adversaire" pour ne plus le lâcher par la suite mais nous n'avons pas encore lu ces romans précédents. C'est surement un tort!
RépondreSupprimerNon ! pas forcément ...
RépondreSupprimerJe repense à " La classe de neige " cette histoire place le lecteur dans une tension, quelque chose qui n'est pas très sain et qui interpèle.
On ne peut éviter de se demander quel compte l'auteur tente de régler avec son enfance, ses frayeurs ,ses fantasmes...
(enfin moi , je me demande !)
la force du livre est la capacité de Carrère à nous parler de cet enfant sombre,qui semble résigné.
Des circonstances vont le placer en ligne de phare et l'isoler encore plus loin vers un monde imaginaire et morbide.
La réalité rattrape l'imaginaire et le lecteur est happé comme pris en otage dans un véritable cauchemar....
C' est très noir, on quitte ce texte court- ça pourrait presque être une nouvelle- un peu sonné et mal à l'aise;
C' est là le souvenir que je conserve de ce premier roman lu .
Comme pour "l'adversaire " et "la moustache" , il y a eu film
Des films réussis !
Nous n'avons pas vu l'adaptation de Claude Miller de "la classe de neige". Mais il est certain que nous le lirons un jour, peut être l'année prochaine...parce que là nous avons prévu de partir à la découverte de Hélène Lenoir!
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